mardi 15 décembre 2015
La tête dans le ballon
L'événement n'est pas toujours ce qu'on croit. Il faut de l'inattendu. Dimanche soir, la défaite du FN était annoncée, la résistance du PS pressentie, la victoire limitée de la droite prévisible. Alors, quoi de neuf ce soir-là ? Une attitude complètement nouvelle, inédite, surprenante : Nicolas Sarkozy assistait à un match de foot ! Jamais un chef de parti, même un petit chef d'un petit parti, ne s'est comporté ainsi. Le commentaire public des résultats, la présence physique sur les plateaux de télévision un soir d'élection font partie du job, surtout quand on est à la tête d'un parti de gouvernement et qu'on aspire à redevenir président de la République. Etonnant, non ? comme aurait dit Pierre Desproges.
Bien sûr, Nicolas Sarkozy n'a pas été totalement absent : il est intervenu à la télé en début de soirée, mais c'était le service minimum. Comment un grand pro de la politique, qui lui a consacré toute sa vie, peut-il agir ainsi, se tromper aussi lourdement ? L'image qui en ressort est fait de légèreté, d'insouciance, de divertissement : ce n'est pas digne d'un homme public qui vise à nouveau le sommet de l'Etat. C'est d'autant plus surprenant que la droite a tout de même remporté cette élection, en conquérant de nouvelles régions, même si l'ampleur de la victoire est moins grande qu'espérée. Sarkozy aurait pu s'en réjouir, stimuler ses troupes, passer des coups de fil aux gagnants et aux vaincus, pour féliciter et consoler personnellement, toute chose qu'on peut difficilement faire quand on a en même temps la tête dans le ballon.
Il y a une raison à tout, notamment en politique. Et si Nicolas Sarkozy avait eu pleinement conscience de son geste ? Et s'il avait délibérément fait ce choix ? Assister à une manifestation sportive au lieu de participer à la soirée électorale, c'est tout un symbole ! L'homme normal, près du peuple, comme tout le monde, le voilà. Ce n'est pas à n'importe quel spectacle auquel il assiste, mais à l'activité la plus populaire de France, le foot. Et puis, les régionales, Sarkozy s'en moque, réussite de son camp ou pas : c'est l'Elysée qui l'intéresse, il nous le fait savoir par son indifférence de dimanche soir. La montée de l'extrême droite, la satisfaction relative de son parti, la meilleure tenue que prévue du PS, il est au dessus de tout ça, au-delà, déjà en 2017.
Dernière hypothèse : Sarkozy a craqué. Le dimanche soir, on est parfois comme ça, désabusé, mélancolique. Sarkozy en a eu marre de ce cirque qu'est sa vie. La politique et son cortège de contraintes, de médiocrités, de compromissions, ce n'est pas reluisant, passionnant : il en a sa claque, il part, mais un soir seulement, quelques heures. Faire de la politique, c'est refouler son désir, calmer ses attentes, renoncer à une partie de soi-même : il n'y a qu'un ascète qui puisse l'accepter. L'activité publique n'est pas l'aventure exaltante qu'on croit. L'enthousiasme, la ferveur, la création, c'est dans l'art ou la littérature qu'on les trouve, et Sarkozy, lui, avec ses goûts, dans le sport. Le temps d'une soirée, Nicolas Sarkozy s'est libéré. Mais c'est déjà fini : dès lundi matin, il était redevenu l'homme aliéné qu'il consent à être depuis près d'un demi-siècle.
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4 commentaires:
Vous donnez dans le panneau... Un politicien ne cesse jamais d'être en politique. Monsieur Sarkozy, en allant "voir" peut-être et "se faire voir" surtout lors d'un match de football, fait de la politique, celle de la communication, celle du spectacle, celle qui nous a mené là où on se trouve : 2100 milliards de dette... Et au fait, si on faisait le cumul des avoirs et des débits de tous les élus, ils seraient en négatif ou en positif ?
Sarkozy, ce sous-Giscard, n'a pas encore compris que les Français ne veulent plus de lui et comme Marine Le Pen il sera le meilleur agent électoral de François Hollande si ce dernier, socialiste d'opérette, passe le premier tour en 2017 alors que les Français ne veulent plus de l'un et de l'autre.
L'hyperactif Nicolas Sarkozy a craqué, en a eu "ras-le-bol" du cirque politique en cela il devient humain mais il devrait aller plus loin: se retirer de la vie publique pour de bon. Il nous rendrait un fier service de nous délivrer d'un personnage agité et anxiogène. Mais il est dommage que "chassez le naturel il revient au galop" il ne peut pas se retirer pour de bon sauf à contribuer à faire réélire Hollande. A moins que, comme dans la fable de La Fontaine, la tortue Juppé, contre le lièvre Sarkozy, ne l'emporte aux primaires de la droite puis face à Hollande au second tour.
A l'avant-dernier : qu'est-ce que vous avez contre l'opérette ?
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