vendredi 30 octobre 2015

F comme fasciste



Il y a quelques jours, le Courrier picard informait que le PCF préparait un "comité d'accueil", en vue du meeting de Marine Le Pen, demain à Saint-Quentin. Bravo ! Le site internet de L'Aisne nouvelle prévient aujourd'hui que le PCF "esquive", qu'il ne manifestera pas. Déception et incompréhension ! Les communistes ont pourtant toujours été en pointe dans la lutte contre l'extrême droite. Nos camarades succomberaient-ils, à leur tour, au conformisme ambiant, qui trouve désormais malséant et excessif de qualifier le FN de fasciste, ce qu'il est pourtant ?

Oh, je sais bien, les frontistes ont des têtes aimables, ne portent pas de chemises noires, ni ne brandissent de croix gammées. On en viendrait presque à se faire moquer de soi en les traitant de fascistes, et c'est ce qu'ils souhaitent. L'accusation est cependant sérieuse et fondée. Elle n'a rien à voir avec les visages, les vêtements et les drapeaux, mais avec l'idéologie : celle du FN est une variante contemporaine et adaptée du fascisme, elle partage avec lui 6 caractéristiques :

1- L'autoritarisme : éloge de l'ordre, appel à la force, culte du chef.

2- Le nationalisme : obsession identitaire, réduction des problèmes, notamment sociaux, à ce thème.

3- La xénophobie : les immigrés comme cause principale de nos maux, leur refus ou leur renvoi.

4- Le populisme : tous les fascismes se réclament du peuple et ont été des phénomènes de masse.

5- La radicalité : tous les fascismes singent la révolution et font des propositions extrêmes. Ce sont des projets de rupture avec la République. Exemple : le FN, comme tous les fascismes, prône la discrimination légale envers une partie de la population. C'est ce que son programme appelle, dans un doux euphémisme, la "préférence nationale" : à l'embauche et pour les prestations sociales, les immigrés deviendraient des citoyens de seconde zone, en contradiction avec le principe d'égalité au fondement de la République.

6- La récupération : tous les fascismes se sont emparés des concepts de l'adversaire, afin de les vider de leur substance et de séduire les électeurs. Le FN pratique de même aujourd'hui : il se prétend ni de droite ni de gauche, alors qu'il est d'extrême droite ! (lire l'ouvrage de l'historien Zeev Sternhell "Ni droite, ni gauche", comme se définissaient les premiers fascistes). Les nazis se voulaient "socialistes", de même que le FN se veut "républicain" et "laïque", n'étant en réalité ni l'un , ni l'autre.

Je le répète : ces 6 points, partagés par le Front national, sont communs à l'ensemble des fascismes. Cette diversité en même temps que cette identité ne doivent pas nous étonner : à gauche aussi, les sensibilités sont multiples et les points communs très forts. D'ailleurs, Marine Le Pen et sa nièce sont plus proches du fascisme que Jean-Marie Le Pen, dont l'ultra-libéralisme et le catholicisme intégriste l'en éloignaient un peu. Les authentiques fascistes ont toujours été critiques à l'égard de l'extrême droite traditionnelle et de son folklore. Lisez ou relisez Rebatet, dont on vient de rééditer ces jours-ci "Les Décombres", et vous verrez comment un écrivain fasciste peut se montrer très virulent avec l'extrême droite de son époque.

Ne nous laissons donc pas impressionner par ceux qui sourient : oui, le FN est un danger pour la République, parce que sa nature idéologique profonde est fasciste. Oui, il nous faut individuellement manifester, demain, à 17h00, place de l'Hôtel-de-Ville, individuellement puisqu'aucune organisation n'a appelé à le faire collectivement. Nous éviterons ainsi que la réprobation légitime et démocratique ne s'exprime dans la violence, comme il s'est passé hier soir, la permanence locale du FN ayant été vandalisée. Les républicains n'agissent pas ainsi : ils sont pacifiques et respectueux des lois.

9 commentaires:

Anonyme a dit…

Le fasciste est en chacun d'entre nous.
Je peux donner des exemples documentés dans l'histoire de la France d'après 1945 mais vous ne les publierez pas.
Les briques hier dans la permanence de votre ennemie étaient sans doute une gentillesse.
Vouqs allez d'ailleurs censurer ce commentaire

Anonyme a dit…

Votre plaidoyer se comprend parfaitement cependant manifester "contre" ça n'a pas le même sens ni la même valeur que manifester "pour"...
De même organiser une contre-manifestation ce n'est pas la même chose qu'organiser une manifestation.
Le droit à manifester est à préserver et à utiliser sans réserve.
Je suis sceptique sur les résultats des contre-manifestations surtout lorsque manifestation et contre-manifestation se résument comme au théâtre classique à une unité de temps et unité de lieu.

bil36 a dit…

Question : une politique d'austérité imposées par une commission européenne non élue est elle synonyme de démocratie ou de fascisme ?

