mardi 10 septembre 2013

Pourquoi je ne manifeste pas



Ni grève, ni manifestation pour moi aujourd'hui. Pourtant, j'ai usé quand il le fallait, dans ma vie de salarié, de ce droit constitutionnel. Pourquoi pas aujourd'hui ? Levons une ambiguïté : ce n'est pas parce que le gouvernement est socialiste et que je suis socialiste, car j'ai déjà protesté contre un pouvoir de gauche, par exemple à l'époque du très contesté Claude Allègre. Mais il n'y a pas automaticité. En l'espèce, je soutiens la nouvelle réforme des retraites.

Sur ce blog, en commentaire du billet du 28 août, Marie me reprochait d'avoir manifesté avec elle il y a trois ans contre la réforme Fillon et d'applaudir aujourd'hui à la réforme Hollande-Ayrault, y voyant une contradiction. Je veux lui montrer que non. Certes, Marie est libre d'être hostile aux deux réformes, comme je suis libre d'en contester une et d'approuver l'autre. Quant à manifester ensemble, on peut fort bien le faire pour des raisons différentes, et surtout pour des solutions différentes : ça n'empêche pas les convergences ponctuelles. N'allons donc pas voir des contradictions là où il n'y en a pas.

Je vous livre mes sept raisons de ne pas manifester ce jour, libre à vous de les partager ou pas :

1- Marie aurait souhaité qu'on abroge la loi Fillon sur les retraites. Le mot d'ordre d'abrogation est chéri par l'extrême gauche et la gauche radicale. Ce n'est pas, sauf exception, dans la culture du réformisme, qui ne cherche pas tant à abroger ce que d'autres ont fait qu'à proposer des réformes nouvelles. La table rase n'est pas dans les gènes de la social-démocratie.

2- Si la réforme Fillon et la réforme Ayrault, c'était la même chose, Fillon, l'UMP et les patrons le diraient, s'en réjouiraient. Non seulement ils ne le font pas, mais ils rejettent violemment l'actuelle réforme.

3- Marie tient à la retraite à 60 ans, instaurée il y a 30 ans par la gauche. Moi aussi, j'y tiens, mais c'était il y a 30 ans, et le monde a bougé depuis. Les 60 ans, c'est l'honneur de François Hollande de les avoir rétablis, dès son arrivée à la présidence, pour ceux qui ont commencé très tôt à travailler. Mais pour tous, sans distinction, et avec une retraite à taux plein, non, ce n'est pas possible, et ce n'est pas forcément juste, quand on sait les disparités entre les métiers.

4- Ce qui me conduit à saluer cette innovation absolue dans la réforme des retraites : la prise en compte de la pénibilité. Car c'est vraiment l'esprit du système qu'il faut changer : considérer uniformément toutes les conditions de travail, se retrancher derrière la légalité de l'âge de départ, ce n'est plus une approche pertinente, tant les situations professionnelles se sont différenciées.

5- Le fond de la réforme, ne l'oublions pas, c'est d'assurer le financement et donc la pérennité du système par répartition, sans toucher au montant des pensions. La réforme Fillon ne le garantissait pas. Hollande et Ayrault ont eu le courage politique de s'attaquer au problème et de faire un choix en en écartant un autre : relever légèrement les cotisations sociales, ne pas augmenter les impôts (la CSG). J'applaudis à ce choix.

6- Quant à l'allongement de la durée de cotisation, qui sera modulé selon la pénibilité des métiers, on peut toujours, si l'on veut, le regretter dans l'abstrait. Mais concrètement, il ne me scandalise pas : on vit plus vieux, on peut travailler un peu plus longtemps. Le drame social, ce n'est pas de travailler, c'est de ne pas avoir de travail ni assez d'argent pour vivre.

7- Il y a trois ans, contre la réforme Fillon, le front syndical était uni. Pas aujourd'hui : les syndicats réformistes soutiennent la réforme, les syndicats contestataires manifestent contre elle. Ca change beaucoup de choses. Chaque point de vue est légitime. Il n'y a que les mentalités staliniennes qui raisonnent en traîtres et en héros.

Je ne cherche pas ici à convaincre Marie, ni personne d'autre. Ce blog n'est pas une officine de propagande. Je donne simplement mon avis, je l'offre à la discussion, je publie les commentaires sincères et honnêtes, dépourvus de toute malveillance personnelle, trop peu nombreux à mon goût. Mais c'est aussi le signe de notre époque et la dérive du net.

2 commentaires:

Aurélien a dit…

etes vous vraiment sur qu'on vit plus longtemps ?

que dit l'INSEE ?
http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATnon02229

Anonyme a dit…

On répète à l'envi cette phrase "on vit plus vieux" sans se poser la question "est-ce que l'on vit plus vieux en bonne santé".
Or les derniéres études montrent que la durée de vie en bonne santé tend à stagner et même à régresser dans les pays européens.
Essayons de ne pas être trop manipulés quand même.