lundi 25 mars 2013

Qui sont les salopards ?



Le Parti de gauche part à la dérive. Lors de son congrès, Pierre Moscovici a d'abord été traité de "salopard", parce qu'il veut sortir Chypre de son "économie-casino" qui ruine son peuple et menace l'Europe. Surtout, il y a cette formule de Jean-Luc Mélenchon : Moscovici "ne pense pas français, il pense finance internationale". Certains ont parlé d'antisémitisme : non, Méluche est immunisé contre ce travers criminel. Mais que le vocable employé soit d'extrême droite, c'est évident : la référence à une pensée "française" qui serait corrompue par la "finance internationale", c'est le langage des nationalistes depuis plus d'un siècle. Comment Mélenchon et son parti ont-il pu en arriver là ? Je vois quatre raisons à ce tragique mystère :

1- Les membres et dirigeants du Parti de gauche sont d'anciens socialistes qui veulent à tout prix faire oublier leur passé et ce qu'ils ont été. Mélenchon est resté trente ans au PS, a été un ministre discipliné. Les uns et les autres veulent aujourd'hui rattraper le temps perdu en se lançant dans une fuite en avant, se racheter par des excès de langage, en brûlant ce qu'ils ont autrefois adoré. Il y a de la haine de soi dans cette dérive politique, un puissant désir de revanche idéologique.

2- La radicalisation à gauche a toujours eu un moteur principal : la haine de la social-démocratie, que Jean-Luc Mélenchon traduit sur tous les tons. Historiquement, c'est le réflexe de l'extrémisme de gauche, que Mélenchon a adopté. Les socialistes sont associés à des traîtres qui finissent, à ses yeux, par devenir pire que la droite.

3- La virulence du Parti de gauche s'explique aussi par sa concurrence avec le PCF, parti plus fort et plus construit que lui, à qui Jean-Luc Mélenchon ne cesse de vouloir donner des leçons d'opposition, comme si les communistes étaient trop timorés. Ce petit jeu du "plus à gauche que moi tu meurs" est bien connu au PS, où il est passé de mode. Entre PG et PC, il continue à faire des ravages : pour obtenir des places et garder le leadership, Mélenchon est condamné à prouver qu'il est le meilleur opposant, celui qui va le plus loin dans la dénonciation du gouvernement.

4- Enfin, on peut penser que Jean-Luc Mélenchon est piégé par son combat volontairement frontal avec l'extrême droite, qu'il a voulu exclusif et spectaculaire, mais qui a en quelque sorte déteint sur lui. Il y a des duels où l'on finit par ressembler à l'adversaire à force de se battre sur le même terrain. En tout cas, le Moscovici qui "ne pense pas français" mais qui "pense finance internationale" aurait parfaitement pu sortir de la bouche de Marine Le Pen.

Nous n'avons pas affaire à un "dérapage", mot à la mode qui ne veut rien dire. Mélenchon est un lettré, idéologiquement charpenté, qui connaît sa rhétorique, qui maîtrise parfaitement le langage, qui assume et théorise ses outrances. Il n'est donc pas victime d'un lapsus, d'un coup de fatigue ou d'un coup de nerf. C'est bien une logique politique implacable qui le conduit à accoster sur des rivages dangereux.

Hier, le Parti de gauche a donné une liste de 60 villes dans lesquelles il souhaitait présenter des listes autonomes, dont Saint-Quentin. Tant mieux, la dynamique de la clarification se poursuit : il y aura les sociaux-démocrates et leurs partenaires historiques d'un côté et les radicaux de l'autre, mélenchonistes, communistes dissidents et extrême gauche. C'est cette dynamique de la clarification qui pourra enclencher une dynamique de la victoire. J'en reste, plus que jamais, à ma stratégie d'alliances défendue depuis plusieurs années : une liste socialiste ouverte notamment au PCF, car je ne confonds pas celui-ci, sérieux et responsable, avec les égarements du Parti de gauche, des ex-socialistes transformés en anti-socialistes.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

43% des électeurs PS dans l'Oise ont voté FN.
Le front républicain n'existe plus,
le candidat UMP n'était pas un saint, mais de là à voter FN.
J'ai mal à mon PS.

Emmanuel Mousset a dit…


Le tort de notre candidate battue est de n'avoir pas clairement appelé à voter UMP. Dans ce genre de situation, on n'hésite pas.

Claude a dit…

Tu dédouanes un peu vite Mélenchon d'antisémitisme. Il a assez de culture politique et historique pour savoir parfaitement avec quoi il flirte quand il dit que Moscovici "ne pense pas français"