mardi 24 février 2015

Tournay à poing levé



J'avais envie de rencontrer Olivier Tournay pour deux raisons : d'abord parce que le jeune conseiller municipal est candidat communiste aux élections départementales dans le canton de Saint-Quentin nord, seul et unique candidat de gauche, en l'absence du PS, ce qui est un cas exceptionnel (dans la quasi majorité des cantons de France, il y a un candidat présenté ou soutenu par le parti socialiste). Et puis, ce canton nord n'est pas comme un autre : j'y tiens, je l'ai longtemps appelé "mon" canton, puisque j'y étais candidat socialiste en 2004. Deux bonnes raisons pour en discuter avec Olivier.

J'ai commencé par l'interroger sur son appartenance au PCF, dont il critique souvent la stratégie. En fait, il reproche au Front de gauche (dont le PCF est membre) de rassembler des groupuscules dans une visée purement électoraliste et inefficace, au détriment du parti communiste, de son identité historique. Quant à Jean-Luc Mélenchon, ce n'est pas sa tasse de thé ni son verre de rouge : quelqu'un qui a été plus de 30 ans au PS et ministre d'un gouvernement social-démocrate, comment peut-on lui faire confiance, quand on se veut au contraire, comme Olivier, révolutionnaire ? Impossible.

Je pousse le bouchon un peu plus loin : le parti communiste est-il encore communiste ? "Sa base, oui, mais certains de ses dirigeants, pas assez", me répond Olivier, calme, prudent et assuré. Je le traite gentiment de stalinien (sur le mode interrogatif). Il ne se laisse pas démonter : "je n'ai connu ni Staline, ni sa mère. On est tous le stalinien de quelqu'un. Ca ne veut rien dire. En revanche, la lutte des classes, la révolution, j'y crois". Olivier ne se sent bien que le poing levé. Son mot préféré ? "Communiste", son identité, sa fierté. Avec la faucille et le marteau, on ne transige pas. Ne lui parlez pas de Syriza, la gauche radicale grecque, très à la mode en ce moment, sauf chez lui et ses camarades de section : "ce sera très vite un Pasok bis" [le Pasok, c'est le PS de là-bas]. Rejet de l'électoralisme, fidélité et cohérence politiques : Olivier soutient le KKE, le parti communiste grec.

Nous revenons aux élections départementales, à sa candidature. Je suis curieux de savoir ce qu'il pense du retrait volontaire des socialistes, après des décennies de présence dans le canton nord : "c'est un manque de courage politique. Quand on a des convictions, il faut les assumer, quitte à se ramasser. Il est nécessaire pour un parti d'être présent". Je fais remarquer à Olivier Tournay que cette étonnante défection est aussi un joli cadeau électoral, puisqu'il va pouvoir capter l'électorat socialiste, renforcer ainsi son rôle d'opposant au sein du conseil municipal. Mais non, il reste imperturbable, inflexible, ne cherche pas à tirer profit de la situation : "je ne vais pas me rosir pour repêcher quelques voix. La ligne ne change pas. La meilleure stratégie, c'est de rester soi-même". Croit-il en sa victoire ? "Electoralement, tout est possible".

Le parti socialiste avait proposé une alliance : pourquoi l'avoir refusé ? "Nous sommes contre la politique de Hollande, nous ne pouvons pas nous allier avec le PS". Mais, à Saint-Quentin, c'est l'aile gauche du PS, frondeuse, dont Olivier Tournay a été partenaire durant le précédent mandat municipal ? "La situation était différente, c'était sous Sarkozy ; aujourd'hui, l'aile gauche du PS soutient globalement le gouvernement". Avec Olivier, les raisonnements sont imparables. Pense-t-il que le PS est en voie de disparition localement ? "On n'en est pas encore là, mais les militants sont au PCF et à l'UMP".

