dimanche 22 septembre 2013

Le rêve de Béziers



Béziers, sa feria, son rugby, ses vins. Depuis quelques jours, je suis Biterrois, mais toujours à Saint-Quentin. Ce qui m'intéresse, ce qui me passionne dans cette lointaine ville de l'Hérault, ce n'est pas son soleil dominical, ce sont ses élections municipales. Chez nous, pour le moment, ça ne s'échauffe pas trop, mais ça viendra, c'est certain. Là-bas, c'est parti, non à cause de l'esprit méridional, mais parce que la gauche dans cette ville a choisi de mettre en place des primaires citoyennes, comme je le souhaitais pour Saint-Quentin.

Pourquoi se préoccuper plus de Béziers que d'une autre ? Parce que la cité est proche de la nôtre : la taille est comparable à Saint-Quentin, le nombre d'habitants pas très éloigné, et une droite comme chez nous au pouvoir depuis 18 ans. Béziers, c'est le destin que je rêvais pour Saint-Quentin : une consultation préalable à l'élection afin de se donner le meilleur candidat possible et surtout de créer longtemps à l'avance une dynamique. Comme le rêve ne s'est pas réalisé ici, je suis très attentif à sa concrétisation là-bas.

La gauche a quatre candidats, dont un Vert. Le choix des primaires a été décidé par référendum, auprès des adhérents, qui ont dit oui aux deux tiers. La procédure est mise en place et contrôlée par la fédération. Trois débats publics sont programmés entre les candidats, avec une charte qui interdit les polémiques et pose les bases du rassemblement. La première rencontre a eu lieu il y a quelques jours, elle a réuni une centaine de personnes. Le rêve, je vous dis ! En tout cas, un bel exemple de lucidité et de maturité politiques.

La victoire aux municipales, à Béziers ou à Saint-Quentin, il faut y croire, non de la foi du charbonnier, mais par une volonté éclairée par la raison. Qu'est-ce qui permettra de l'emporter ? Non pas les qualités des personnes, dont j'ai souvent dit qu'en politique leur rôle était secondaire (mais pas non plus nul). Ce qui comptera, c'est la dynamique qui aura été enclenchée, collective évidemment. Le sort d'une élection est l'aboutissement d'une dynamique ... ou de son absence. A Saint-Quentin, je voulais une dynamique à chaud, comme le moteur d'une voiture qu'on fait tourner avant de démarrer : ne pas désigner le candidat dans le cercle restreint des adhérents, mais mobiliser nos sympathisants et électeurs dans ce tour de chauffe que sont les primaires citoyennes. Je n'ai pas été suivi (on ne peut pas tout obtenir : il est déjà bien que la rupture avec l'extrême gauche ait été actée).

Du coup, la dynamique doit être lancée, mais à froid. C'est plus difficile, il y faut plus de temps, mais c'est jouable. Certes, je ne suis plus qualifié pour participer à la course, après trois échecs consécutifs (candidature à la cantonale nord, élection du secrétaire de section et surtout désignation de la tête de liste). Prétendre à une place ou à des responsabilités serait indigne : quand on est battu, on ne la ramène pas. Mais il ne m'est pas interdit de réfléchir et de donner mon opinion. C'est ce que je veux faire à propos de la dynamique à susciter pour avoir une chance de gagner. En cercle restreint, je n'ai aucune chance d'être écouté, le rapport de force jouant totalement contre moi. En revanche, de l'extérieur, dans ma zone d'influence, je peux faire bouger les lignes, on l'a vu sur la question des alliances. D'emblée, je vois trois conditions requises en faveur d'une dynamique :

1- L'espace internet : je ne vais pas expliquer ce que vous savez, l'indispensable présence dans les réseaux sociaux pour désormais remporter une victoire, surtout quand on est dans l'opposition et qu'on n'a pas énormément de canaux pour toucher l'opinion. Pour le moment, la présence sur le net est à construire. Deux sites existent, mais qui sont à réactiver : le blog d'Anne Ferreira, qui en tant que vice-présidente du Conseil régional de Picardie reste l'élue de référence ; il lui faut reprendre le travail qu'elle a interrompu il y a plus d'un an. Le blog de la section de Saint-Quentin, qui n'est plus complété depuis cinq mois, qui n'informe même pas de la désignation de Michel Garand comme candidat des socialistes aux élections municipales (l'oubli de taille laisse songeur : paresse ordinaire ou acte manqué ?).

2- L'affichage médiatique : si l'activité militante classique est bien sûr toujours utile, la communication est indispensable. Elle passe par la présence régulière dans les journaux, à travers des conférences de presse, des communiqués ou d'événements qu'on aura su créer. Il faut que notre candidat, qui ne bénéficie pas des acquis d'un élu, installe son image dans l'opinion. Autant dire que face à Xavier Bertrand, qui a en la matière au moins vingt ans d'avance, il y a du boulot. Mais le défi est stimulant, pas décourageant, et nul ne peut présupposer de l'issue.

3- Si les réseaux sociaux et les campagnes de communication sont précieux, ce qui emportera la décision, ce qui fera basculer l'opinion dans notre camp, ce sera encore autre chose, ce sera notre force de propositions. La dynamique, nous le savons bien, ne sera pas nationale. Quels que soient les résultats de la politique de François Hollande (et je suis persuadé qu'ils seront bons), des élections intermédiaires ne sont jamais gagnées par le pouvoir en place ; elles servent plutôt de défouloir, de moyen de protestation pour les partis d'opposition. Si dynamique il doit y avoir, elle sera exclusivement locale, à partir des propositions de la gauche, pour répondre aux problèmes et aux attentes des Saint-Quentinois.

Les sujets ne manquent pas, les interrogations sont nombreuses, les revendications se font entendre, qu'il revient au parti socialiste de capter, de synthétiser, de transformer en propositions qui constitueront un projet. Mais pour cela, il ne faut pas attendre, il faut s'y prendre dès maintenant, intervenir à chaque difficulté, dire immédiatement ce qu'on propose. Il suffit d'écouter les gens, de lire la presse : les occasions de prendre la parole ne manquent pas. Je crois que c'est possible, j'ai confiance, mais il ne faut pas laisser passer le temps, qui ne se rattrapera pas.

La dynamique se manifestera par des petits signes, qui seront ceux de l'espoir, qui n'existent pas encore pour le moment. Pour preuve, j'en veux cet article paru samedi dans le Courrier picard, intitulé : Les élections municipales décideront du sort des deux ombres du maire. Bonne idée que de s'interroger sur ce que deviendront après mars les très influentes directrice et chef de cabinet du maire, Frédérique Macarez et Christelle Chabanne. Mais le journal se met dans la perspective d'une nouvelle victoire de la droite, en se demandant si Xavier Bertrand ne va pas renouveler son proche entourage. Jamais l'hypothèse d'une victoire de la gauche n'est envisagée, même allusivement.

C'est révélateur d'un état d'esprit, que nous connaissons bien depuis 18 ans à Saint-Quentin, qui donne la droite très largement gagnante, quasiment hégémonique. Il revient à la gauche de faire mentir cette appréhension naturelle et de devenir aux yeux des Saint-Quentinois une alternance crédible. Les primaires citoyennes auraient pu inaugurer cette évolution. Ca ne s'est pas fait, ne ratons donc pas la prochaine étape. Pour que mon rêve de Béziers devienne enfin un rêve de Saint-Quentin.

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