Un président représentant 17% d'avis favorables (et encore les chiffres sont ils vrais ?) est il la meilleure vitrine pour parler de démocratie ? Ne faut il pas plutôt dire que nous sommes déjà dans un Etat fasciste ?

Emmanuel Mousset a dit…

1- Non, aucune trace de fasciste en moi, et chez la majorité des Français.

2- Je manifeste autant "pour" que "contre", les deux étant indissociables : contre le FN, pour la République.

3- La Commission européenne est mandatée par des gouvernements élus. Votre argument revient à dire que nous ne serions pas en démocratie en France, puisque les ministres ne sont pas désignés par la population. Argument absurde !
Quant à l'impopularité du président, c'est vous qui êtes bien peu démocrate, en contestant la durée de son mandat, sur la foi des sondages.



Erwan Blesbois a dit…

De plus : de plus en plus d'artistes reconnus en France sont d'origine musulmane, je pense que la création de demain viendra principalement des milieux immigrés, je le pense depuis 1993.
Les attentats peuvent être vus déjà comme une certaine forme de création, un engagement en tout cas qui aura des conséquences, car cela interroge avant tout la communauté musulmane, d'où le livre "2084", qui est une critique par un musulman du danger de totalitarisme islamiste.
La matrice de notre époque est le premier conflit mondial, tout le reste s'enchaîne inexorablement et explique le nihilisme européen contemporain et la catatonie intellectuelle de nos compatriotes "de souche", tétanisés par une culpabilité post coloniale. L'affirmation de soi est devenue impossible à un européen normalement constitué, nous arrivons au terme d'une civilisation dû à l'atrophie de nos facultés épuisées par les conséquences des deux guerres mondiales. Il est logique qu'au final nous soyons "remplacés".
La seule affirmation de soi se fait par le biais de la compétition économique, il n'y a plus de valeurs communes, il n'y a plus de modèle moral à faire valoir, l'Europe a abdiqué sa vocation messianique, et veut laisser sa place à d'autres. Le vrai curseur de ce phénomène est que les femmes européennes font beaucoup moins d'enfants, même quand on les y incite, il n'y a plus de projet de société. La civilisation européenne est vouée à se disloquer, car elle est épuisée. Certains comme toi peut-être sont passés entre les gouttes du désenchantement généralisé, mais tu demeures une exception. Ce que tu appelles fascisme n'est rien de plus qu'une réaction à ce phénomène de remplacement ; une réaction simpliste, démagogique, égoïste et basée sur le repli sur soi, mais aller jusqu'à la qualifier de fasciste, je pense que c'est un contresens.

Emmanuel Mousset a dit…

Les attentats comme forme de création ??? Tu as sans doute voulu dire : forme de destruction ...

Quant à l'égoïsme comme moteur du FN, c'est une interprétation morale. La mienne est politique. Ce n'est pas uniquement l'égoïsme qui conduit au nationalisme et à la xénophobie.

Erwan Blesbois a dit…

La violence est la forme la plus archaïque de la création, car "au commencement était la haine", c'est un invariable de la nature humaine, tout le reste, critique par les musulmans de leur propre violence ou repli sur soi du FN, sont des réactions, des conséquences de ce processus premier de création archaïque, reptilienne. Il n'y a qu'à lire l'ancien testament pour voir que la matrice de ce premier monothéisme est la violence et l'exclusivisme, pourquoi le reprocherait-on à leurs héritiers que furent les chrétiens puis les musulmans ? Le nazisme n'est plus le bon logiciel pour comprendre la réalité de notre époque, cette réalité il faut aller la rechercher plus loin désormais, dans la genèse des religions monothéistes, puisque les musulmans qui n'ont pas nos scrupules de vieux peuple fatigué, nous y obligent.

Anonyme a dit…

L'auteur du 1er commentaire que je suis partage complètement la pensée de Erwan.
Le cerveau reptilien est en nous.
La violence est la forme la plus archaïque de la création.
Le fasciste est en chacun d'entre nous.
ou encore dit encore autrement
"L'assassin est en chacun d'entre nous" ...
Mais ce n'est par une réalité que l'on peut sans risque claironner sur la place publique tant elle est choquante et brutale à entendre pour la plupart des êtres.
L'Etre se rebelle intérieurement ... moi Monsieur ... impossible ... aucune trace d'assassin en moi ...
et illico il tourne son aggressivité vers celui qui OSE !

Emmanuel Mousset a dit…

Je vous laisse, Erwan et vous, entre reptiles.