jeudi 24 juillet 2014

La démocratie ne craint pas la rue



La manifestation pro-palestinienne, hier à Paris, a rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes, sans un seul incident, sans dérapage antisémite. Samedi dernier, à Barbès, un rassemblement analogue, de quelques centaines de participants seulement, a débouché, à la fin, sur des incidents violents. Idem à Sarcelles. La première manifestation était autorisée, les deux autres ne l'étaient pas. Cherchez l'erreur.

La manif d'hier a été précédée par un débat indécidable et donc irritant : fallait-il autoriser ou pas ? Y aurait-il des heurts ou non ? D'un côté les défenseurs de la liberté d'expression, de l'autre les partisans de la sécurité et de la fermeté : polémique idiote, comme bien souvent. Un républicain, de gauche ou de droite, est à la fois pour la liberté, pour la protection des biens et des personnes et pour le respect de la loi.

Pour moi, le principe est simple : toute manifestation demandée par des organisations reconnues et préparée avec les autorités préfectorales doit être systématiquement autorisée, quel que soit le contexte national ou international. L'initiative d'hier répondait parfaitement à ces exigences. Pour Barbès et pour Sarcelles, j'en suis moins sûr. Quelques leçons peuvent être tirées :

Le danger n'est pas dans le nombre. Au contraire, une foule immense est plus facilement canalisable. A petite échelle, les groupes de provocateurs s'imposent, donnent le ton et sèment assez vite le désordre. Quand la mobilisation est importante, ils sont soit noyés dans la masse, soit refoulés et marginalisés.

Il faut saluer, dans les manifestations de rue, la présence, le rôle et le travail des partis, syndicats et associations, de tous ces relais d'opinion qui sont indispensables à la démocratie, qui savent structurer un mouvement populaire, qui ont le savoir faire, l'expérience pratique. L'action des services d'ordre est essentielle. Tout ça n'est pas secondaire ou superflu : la République, ce sont de grandes idées, mais aussi de petites et précieuses règles de vie collective.

Les forces de l'ordre jouent elles aussi un rôle indispensable. Je n'ai jamais fait partie de ceux qui crient CRS-SS ! ou qui ont le réflexe anti-flic. Au contraire, je me réjouis de vivre dans un pays où nos forces de l'ordre sont parfaitement républicaines, ce dont tous les régimes politiques à travers la planète ne peuvent hélas pas se targuer. La police et la gendarmerie sont autant des piliers de la République que l'école. En revanche, je n'ai pas aimé qu'on dise de la manifestation d'hier qu'elle était "sous haute surveillance", comme si nous étions dans un état de guerre. Non, les forces de l'ordre ne "surveillent" pas les manifestants : elles les protègent, elles assurent leur sécurité, elle garantissent l'application du droit d'expression.

Le seul reproche que j'ai à faire, la seule critique que j'ai à adresser, c'est à l'égard du traitement médiatique des événements par les chaînes d'information continue, qui ont tendance à transformer l'actualité en une sorte de spectacle. Quelques dizaines de voyous qui cassent tout, ça n'a rien à voir avec la défense des Palestiniens, ni avec la plupart des manifestants de Barbès, par exemple. Mais la sélection des images et leur diffusion en boucle donnent une impression fausse et exagérée de la réalité.

J'ai entendu des termes ahurissants en guise de commentaires politiques : "émeutes", "insurrection" ... et pourquoi pas guerre civile, tant qu'on y est ? Non, cette exploitation sensationnelle de l'événement crée, dans l'opinion, un climat qui n'est pas bon pour la démocratie. Sommes-nous d'ailleurs encore dans le journalisme avec un tel traitement de l'information ? C'est, bien sûr, un autre débat, mais l'influence des médias sur les citoyens est devenue telle que la question mérite d'être posée.

En tout cas, le bon déroulement de la grande manifestation d'hier redonne des couleurs à notre démocratie et nous fait comprendre que ce régime n'a rien à craindre de la rue, puisqu'il trouve sa légitimité dans cette rue et dans les urnes, quand le peuple revendique ou quand il vote. La rue, les gouvernants, de droite ou de gauche, ont tendance à s'en méfier, parfois à la redouter. Il n'y a pas de raisons.

Les gens de droite sont beaucoup plus réticents à battre le pavé que les gens de gauche. Ce n'est pas tout à fait dans leur culture historique ... sauf quand la gauche est au pouvoir et que la droite est moins réticente à défiler contre elle ! Comme quoi, dans certaines circonstances, la gauche peut aussi faire l'éducation de la droite et lui apprendre, involontairement, les bonnes manières démocratiques. Tous à la manif !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

la surveillance fait partie des missions des forces de l'ordre en cas de manifestation.
Protéger et sécuriser les manifestants , oui mais c'est aussi les surveiller afin de protéger les vitrines, le mobilier urbains, les passants et repérer les éventuels casseurs.
c est en fait parce qu'ils sont tous surveiller que les manifestants pacifiques sont protégés. La surveillance n'est pas un vilain mot, c'est l'observation qui garantie le bon déroulement d'un cortège de manifestant.
Policiers en civils, cameras, l'encadrement dune manifestation se fait par la surveillance.