samedi 19 décembre 2015

Vous avez dit "gaulliste social" ?



Durant cette semaine, plusieurs responsables de droite, Xavier Bertrand, Christian Estrosi, Renaud Muselier et quelques autres, ont utilisé le terme de "gaulliste social" pour se définir politiquement. Le qualificatif a été repris dans les médias, sans être interrogé. "Gaulliste social", pourquoi, et ça veut dire quoi ? De véritables gaullistes, y en a t-il encore ? Le fait d'accoler l'adjectif de "social", d'apporter cette précision tend à prouver a contrario que la plupart des gaullistes sont plutôt conservateurs. Ce n'est pas sans raisons non plus.

"Gaulliste social" ne serait-il pas un oxymore, comme "socialiste libéral" ? Notre époque aime bien jouer avec le langage. Bien sûr, un gaulliste peut avoir des préoccupations sociales, à la façon de Xavier Bertrand, se rendant ces derniers jours auprès des ouvriers de Toyota et de Pentair, et un socialiste peut respecter rigoureusement les lois du marché : mais ça ne fait pas du premier un socialiste, ni du second un libéral. Attention aux étiquettes qui brillent par leur paradoxe !

Le gaullisme n'a jamais été un courant politique particulièrement social. Les mandats du général de Gaulle ont commencé par une grève des mineurs très dure et se sont terminés avec l'explosion sociale de Mai 1968, 10 millions de grévistes ! Je ne suis pas antigaulliste : comme tout le monde, j'ai de l'admiration pour le général, sa vision d'avenir sur la décolonisation, les institutions, le rôle qu'il a redonné à la France dans le monde, sa politique d'indépendance à l'égard des blocs, américain et soviétique, l'industrialisation du pays. Oui, il y a d'excellentes raisons d'être gaulliste, sauf une : la dimension sociale, absente. Et qu'on ne me parle pas de la participation : un slogan, un gadget, sans conséquence véritable. Non, ce n'est pas le social qui fera qu'on retiendra le nom du général !

Dans les années 60, on a vu apparaître des "gaullistes de gauche". Mais comme les poissons volants, ils ne constituent pas la majorité du genre. Jacques Chaban-Delmas, avec sa nouvelle société, est la seule tentative réelle de gaullisme social, au début des années 70, vite torpillée par Pompidou et Chirac (voir l'excellent documentaire d'hier soir sur LCP). Après, c'est du verbiage. A la fin des années 70, Jacques Chirac veut nous faire croire à un invraisemblable "travaillisme à la française", et lorsqu'il devient Premier ministre en 1986, il nous fait du Reagan et du Thatcher. Il remet ça en 1995 avec la "fracture sociale" et 6 mois plus tard, des millions de salariés sont dans la rue, contre la réforme de la Sécu et des retraites. Le gaullisme social, ça marche mal ! Il n'est pas sûr que sa résurgence actuelle, qui vise surtout à rejeter Le Pen, tienne très longtemps.

14 commentaires:

Erwan Blesbois a dit…

Disons que le gaullisme était plus social que le gouvernement actuel, car à l'époque la souveraineté de la France donc de son peuple n'était pas un vain mot, et n'existait pas encore la globalisation, qui correspond à une vision économiquement libérale de la mondialisation. Or il n'y a aucune remise en cause nationale, ni même mondiale de ce système. Ce n'est donc plus le politique qui dicte ses lois à l'économique, mais l'économique par le biais des plus grandes multinationales, qui dicte ses lois aux Etats. On a la nostalgie du gaullisme car alors il y avait une souveraineté du politique, voter voulait encore dire quelque chose, désormais on sait que droite et gauche feront une politique qui ne touchera jamais à la vision la plus libérale de la mondialisation, il faudrait une volonté politique mondiale, réunissant Américains, Chinois, Russes et Européens pour réformer ce système. Et ce n'est pas Marine Le Pen à elle seule qui réussira à changer quoique ce soit, malgré effectivement ses vœux de souveraineté nationale et patriotique, en réaction à cette mondialisation qui nous impose chômage de masse et immigration comme une fatalité. Il n'y aura pas de réforme car le libéralisme économique est au cœur du système américain et constitue son idéologie, qui remonte à l'éthique du protestantisme et à sa collusion avec l'éthique du capitalisme, et que la volonté de puissance des plus grands Etats, comme la Chine, la Russie, l' Allemagne, le reste de l'Europe, leur impérialisme peut prendre vie par le biais de la mondialisation économique libérale, et des plus grandes multinationales, peut-être demain apatrides et supra nationales. Il est possible que bientôt, un pouvoir économique indépendant dépassera la puissance des Etats. On va donc assister pendant maintenant des années, à l'incurie du politique, à l'incurie de nos gouvernements successifs face au chômage de masse et à l'immigration, à des débordements et des risques de guerre civile causés par la montée du FN, à des attentats commis par la frange la plus radicale de l'Islam ; c'est notre paradigme social, il va falloir s'y habituer, parce qu'il n'y a aucune volonté politique et mondiale de réformer la vision la plus libérale de la mondialisation, qui est dans son mode de fonctionnement radical, la cause de tous les autres maux qui en découlent, donc bien plus dangereux que le FN, que l'islamisme, et qui peut causer à assez court terme, sans régulation, rien de moins que la destruction de la planète.

