lundi 23 janvier 2017

Les leçons du premier tour



J'ai la faiblesse de croire que la politique obéit à des lois, quasiment physiques, qui se confirment à chaque scrutin. Le premier tour de la primaire du PS et de ses partenaires vérifie quelques règles simples :

1- Rester soi-même. Le lieu commun consiste à penser que l'homme politique joue un rôle, qu'il lui faut composer, qu'on ne gagne que dans la duplicité. Non, c'est au contraire le naturel qui prime. Le grand perdant de la primaire, c'est Arnaud Montebourg, parce qu'il n'a pas été lui-même. Voulant rassembler et se présidentialiser, il a atténué sa flamboyance, qui faisait toute sa force et son charme. Du coup, la gauche du Parti est allé voir ailleurs, ne se reconnaissant plus en lui.

2- L'original est préféré à la copie. Dans ce scrutin, Manuel Valls représentait le socialisme réformiste, la social-démocratie, la gauche de gouvernement, le modernisme progressiste. Mais le candidat qui désormais incarne cette sensibilité est en dehors de la primaire et même du PS : c'est Emmanuel Macron. Beaucoup de ceux qui hier auraient pu voter Valls, comme moi, sont restés chez eux, parce qu'ils ont rejoint, depuis déjà longtemps, En Marche !

3- Savoir où on habite. On ne peut réussir en politique qu'en bénéficiant d'une identité forte, qui rend repérable le candidat. Le mauvais score de Vincent Peillon, qui était prévisible, confirme ce principe. Peillon a été absent pendant deux ans de la scène nationale. Il vient de partout et de nulle part, et il y retourne maintenant. Impossible de le classer dans les sensibilités qui constituent l'histoire du Parti. Lui-même a adopté une improbable position centrale, qui est un non lieu, suscitant diverses interprétations ou soupçons. Le pompon et la confirmation, c'est la non prise de position de Vincent Peillon hier soir, après les résultats. La responsabilité politique élémentaire, c'est de prendre parti, de faire des choix, d'indiquer une perspective, pas de s'abstenir.

4- Les idées prévalent. Pas mal de gens croient, à tort et hélas, que la politique est une question de tactique, de stratégie et de posture. Non, c'est d'abord une question d'idées. Benoît Hamon est arrivé le premier parce qu'il est apparu comme le seul à avoir des idées, à les imposer dans le débat. Et une véritable idée est une idée neuve. Quand vos concurrents se définissent par rapport à vous, c'est gagné. Et Hamon a gagné ! Valls a porté le bilan, Montebourg a défendu son made in France, qui n'est pas nouveau. Macron gagnera peut-être la présidentielle comme Hamon gagnera sans doute la primaire : parce que tous les deux ont des idées, qui sont nouvelles.

5- L'électeur est roi. Le préjugé veut que l'opinion soit influencée par les médias et par les sondages. Non, les citoyens sont maîtres de leur bulletin de vote. Hamon, possible candidat socialiste à la présidentielle, nul n'y aurait cru il y a quelques semaines, alors que nous n'en sommes plus très loin. Il est heureux que la démocratie atteste ainsi de cette liberté, que la République fonctionne à plein. Et quand les électeurs sont moins nombreux que prévus et surtout qu'espérés, comme hier, c'est pour eux une façon d'exprimer leur insatisfaction. C'est pourquoi tout scrutin, y compris celui d'hier, est toujours un grand moment pour qui aime la politique.

5 commentaires:

bil36 a dit…

quid des menton et des trucages dans cette pseudo élection ? On est passé de 1,9 millions d'électeurs à 1,4... de toutes façons les primaires 'ont pas de raison d'être en France, c'est une vision américaine de la démocratie. Vision justifiée car outre atlantique il n'y à pas de premier tour...

Anonyme a dit…

vous êtes opportuniste et vous suivez la mode: il y a quelques années c'était DSK en "pole position" et il explose en plein vol;pas de chance;cette fois Macron caracole dans les medias;bonne pioche pensez-vous :je peux être à nouveau visible avec -why not- la possibilité d'avoir un rôle politique( la députation si Macron est élu..humm ça doit vous titiller cette idée)
J'ai retrouvé ceci de Victor Hugo:" Monsieur T...c'est le petit homme à l'état complet:de l'esprit,de la finesse,de l'envie;de la supériorité par instants... quand il a réussi à se hisser sur quelque chose " .ça vous ressemble un peu ( je ne dévoile pas qui est Monsieur T..car vous n'en êtes pas là je le concède mais votre culture historique vous le fera trouver facilement)

Anonyme a dit…

Les primaires sont une vision moderne et très démocratique de la politique , une manière de sortir des appareils en mettant le débat sur la place publique très en amont de l'élection capitale ... Mais il y aura toujours des conservateurs ... Des inconditionnels de la confiscation , des pseudos initiés qui sont en réalité des sclérosés du système ....

Philippe a dit…

Les trucages deviennent trop communs en France au niveau des partis politiques quand ils organisent des scrutins.
Il n’y a aucune raison qu’un jour cela n’arrive pas lors d’élections officielles.

D. a dit…

D'accord avec bil36 : les primaires en France sont mal venues car elles lient les candidats qui s'y présentent à un parti ou un consortium de partis.
La Vème République à partir de l'élection au suffrage universel de son Président, se veut être la rencontre entre un homme, un citoyen (ou une femme, une citoyenne) et l'ensemble du corps électoral.
Passer par des primaires c'est dénaturer la fonction et rendre partisan un président qui devrait surpasser les partis, tous les partis.