mercredi 4 janvier 2017

Qui est l'héritier de Hollande ?



Il parait qu'il y a comme un froid entre François Hollande et Manuel Valls. C'est le Canard enchaîné, journal satirique mais néanmoins informé et sérieux, qui le prétend ce matin. Les deux hommes ne se parleraient plus. Quand on pense qu'il y a quelques semaines, pas si longtemps, ils avaient partagé ensemble un repas de clarification, qui m'avait valu un billet d'explication gastronomique ! Ils n'ont qu'à recommencer.

Mais cette fâcherie est-elle vraie ? Manuel Valls répond que non, que c'est une "plaisanterie". Il ne faut pas rire avec ces choses-là. L'ancien Premier ministre apporte une preuve : il a souhaité la bonne année au président de la République, il lui a donc adressé la parole. Et comme nous sommes le 4 janvier, la prise de langues est toute récente. Mais attention : en politique, quatre jours, c'est une éternité. Il peut s'en passer, dans cette durée, des choses, qui bouleversent une situation du tout au tout.

Ce que j'en pense ? Que tout ça n'a aucune importance. La vie politique est faite de disputes et de rabibochages. On change de trottoir quand on se voit, puis on se jette au cou quand on se retrouve. La vie est une comédie, la politique est une hyper-comédie. Et puis, en supposant que Valls et Hollande se soient causés en se souhaitant une bonne année, qu'est-ce que ça prouverait ? On s'embrasse et on n'en pense pas moins. La politique est pleine de baisers mouillés au poison.

Pourtant, cette anecdote a une part de vérité. Elle amène à se poser une question politique sérieuse : qui est l'héritier de François Hollande ? Certes, en politique, on n'est jamais si bien servi que par soi-même. Mais, à défaut, qui prend le relais ? Pour le moment, c'est Manuel Valls, en apparence. Mais assume-t-il vraiment l'héritage ? Oui et non, puisqu'il revendique un "droit à l'inventivité", curieuse formule, sous forme de lapsus, puisqu'elle nous fait penser au "droit d'inventaire" que proclamait Lionel Jospin en 1995, pour se distinguer de François Mitterrand.

Et puis, nous avons le sentiment qu'ils sont deux à pouvoir se réclamer du père : Valls et Peillon, ce qui fait un de trop, évidemment. Surtout, c'est au roi de désigner son dauphin. Et là, François Hollande se tait, ne fait pas le moindre signe, même symbolique. Mon avis, c'est qu'il ne dira rien avant le résultat de la primaire, qu'il ne s'engagera pas, que la plupart de ses ministres ne soutiendront aucun candidat : la sortie de l'Elysée ce matin en a été l'illustration. Le gouvernement a la tête ailleurs, et il a raison : c'est le sort de la France qui le préoccupe, pas celui du Parti socialiste, qui se soucie fort bien tout seul de lui-même (ou très mal, selon les points de vue). Hollande ne pense qu'à un chose : soigner sa propre sortie, pas favoriser l'entrée d'un autre.

Il y a encore un argument plus fort : comme nous tous, François Hollande ne sait pas qui va sortir du chapeau des primaires, ni surtout dans quel état. Il fait donc la seule chose à faire, qui est parfois la sagesse suprême en politique : il attend, et il soutiendra le moment venu et voulu, car l'indifférence absolue en de telles circonstances serait inconcevable, celui qui sera le mieux ou le moins mal placé pour l'emporter à l'élection présidentielle, en tout cas celui qui aura une chance, petite ou grande, d'être sélectionné pour le second tour.

Et celui-là, dont nous ne connaissons pour l'instant ni le nom ni le visage, ce pourrait bien être Emmanuel Macron, si les sondages persistent à le mettre en tête. J'ai posé, dans ce billet, la question politique fondamentale : qui est l'héritier de François Hollande ? Je n'ai pas voulu apporter tout de suite la réponse, préférant d'abord les considérations tactiques. Mais sur le fond idéologique, Macron est celui qui a le plus de proximité avec François Hollande. C'est bien lui qui, dès le début du quinquennat, a influencé la politique choisie.

Et si le ministre de l'Economie a fini par quitter le gouvernement, ce n'est pas parce qu'il prônait un changement de politique, à la différence de Montebourg et Hamon : c'est au contraire parce qu'il pensait que cette politique n'allait pas assez loin, qu'il y avait des atermoiements, des timidités, des hésitations. Il y a des départs qui sont motivés par la fidélité. En tout cas, Emmanuel Macron n'a jamais critiqué publiquement François Hollande, l'a toujours assuré de son affection. Ces choses-là comptent. Oui, Macron, à sa façon, est l'héritier de François Hollande. Reste maintenant à ce qu'il devienne son successeur.

9 commentaires:

Philippe a dit…

Il n'y a pas d'héritage.

P a dit…

Le président sortant, encore jeune, et n'ayant pas spécialement imprimé une marque indélébile sur l'état durant son passage à l'Elysée, ne peut désigner personne qui soit habilité à reprendre son flambeau d'autant qu'il peut considérer ne pas avoir achevé son parcours à ce niveau.
En toute logique, personne ne devrait se prévaloir de lui "succéder" au titre d'héritier.
Le plus apte à pouvoir se réclamer du président sortant sera celui qui sortira vainqueur de la primaire.
Aucun ne le dira cependant clairement : tout au plus reprendre ceci ou cela de ce qui aura été fait au cours des cinq dernières années.
Les plus en droit fil du sortant sont à l'évidence ceux auxquels les sondages donnent le moins de crédit : l'écologiste et la radicale.
Sinon l'ancien ministre de l'éducation reste quand même vraiment proche de ce que le président sortant a voulu faire malgré le fait qu'on voit mal ce que ce philosophe perçoit en économie.

