vendredi 4 juillet 2014

Rendez-nous Ivan Levaï !



J'ai mes habitudes : chaque week-end, je commence mes journées avec la revue de presse d'Ivan Levaï, sur France-Inter. Une revue de presse, c'est indispensable : on ne peut pas lire tous les journaux nationaux, tous les articles, il faut faire un choix, c'est le travail de la revue de presse. Et puis, c'est un exercice à part entière, qu'Ivan Levaï a porté au niveau d'un petit art, bien à lui, avec sa touche d'originalité (par exemple illustrer l'actualité par une chanson, souvent ancienne). Quand on s'intéresse à la politique, on ne peut pas faire l'économie de la revue de presse. A tel point que je m'en sers comme d'un critère pour repérer localement les mauvais : ceux qui ne font pas ou ne s'intéressent à aucune revue de presse.

Eh bien, depuis le week-end dernier, je me lève sans Ivan Levaï : ce n'est plus sa voix que j'entends dans la revue de presse, mais quelqu'un que je ne connais ni d'Eve ni d'Adam, et surtout qui ne me fait ni chaud ni froid. Explication : Levaï est trop vieux (77 ans), place aux jeunes ! Oui, je veux bien que Philippe Bouvard s'en aille, mais pas Ivan Levaï ! Car une revue de presse, c'est une voix, et ça ne vieillit pas, une voix. Levaï est pour moi le même qu'il y a 30 ans.

Entre lui et moi, c'est une longue histoire, qui fait que j'y tiens. Je dois l'éveil et la formation de ma conscience politique à plusieurs éléments, dont celui-là : la revue de presse d'Ivan Levaï (à l'époque, il était sur Europe 1). Il m'a fait aimer la politique à travers ses commentaires vivants, libres, amusants, que j'appréciais d'autant plus que j'y sentais une tonalité de gauche. Il m'a fait aimer la presse, les journaux, non seulement par le contenu de ses propos, mais pour deux anecdotes : d'abord, savoir qu'il se levait à 4h00 du matin pour lire les journaux et préparer son intervention de 8h30 me laissait rêveur (c'est le cas de le dire) et donnait toute l'importance qu'il fallait accorder à la presse. Ensuite, au micro, j'avais plaisir à entendre non seulement sa voix, mais le bruit des pages qu'il feuilletait, qui rendait réel son exercice. Je crois qu'on n'aime la presse que dans un contact charnel (là aussi, c'est un critère de discernement : aller acheter son journal comme sa baguette de pain).

Ivan Levaï n'est pas seulement l'injuste victime de son âge, mais de l'air du temps. Il y a quelques semaines, un méchant petit article de Télérama, organe central des classes moyennes intellectuelles, accusait Levaï d'humour douteux et de misogynie ringarde, pour une broutille d'époque, une minuscule "polémique", un soi-disant "couac", comme on dit aujourd'hui (j'en ai oublié le prétexte tant il est minable). On ne peut plus rien dire, il faut surveiller son langage, les mots doivent rester très premier degré. Quand on sait qui est Ivan Levaï, le taxer de misogynie est ridicule, comme si on accusait le pape d'athéisme ou Nelson Mandela de racisme. Mais ainsi le veut le règne moralisateur du politiquement correct.

En attendant, nous voilà privés d'Ivan Levaï, et c'est un scandale. Je ne sais pas ce qu'on peut faire contre ça. Au moins, j'aurais fait ce billet. Rendez-nous Ivan Levaï !

10 commentaires:

Anonyme a dit…

Et moi je pleure encore Geneviève TABOUI ...........

Emmanuel Mousset a dit…

Je compatis avec vous, mais là, impossible de nous la rendre. Paix à son âme !

Anonyme a dit…

SERAIT son explication très claire et très directe ...

«Viré» de France Inter, Ivan Levaï dit avoir été rangé dans «la catégorie des vieux cons caducs»

Et vous mon cher MOUSSET , vous vous mettez dans quelle catégorie ...
Chroniqueur et égratignure public??

Emmanuel Mousset a dit…

Je suis hors-catégorie.

Anonyme a dit…

rendez nous mermet !!!!!!!!!!!
les chasses aux sorcières ne sont pas l'exclusivité des régimes fascistes, non non

Anonyme a dit…

Pointer Télérama est injuste, de Marianne au Parisien, de Métro au figaro en passant par le point ou le nouvel obs, beaucoup de titres ont critiqué dans leur chroniques ivan levai. faites votre revue de presse !
ca fait 2 ans qu il est critiqué et pas que par les bobos comme vous le laissez entendre.
la nouvelle direction de cette radio est par ailleurs seule responsable de sa décision, elle n'a pas eu besoin de la presse écrite pour faire ses choix qui touchent une bonne parti du personnel. beaucoup n ont pas la chance d avoir l'âge de la retraite, ma pensée va en premier vers eux.

Anonyme a dit…

Rendez nous aussi
Sénèque
Plutarque
"Philippe de Commines
Voltaire
Et tous les autres célèbres chroniqueurs

Emmanuel Mousset a dit…

1- Non, je ne parlerais pas d'une "chasse aux sorcières", expression inappropriée, anachronique en la circonstance.

2- Tout ce que vous dites est vrai, mais ne contredit pas ma réflexion.

3- Pas besoin de nous rendre les chroniqueurs que vous citez : il suffit de les lire, ils n'étaient pas des chroniqueurs radiophoniques.

Anonyme a dit…

On pourrait vous classer dans la catégorie : " speaker de Hyde park " mais indoor et par blog interposé ...

Emmanuel Mousset a dit…

Catégorie très démocratique, of course.