Je veux en savoir plus sur son rôle d'opposant municipal. Son travail s'est démultiplié, la tâche est parfois fastidieuse, comme la récente préparation du débat sur les orientations budgétaires. Mais ce rôle lui plaît. Il a 37 ans : est-il là pour longtemps, sachant que l'action politique ne se construit que dans la durée ? "Oui, dans 10 ans, je serai certainement encore là". Rêve-t-il de devenir un nouveau Daniel Le Meur [l'ancien maire communiste de la grande époque] ? "Non, je veux rester moi-même. Mais c'est ma famille. Je n'ai pas de nostalgie, mais beaucoup d'estime, et Daniel Le Meur reste une référence. Un ouvrier qui se retrouve député à 32 ans, c'est quand même marquant !" Tous les deux se contactent d'ailleurs régulièrement.

En bon socialiste que je suis, je ne peux m'empêcher d'avoir un doute sur la volonté d'Olivier Tournay à exercer vraiment des responsabilités, à rechercher le pouvoir. Manifestement, je me trompe. Il m'assure que sa candidature n'est pas un simple témoignage, que ses camarades et lui veulent entrer dans les institutions pour exercer une influence, infléchir les politiques en cours. Mais sans se compromettre, sans rien céder à l'électoralisme.

En le quittant, je suis plus social-démocrate que jamais, autant que lui est communiste révolutionnaire. Mais si j'étais électeur dans le canton nord, je voterais Olivier Tournay : parce qu'il est le seul candidat de gauche, parce qu'il faut faire barrage à l'extrême droite, parce qu'il faut bien choisir, quand son propre parti n'est pas là.

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Électrice du canton Nord et sympathisante socialiste, je ne voterai pas pour Olivier Tournay car je n'adhère pas à ses convictions ; même si celui-ci est sincère ! j'ai encore un mois pour réfléchir à ce que je vais faire

Anonyme a dit…

Point de vue d'un non militant
Contredisons donc un peu le langage aseptisé actuel propre aux militants.
Peut-on être militant au sein d'un parti politique sans renoncer à sa liberté de conscience ?
Chaque parti réinvente souvent l'histoire de ses racines.
Je suis "né à la politique" vers 1955 en manifestant contre la torture en Algérie.
Devinez la coloration partisane des gouvernements de l'époque ?
Le FN n'existait pas, les socialistes oui sous la forme "section française de l’internationale ouvrière" (SFIO) qui cautionnait et même légiférait sur le sujet : interrogatoires poussés ou musclés, traduire tortures, viols, corvées de bois (disparitions)
Tous les partis politiques ont un coin qui sent très mauvais le reste est de l'intox !
Cependant comme tout citoyen je vote y compris bien sûr pour le Parti Socialiste ….. avec nombre de réserves implicites à chaque fois.
Je ne serai jamais militant car les âmes des partis, s'ils en avaient une, seraient grises et certainement pas ni blanches ni noires. Voir systématiquement du blanc ou du noir est un comportement de militant.

Anonyme a dit…

Sympathisant socialiste, j'irai voter pour Olivier Tournay. M'abstenir non merci. UMP et FN : impensable !

Anonyme a dit…

Voter TOURNAY , c'est comme voter pour BABEUF !! Genre politique qui surfe sur les vagues de l'étang d'ISLES avec la brise du matin ... En pensant aux tempêtes de jadis vers la place DU COLONEL FABIEN!

Anonyme a dit…

Pas de socialiste dans ce canton ? Tant mieux, on ne nous bassinera pas avec le vote utile. Je voterai Tournay et ca me va très bien. Ne serait-ce que pour la cumularde sénatrice Gruny ne soit pas élue.

Anonyme a dit…

Sérieux, bosseur, jeune, dynamique, qui sait bousculer comme il se doit Xavier Bertrand. Je voterai donc bien entendu pour Olivier Tournay du PCF, comme le suggère l'auteur de ce blog.

Anonyme a dit…

La gauche doit gagner11 secteurs pour garder l Aisne à gauche. Alors il faut élire olivier tournay jeune militant courageux et sincère. Vive la GAUHE