Anonyme a dit…

Macron, un héritier de Hollande ? De la médiocrité d'un petit apparatchik timoré qui a fracturé de concert avec son premier ministre Valls la gauche française comme rarement dans son histoire, qui, dans le prolongement et la parfaite continuité du virage droitier entamé en mars 1983 d'un parti qui se dit socialiste, fait la même politique que la droite et que vous et Macron voulez aggraver. Triste bilan qui va conduire au naufrage de la gauche.

Anonyme a dit…

Les notables locaux socialistes avec leurs costards bien coupés et leurs têtes de premiers de la classe ont dépassé en ringardise ceux de DROITE qui n'ont plus de cravate ... Et comme leurs anciens amis communistes ils vont sombrer dans un simili anonymat ... Et résister seulement dans quelques bastions , sorte de réserves ... A usage politique ... MACRON qui a compris très vite tout ça et mesurer le niveau de stagnation et de pratiques du sur place institutionnel où le temps se transforme en règle de touche pas à mon poste .. MACRON va secouer le cocotier d'où vont tomber ces élus inactifs retranchés derrière une administration féodale et aux usages lourds et peu transparents ....

Anonyme a dit…

Ils en avaient avant ! Les politiques sont dans l'impasse... Plus aucun projet à nous fournir à part leur loi Macron, travail... SNJ

Erwan Blesbois a dit…

L'héritage de François Hollande en est un de progressiste sous influence libérale, depuis que le PS a totalement trahi en 1983 sa sensibilité socialiste, sans jamais essayer de revenir en arrière. Pourquoi les gens continueraient-ils à voter pour les partis progressistes droite et gauche confondues ? Les peuples sont épuisés, ravagés, lobotomisés par le progressisme. Et que l'on ne nous sorte pas l'argument éculé que la renonciation au progressisme nous conduirait au retour à un Moyen-âge économique et culturel, c'est complètement faux. Et en réalité même le Moyen-âge était préférable à notre époque de "barbarie de la modernité" (hyper riches, hyper pauvres, hyper délinquance, terrorisme, rapports sociaux de défiance réciproque, destruction de l'environnement).
Les partis progressistes droite et gauche confondus nous proposent tous le même modèle : croissance, baisse des dépenses publiques et innovation. Pour l'instant on ne se rend pas encore compte qu'un tel modèle signifie à terme ni plus ni moins que la destruction de tout ce qui est vivant sur Terre. Je parle de la biodiversité mais aussi des cultures particulières propres aux différents peuples et religions, qui composent encore cette Terre, et ne sont pas tous encore noyés dans le grand magma mondialisateur, mais en voie de l'être... D'où la résistance de l'Islam d'ailleurs.
Le multiculturalisme et l'antiracisme se font en Occident sous l'autorité du progressisme. Le progressisme si l'on suit sa logique exponentielle de progrès illimité, signifie en réalité la mort lente mais certaine à terme, des différentes cultures particulières composant une société se disant hypocritement "ouverte" (oui car la bouche d'un tel type de société est ouverte, pour mieux avaler ses victimes), sous les coups de boutoir du progrès qui se fait en réalité par le biais du plus pur libéralisme économique. Ce dernier est la seule alternative selon ses émules, pour échapper à la "barbarie identitaire". Émules qui sont encore la majorité de ce que compte de "capital symbolique" l'Occident, dont notre ami philosophe et blogueur fait partie. Mais plus pour longtemps, car même les plus fanatiques des libéraux seront bien obligés de revenir sur la notion de progrès, quand ils réaliseront qu'il en va de la survie des leurs.
Je confonds délibérément conceptuellement "progrès" et libéralisme, car désormais le "progrès" ne se fait même plus par l'idéal des lumières et la réflexion critique ; mais exclusivement par le biais du libéralisme économique le plus décérébré ("vice privé, vertu publique") qui aboutit à une explosion des inégalités sociales, en plus des ravages sur l'environnement des progrès technologiques. Puisque l'aiguillon qui est désormais derrière le progrès technologique est la course au profit propre à l'idéologie libérale, ce "progrès" se fait sans conscience, et n'est pas un véritable progrès (ainsi on peut mettre le terme entre guillemets, car il est faux et contraire à sa définition). Et "science sans conscience n'est que ruine de l'âme".

Anonyme a dit…

Parler d'héritier de Hollande c'est parler en termes monarchiques. Comme quoi l'inconscient culturel et politique monarchique de notre pays perdure. De toutes les façons il n'a pas d'oeuvre, ni de personnalité ni d'action politique qui puisse permettre de penser en ces termes. Il aura un successeur à la tête du pays, du parti qui n'a de socialiste que le nom c'est pourquoi il est une véritable imposture que les français vont sanctionner durement lors des élections présidentielles et législatives. Comme l'a dit un autre commentateur Hollande n'est finalement un petit apparatchik qui s'est élevé à la magistrature suprême par défaut des "éléphants" de son parti.

Anonyme a dit…

Et "science sans conscience n'est que ruine de l'âme".
Valls sans courage renie le 49 / 3 ; c'est pas lui , c'est les autres ; courage fuyons ...
Peillon se noie dans le racisme et la laïcité .....
Melenchon rejoue les DE GAULLE en voulant sortir de l'OTAN ...
Ce qui va encore plus précipiter les militaires à voter LE PEN , eux qui ont besoin du matériel US ........
Reste HAMON et MONTEBOURG qui font de beaux discours ....
Est ce ça une primaire de bon niveau .... Que nenni !!!

R a dit…

A Erwan : ce que vous nommez aimablement "progressisme" ressemble plutôt à "regressisme" si ce terme figurait dans les dictionnaires.
Ce qui se passe en effet depuis le "tournant" de 1983, c'est une régression à tous points de vue.