vendredi 13 janvier 2017

Bennahmias chez les Men in black



Le premier débat des primaires du PS promettait d'être violent. Il a été plutôt gnangnan, surtout dans sa première moitié. Bien malin pourrait dire qui en est sorti vainqueur. Visuellement, les candidats donnaient l'impression de porter tous le même costume. Et puis, le niveau n'était pas vraiment présidentiel : sérieux, oui, presque trop ; technique assurément et hélas, car un président de la République n'est pas un technicien. Les complets sombres étaient loin des habits élyséens d'or et d'argent.

Nous avions affaire à un débat de ministres, et ils étaient plusieurs anciens parmi eux ; parfois de directeurs de cabinet ou de conseillers. Mais on ne sentait pas vibrer les hommes d'Etat, sauf chez Manuel Valls, lorsqu'il a été question de politique extérieure et de terrorisme. Il manquait le lyrisme, la vision indispensables à la fonction. Même Arnaud Montebourg, d'habitude dans le genre inspiré, a été hier soir en retrait, moins éloquent. Parfois, les interventions étaient compliquées. Je n'ai pas été convaincu par l'argumentation de Benoît Hamon sur son revenu minimum d'existence. Le moment où l'opposition entre les débatteurs a été la plus forte, c'est sur la loi Travail. Mais comme je la soutiens ...

Une surprise ? Oui, Vincent Peillon. Je ne dirais pas que c'était une révélation, mais il a été bon, dans la forme, supplantant souvent ses concurrents. En revanche, sur le fond, pas question pour moi de le suivre ! Il s'adresse aux militants et aux cadres socialistes, pas aux Français, c'est flagrant. Il flatte la base, tient le discours du Parti. Je crois bien qu'il est déjà dans le coup d'après. Il met la balle au centre, pour être sûr de la ramasser, quand la primaire et la présidentielle seront passées. "Ni gauche sectaire, ni gauche brutale" : à bon entendeur, salut ! Est-ce que ça marchera ? Je n'en sais rien, je ne crois pas. Peillon m'a également surpris par ses pointes de virulence contre le gouvernement, le président. A certains moments, il ménage la chèvre et le chou, à d'autres, il lâche les chiens.

Mais la vie politique est comme la vie : pas que grave et grise, ton sur ton. Elle révèle toujours une touche de couleur et de fantaisie, un moment de détente, où l'on s'amuse intérieurement, où l'on a envie de sourire. Un show man sort de sous la table, un type too much, borderline, dénote, détonne et étonne . A la primaire de la droite, c'était Jean-François Copé ; à celle de la gauche, c'est Jean-Luc Bennahmias. Son nom est autant difficile à écrire que son propos est difficile à suivre. Il s'embrouille et nous embrouille, a des trous de mémoire, mange certains mots, s'agite à son pupitre alors que tous les autres sont des statues cravatées, il semble perdu au milieu de ces Men in black.

Lorsque les journalistes citent son programme, il dit que ce n'est pas son programme. Il rit plus volontiers que les autres et nous fait rire. On se demande ce qu'il fait là, d'où il vient, ce qu'il représente, quoi il défend. Son visage est bizarre, à la fois tristounet et rieur. On dirait une tête de piaf ou de mouette. Il ressemble à André Bourvil et à Dany Boon. C'est un extraterrestre. A moins que ce ne soit les autres qui descendent de leur soucoupe volante. Car Jean-Luc Bennahmias est le plus humain d'entre tous : il se trompe, s'emporte, rigole, il est comme nous. Dans la vie, il est sûrement comme à la télévision, au naturel. Si je croyais à cette primaire, si j'y participais, allez savoir si je ne voterais pas pour lui ... Bon, la suite dimanche prochain.

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