C a dit…

Si le gaullisme social existait, il se nommerait le socialisme.
Et si le gaullisme commun existait, ce serait le communisme.
C'est de la littérature, de la communication, le gaullisme social...

vincent Savelli a dit…

on n ' est pas gaulliste social, ou gaulliste conservateur , ou je ne sais quoi....quand on est gaulliste , on est "gaulliste", c 'est tout!les autres appellations relève de telle ou telle récupération.vous avez fait état de toute les qualités du général....en effet !!!! a deux reprises il est intervenu quand la france n ' était plus rien : il a sauvé notre honneur et rendu notre république plus forte ! dire qu'il n ' était pas social est faux :c ' est sous la Vem république que les évolutions et progrès sociaux ont été aussi important ...ne raillez pas trop vite la participation : si elle ne s ' est pas développé davantage c' est bien à cause du patronat et des syndicats réunis , qui allaient perdre leurs clientèles réciproques et c ' est bien regrettable car devant l 'échec du marxisme et la sauvagerie du capitalisme impitoyable , De Gaulle avit conçu un 3em type de société auquel ' ailleurs il faudra bien parvenir un jour si on ne veut pas que tout explose....Il était trop seul pour tout mener et qui plus est , comme il le disait lui-m^me , la vieillesse est un naufrage.....!

D. a dit…

"l 'échec du marxisme et la sauvagerie du capitalisme impitoyable" ?
Le marxisme n'est nullement à comparer au capitalisme.
Le marxisme n'est pas l'antithèse du capitalisme.
Le marxisme, c'est une façon de penser, d'analyser la situation.
Le marxisme est destiné à durer de manière sempiternelle n'en déplaise aux contempteur du libéralisme, vous savez, la liberté pour tous, celle de laissez faire et laissez passer en particulier le renard libre dans un poulailler libre...
Devinez qui sont les volailles à plumer ?

Erwan Blesbois a dit…

Le marxisme n'est pas seulement une "façon de penser", "d'analyser la situation" ; le marxisme est aussi un messianisme, les communistes ont voulu changer la nature humaine, or la nature humaine ne se change pas, malgré tous les progrès technologiques l'homme reste un cro-magnon du point de vue moral, aucun progrès à attendre de ce côté là, il n'y a pas hérédité des caractères acquis, contrairement à ce que voulaient nous faire croire les communistes, pas d'hérédité des progrès moraux. On a vu le résultat du marxisme et de la doctrine communiste, en U.R.S.S, et ailleurs, notamment au Cambodge, cela discrédite pas mal de "manière sempiternelle" le marxisme. Le nouveau messianisme qui est en train d'émerger, est un messianisme technologique, c'est le transhumanisme, mais il est en voie de se faire pour l'instant sur fond de la vision la plus libérale de la mondialisation, donc avec des inégalités de traitement absolument insupportables entre riches et pauvres. Pour l'instant le transhumanisme n'est qu'une hypothèse, les transhumanistes dans leur programme qui se tisse peu à peu, de manière un peu anarchique car il y a une multitudes de courants de pensée au sein de ce projet, eux aussi sont persuadés de pouvoir changer la nature humaine grâce à la technologie, de l'améliorer, en vue d'une conscience morale plus développée, notamment grâce à la manipulation génétique du génome des nouveau-nés, et le recours à des implants dans le cerveau ou ailleurs. Ce projet risque d'aboutir aux Etats-Unis et en Chine, mais difficilement en Europe, où se dresseront certainement des interdits bioéthiques très forts. La vision la plus libérale de la mondialisation, est un système qui marche, car avec tout le cynisme de ce système, il est celui qui se rapproche le plus de notre nature de cro-magnon 1.0, sans morale, avec comme principal moteur, la prédation, la rapacité, l'égoïsme ; et il fallu que ce soient nos amis anglais, nos meilleurs ennemis, qui soient à la base de l'élaboration de ce système pragmatique et efficace, mais il y a maintenant bien longtemps, il y a prescription. Là encore comme pour le fascisme, on pourra dire que nous autres Français avons une responsabilité, car c'était notamment pour nous vaincre que les Anglais ont mis en place ce système économique pragmatique et efficace, pour vaincre la puissance continentale majeure que constituait la France, par les voies maritimes du commerce. Commerce intensif et prédateur qui s'est peu à peu transformé en la vision la plus libérale de la mondialisation, mais sous l'impulsion cette fois des Etats-Unis. La force de ce système : il ne veulent pas changer la nature humaine, au contraire ils utilisent le côté reptilien de la nature humaine, ce qu'elle a de plus primitif, de plus immoral, pour faire du profit, c'est tout le cynisme de ce système qui a détricoté peu à peu plus de 1000 ans de progrès moraux en Europe, qui détricote aussi la culture, qui de la fin du XIXème siècle à maintenant, est revenue un peu à l'âge de pierre, avec ses jeux vidéo, sa musique trash, son porno, ses pubs, sa disparition progressive de la musique classique, de la littérature (que Houellebecq prévoit), de la poésie, de la philosophie.

