mardi 23 mai 2017

Le retour de Balligand



Le socialiste Jean-Pierre Balligand, député, maire et président du conseil général de l'Aisne, a quitté la vie politique il y a quelques années. Il a su de pas s'accrocher, partir au bon moment, passer le relais à d'autres. C'est suffisamment rare pour ne pas être salué. En même temps, il a laissé derrière lui un vide. Balligand est un analyste de la vie politique qui nous manque. Il a l'intelligence des situations, sans laquelle on ne peut pas bâtir une action militante. Le voilà de retour, hier, dans L'Aisne Nouvelle, pour un bref entretien, plein de pertinence.

Balligand commente d'abord l'échec historique du Parti socialiste : "Sa première erreur a été de ne pas reconstruire un corps doctrinal. Le Parti a fait comme si rien ne s'était passé". Oui, c'est bien là le drame : quand on ne change pas, c'est la vie qui nous change, à notre détriment. C'est ce qui arrive hélas au PS, qui aura bien du mal à se remettre de sa défaite. L'échec n'est pas gravissime en politique, mais l'aveuglement condamne. Je ne crois pas que les socialistes avaient les moyens intellectuels ni l'audace morale de se transformer.

Pourtant, Balligand trace un avenir au PS : "Il devra être l'aiguillon de la majorité présidentielle". C'est ce que j'espère aussi, mais je crains le repli : quand la bête est blessée, elle ne cherche pas à comprendre, elle se défend et retourne dans son trou. Déjà, on voit bien que le Parti socialiste est dans l'opposition à Macron, ne lui laisse aucune chance de réussite. C'est une erreur. Mais comment faire autrement quand un appareil politique joue sa survie ?

Sur Macron, Balligand porte ce jugement sûr, que trop peu d'observateurs ont : "Avant d'être énarque, n'oublions pas que Macron est philosophe. Chez lui, la question du sens est fondamentale. Il sait où il va". En effet, je crois de plus en plus qu'un individu, en politique, se juge non à ses intentions mais à sa formation, qui explique beaucoup de chose. Une formation, c'est comme une éducation : elle structure un esprit. C'est la clé pour le comprendre.

Jean-Pierre Balligand termine par une intuition que j'ai eue, dès le soir de la victoire de Macron, mais que je n'ai jamais osé livrer, de peur de paraître présomptueux : "Il est plus de Gaulle que Mitterrand. Il est dans l'autorité. Je le vois à l'Elysée pour dix ans". Exactement ! Parce que les réformes de structures dont notre pays a besoin nécessitent cette durée. Parce que je sens que Macron est de la race des Obama et Merkel : son énergie le portera loin, jusqu'à un deuxième mandat. C'est en tout cas ce que je lui souhaite. Et à Jean-Pierre Balligand de nous revenir avec ses salutaires analyses.

8 commentaires:

Philippe a dit…

Ne pas confondre
-être prof de philo (Mousset, Onfray et des milliers d’autres )
-être étudiant en philosophie (Macron et des milliers d’autres)
-être philosophe c’est à dire créateur de concepts philosophique en général créés pour répondre aux questions que se posent les sociétés du moment (Epicure, Spinoza, Deleuze et une poignée d’autres)

Emmanuel Mousset a dit…

Prof, étudiant ou maître, c'est secondaire dans mon billet : les trois ont une commune formation, un air de famille. C'est ce qui m'intéresse ici.

Philippe a dit…

La différence est de nature qualitative dans le domaine concerné "la philosophie" bien entendu ... ce n'est pas un jugement moral sur les êtres.
Le philosophe est un créateur (comme peut l'être un peintre) génial éventuellement moralement infect ou respectable par ailleurs.
Le mot respect vous emmerde ce qui me fait bicher !

Emmanuel Mousset a dit…

C'est le mot préféré des mafieux et des voyous. C'est pourquoi je ne l'aime pas.

Philippe a dit…

E.Mousset dit "C'est le mot préféré des mafieux et des voyous. C'est pourquoi je ne l'aime pas."
C'est l'un des trois principes philosophiquement fondateurs de la franc-maçonnerie et rappelés à chacune de leurs réunions sans exception.
Ces principes sont :
-Liberté absolue de conscience
-respect de soi-même et des autres
-tolérance mutuelle
Personnellement je les trouve justes et parfaits ... et exigeants...

MF a dit…

respect? oui de quoi? et puis mettons-nous d'accord sur cette notion de "respect" et là je suis d'accord avec E.Mousset :à force de l'employer à toutes les sauces on ne sait plus ce que cela veut dire
-doit-on "respecter" toute idéologie?( HItler, Staline..Pol Pot..etc)
- doit-on "respecter" l'idée que la "race blanche" est supérieure aux autres?..sachant qu'on s'évertue à faire confondre-facilement et on comprend pourquoi- race et ethnie ou religion..
-et il en est de même pour "tolérance"
bref on se noie dans la sémantique plutot que de se confronter au fond

D C a dit…

"bref on se noie dans la sémantique plutot que de se confronter au fond" ?
Bref, c'est quoi pour vous, chère MF (je présume votre féminité, si ce n'est pas le cas, toutes mes excuses les plus plates), le fond en la circonstance, à part défendre Emmanuel Mousset ?

Philippe a dit…

@ MF
27 mai 2017 à 16:37
Ces principes ne sont pas des éléments de langage bisounours
-Liberté absolu de conscience
- respect de soi-même et des autres
Communiquer avec les autres nécessitent le respect de soi-même et des autres.
On peut très bien ne pas communiquer, on est d’ailleurs absolument pas obligé de communiquer avec tout le monde.
-tolérance mutuelle
Il s’agit non pas de « tolérance » (tout court) mais de « tolérance mutuelle ». On est absolument pas obligé d’être tolérant avec un intolérant.
Il s’agit d’une formulation philosophique ternaire dans laquelle un principe ne vit pas pas sans les autres.