mercredi 14 octobre 2015

Les risques du métier



Deux faits politiques ont marqué hier les esprits et suscité de nombreux commentaires : un ouvrier cégétiste a refusé de serrer la main du président de la République, une militante du Front de gauche a lancé un pot de yaourt sur le ministre de l'Economie. Les graves analyses n'ont pas alors tardé : ces deux gestes quelque peu rebelles ne seraient-ils pas les signes annonciateurs d'une révolte beaucoup plus large, plus profonde contre le pouvoir en place ? N'assistons-nous pas, à travers ces deux marques d'irrespect, à une dégradation de l'image de nos dirigeants ?

Je suis moins inquiet que nos commentateurs. D'abord, dans ce genre de situation, face à ce type d'incidents, j'aime bien réveiller un peu ma mémoire. Me souvenir par exemple que le grand De Gaulle, le Général en personne, avait subi pareil affront des mains qui se ferment, en visitant, au début des années 60, l'Ecole Normale Supérieure. Le Général n'en est pas mort et sa grandeur n'en a pas été affectée. Il est vrai qu'à l'époque il n'y avait pas BFMTV.

Plus près de nous, François Hollande, durant la campagne présidentielle de 2012, avait reçu pire qu'un yaourt (d'ailleurs mal projeté puisque Emmanuel Macron n'a même pas été taché) : de la farine sur la tête ! Qui s'en souvient ? Ca ne l'a pas empêché de devenir chef d'Etat ... François Mitterrand racontait avoir subir ce genre de rebuffades et de désagréments, qui pouvaient aller jusqu'aux crachats. La main du quidam qui se refuse à la main du souverain, Nicolas Sarkozy l'a aussi vécue, au Salon de l'Agriculture, provoquant chez lui la réplique qu'on sait.

Ces péripéties n'ont pas à nous faire cogiter. Ce ne sont que les risques du métier, auxquels tout homme public est confronté, dont aucun sens particulier n'est à déduire. Et puis, la notoriété attire les dingues et excite les excités. Je suis même surpris que nos hommes politiques ne soient pas plus confrontés à ce genre de rencontres malheureuses, dans notre époque d'hypermédiatisation. Se faire insulter ou agresser, pour un politique, c'est une sorte d'hommage involontaire à la fonction et à la personne, qui prouvent ainsi ler importance. La plus grave offense, c'est de laisser indifférent, ne provoquer personne, n'être même pas reconnu quand on passe dans la rue.

Nous sommes en République : il est légitime de s'opposer à François Hollande et à Emmanuel Macron. Mais pas besoin pour cela de refuser de saluer ou de balancer un projectile. Au contraire, ces comportements sont des aveux de faiblesse et ne font pas du tout progresser la cause qu'ils sont censés défendre. Voilà surtout pourquoi je les condamne : pas à cause de leur impolitesse (dont je me moque), pas à cause de leur violence (toute relative). Même un affreux du Front national, je prendrais sa main tendue. Pour lui écraser les doigts, bien entendu.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Pas d'accord ! Tout citoyen se devrait de saluer le Président censé représenter tous les Français en effet c'est un geste élémentaire de politesse. Ce manquement est un signe de désaccord profond voire total avec la politique que mène le Président et son gouvernement

Emmanuel Mousset a dit…

Votre commentaire est embrouillé : d'un côté, vous condamnez l'impolitesse, de l'autre, vous semblez approuver le geste politique de désaccord. Alors ?