Emmanuel Mousset a dit…

Je suis radicalement hostile au transhumanisme, qui est plutôt un antihumanisme.

Erwan Blesbois a dit…

Bah mais tu le sais bien aussi que la culture et "l'humanisme" ne sont que la superstructure à travers laquelle les puissants et les arrogants assoient leur domination, donc il faut aussi se méfier de la culture, ce qui est toujours à l'oeuvre c'est la nature humaine avec ses pulsions sous la culture, ses pulsions sexuelle et de domination toujours.

Tchernobog a dit…

Le transhumanisme à commencé déjà bien longtemps avec les premières prothèses, les premières lunettes, les premiers vaccins, les premiers pacemakers, c'est une donnée de notre monde contemporain, il avance masqué mais la majorité l'acceptera sans se poser de questions.

Emmanuel Mousset a dit…

A vous entendre, les jambes de bois qui existaient déjà sous l'Antiquité annonçaient le transhumanisme ! Non, l'"homme augmenté", c'est autre chose que l'"homme réparé" : celui-ci reste un être humain, celui-là devient une créature androïde.

Tchernobog a dit…

C'est bien là la frontière morale qui sera franchie par la majorité des gens, techniquement la réparation et l'augmentation ne sont pas distinguables plus que ca(Pistorius courant avec les valides réparé ou augmenté ?). Tous les éléments techniques du transhumanisme sont à porter de main, les problèmes qui vont se poser seront moraux.

Tchernobog a dit…

Un humain amputé doté d'un membre bionique (ce qui fonctionne de mieux en mieux) ne serait donc plus un humain selon vous ?

Emmanuel Mousset a dit…

Je ne sais pas quelle gueule on a avec un "membre bionique", mais dans ma tête, ça se rapproche du monstre.

yvesgerin a dit…

L arbre au livre et puis le tsunami à la bibliothèque le rayon sciences humaines dévasté dans une totale indifférence au secours

Marek a dit…

J-C Petitfils a défini le "Gaullisme social" de façon lapidaire en écrivant que c'étaient les "loges maçonnniques rattachées au pouvoir gaulliste". Ce qui n'est effectivement pas forcément très social, puisque c'est aussi la voie peu glorieuse de la Françafrique.(*) C'est pourquoi, comme tu dis, il ne faut pas confondre de manière abusive "gaullisme social" et "gaullisme de gauche"! Il y a eu des gaullistes de gauche, que tu cites. Il en reste. J'en suis un. :D

P.S. Tout-à-fait d'accord sur le transhumanisme qui est un anti-humanisme. La philosophie transhumaniste est essentiellement motivée par la misanthropie. Enfin... si le transhumanisme renvoie au dépassement de soi vers un degré plus élevé d'intelligence et de moralité (oui, de moralité; j'assume), c'est différent. Mais s'il s'agit de se transformer en prolongement techno-subalterne de sa télécommande, c'est assez moche et ça ne fait pas très envie.

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(*) Précisons que je ne suis pas un de ces tarés qui pensent que la FM est un blog homogène et/ou "satanique". TOUS les FM ne sont pas compromis dans la Françafrique! Il y a mille et une façons d'être maçon et je n'ai jamais rencontré de maçon sectateur de Moloch! De Mammon, par contre... deux ou trois. mais c'est une autre affaire et à vrai dire, je n'en ai pas grand chose à battre. Il y aura toujours des arrivistes.