mardi 8 juillet 2014

Bac, suite et fin



Aujourd'hui ont eu lieues les dernières interrogations de l'oral de rattrapage du baccalauréat. La série 2014 prend donc fin, on range les tables, on éteint les lumières et on ferme les salles. Ce bac aura connu, comme chaque année, ses épisodes mouvementés : la grève des cheminots qui a fait peur à tout le monde et qui finalement n'a gêné personne, la pétition des candidats scientifiques trouvant leur épreuve de maths trop difficile (alors qu'on prétend que le bac est bradé), et même une péripétie saint-quentinoise qui a fait le buzz (des copies de philo égarées pendant quelques heures, puis retrouvées dans une poubelle). Au-delà du folklore indispensable à toute légende (et le bac est devenu une légende nationale), quelques idées fausses persistent, sur lesquelles j'aimerais revenir :

1- Les notes du bac sont livrées à la seule appréciation personnelle des correcteurs, avec tous les risques d'arbitraire, de partialité, d'erreur que cette position solitaire fait courir.

Non, ça ne se passe pas comme ça. Les copies ne sont pas traitées par des profs en peignoir de bain, une clope au bec, sur un coin de leur cuisine, entre le saucisson et le verre de rouge. Certes, l'évaluation est individuelle, mais elle est en quelque sorte modérée, encadrée par des procédures collectives, qu'on appelle réunion d'entente et réunion d'harmonisation. Dans la première, les enseignants se mettent d'accord sur quelques critères de notation. Dans la seconde, ils comparent leurs moyennes, l'échelle des notes, et abordent les copies litigieuses. Les risques d'arbitraire, dans la sévérité excessive autant que dans le laxisme débridé, sont donc considérablement restreints, pour ne pas dire nuls. In fine, ce sont les jurys qui décident de l'obtention du bac ou pas, c'est-à-dire un collectif d'une petite dizaine de professeurs, qui s'appuient éventuellement sur le livret scolaire des candidats, c'est-à-dire leurs résultats dans l'année.

2- L'administration demande aux correcteurs de remonter les notes.

Non, totalement faux. Ni les inspecteurs, ni l'administration ne disposent de ce pouvoir d'autorité. Les textes et la pratique sont très clairs : le jury de professeurs, et lui seul, est souverain. Dans l'administration, on ne plaisante pas avec les textes réglementaires, et si cela était, les syndicats auraient vite fait de rappeler la règle à ses contrevenants. Jamais, de ma vie d'enseignant, qui que ce soit ne m'a demandé de modifier mes notes. Mais il m'arrive de le faire moi-même, pour de très rares cas, au vu des résultats annuels d'un candidat, après délibération collective, et quand il y a nécessité.

3- le bac est quasiment donné, puisque plus de 80% des candidats l'obtiennent.


La remarque est particulièrement idiote. Ou alors, elle cache un non dit : le désir de revenir à un lycée élitiste, où n'accédait qu'une petite minorité d'élèves. Mais le lycée d'aujourd'hui, et depuis une quarantaine d'années, a pour objectif non pas de sélectionner une élite (ce que font les classes préparatoires et les grandes écoles), mais de former toute une classe d'âge, la faire parvenir à un niveau qui lui permettra d'entreprendre les études de son choix ou d'entrer dans la vie active. Je me réjouis que 80% y parviennent. Et le jour où les 100% seront atteints, j'exulterai ! Car c'est une drôle de réaction que de se plaindre du succès grandissant de nos jeunes lycéens. Et c'est de la malveillance que de soupçonner le corps enseignant d'être peu regardant sur les exigences, de soi-disant rabaisser le niveau. Quand on est un professionnel, on essaie de faire de son mieux, sans démagogie ni dureté.

Les cartons du bac 2014 sont clos, les préjugés sont passés. Mais les uns et les autres ressortiront comme neufs, l'an prochain, j'en suis certain. C'est le lot de toutes les légendes.

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Mention BIEN pour ce BILLET de fin d'année !!!!!!!!!

Anonyme a dit…

Allez on remonte les notes :

MENTION très BIEN !!

Emmanuel Mousset a dit…

Je vais finir avec les félicitations du jury ! Mais si la note est remontée, c'est qu'elle n'est pas méritée ?

Anonyme a dit…

On vous sait fatigué par toutes ces journées qui stressent élèves et profs ...
Mais expliquez nous pourquoi on a des champions avec des notes au dessus de 20 , l'éthique voudrait que on plafonne à 20 ... La surcote étant du domaine spéculatif mais pas du tout du domaine pédagogique ...

Emmanuel Mousset a dit…

Ce sont les vacances qui me fatiguent, jamais le travail ! Quant à votre remarque, elle ne concerne que quelques rares cas, où l'accumulation arithmétique des coefficients aboutit à ce qui peut paraître comme une bizarrerie. L'éthique n'a rien à voir là-dedans : c'est un problème de calcul. Et si l'on veut faire un peu d'éthique pédagogique, la notion de "plafond" est très discutable (pourquoi stopper l'excellence à un certain niveau ?).

Anonyme a dit…

Bien vu , vous êtes cuit , votre réponse dit tout et son contraire... Vous affirmez sans vérifier que ces cas sont rares ... Mais dites nous combien et par catégorie ; c'est votre principal défaut , vous êtes généraliste même dans le cadre des commentaires sur l'éducation et cela est dommage !

Emmanuel Mousset a dit…

Allez-vous reprocher à un médecin d'être généraliste, et pas spécialiste ? Non, je ne crois pas. Ma réponse ne contient aucune contradiction. Quant à la précision que vous demandez, elle traduit bien un travers de notre époque : le besoin inutile de vouloir tout quantifier. La notion de "rareté" doit suffire à votre curiosité et à la compréhension du problème.