samedi 20 décembre 2014

Psychologie du traître



Le traître est une figure de la vie politique, comme le mari cocu est une figure du théâtre de boulevard ou l'assassin une figure du roman policier. Ainsi, Isabelle Ittelet, conseillère général du canton de Sains-Richaumont, appartenant au groupe socialiste, vient de le quitter. On a le droit bien sûr d'évoluer. Le traître a d'ailleurs une formule toute faite pour se justifier : "il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis". Bref, quand vous êtes fidèle, discipliné et cohérent comme il faut l'être en politique, le traître vous taxe d'idiot ! L'intelligence est donc de son côté. Je dirais plutôt : l'habileté, la malignité, la ruse.

Trêve de plaisanterie, un désaccord n'est pas une trahison. Certes, Isabelle Ittelet argue de son malaise à l'égard du gouvernement actuel. Mais pourquoi ? François Hollande n'a pas changé de politique, que je sache ? Il a même accentué celle qu'il a promise et qu'il applique depuis le début de son mandat. Alors quoi ? L'impopularité du gouvernement, oui, c'est sans doute ce qui fait réfléchir Isabelle Ittelet, ce qui la rend prudente, circonspecte et inquiète pour sa réélection en mars prochain.

Son canton a été redécoupé et se trouve désormais associé à celui de Marle, où siège le président du Conseil général, Yves Daudigny. Celui-ci lui a ouvert les portes de son binôme, puisque les candidats doivent être deux, un homme et une femme. Mais la femme en question manifestement ne veut pas, préfère un mariage plus sûr. Elle a tort : en matière de politique, il ne faut pas se laisser aller à des spéculations hasardeuses, il ne faut suivre que ses convictions. Mais en a-t-elle ? Et quelles sont-elles ? Isabelle Ittelet a choisi de se présenter, aux dernières élections cantonales, comme suppléante de Michel Lefèvre, membre du parti socialiste, disparu dans un accident de voiture en 2012. Quand on fait ce choix, c'est qu'on est sympathisante socialiste, du moins femme de gauche.

Pourtant, aux récentes élections municipales, Ittelet s'était présentée, au nom de l'UDI, contre le maire socialiste de Sains-Richaumont. Un bon traître peut être un mauvais perdant : sitôt battue, elle a contesté en justice le résultat, jusqu'à s'adresser au Conseil d'Etat ! La trahison n'est jamais le produit d'une réaction brutale. Elle s'installe en douceur, comme le serpent se love dans le nid de l'oiseau. Mardi dernier, la trahison était consommée : Isabelle Ittelet s'abstenait lors du vote du budget, alors qu'elle a pleinement participé à la politique qui a présidé à l'élaboration de ce budget. C'est qu'elle doit lancer un signe d'amitié à ses nouveaux copains de l'UDI, qui eux aussi se sont abstenus. Quand on trahit les uns, on doit prouver qu'on ne va pas trahir les autres.

La psychologie du traître n'est pas dénuée de ressort comique. Dans la lettre qu'elle a envoyée à Yves Daudigny en octobre 2014, Isabelle Ittelet pousse un cri, la main sur le coeur : "en aucun cas, je ne peux te trahir, ainsi que les personnes avec qui j'ai travaillé" (lu par le président du Conseil général lors de la séance de mardi dernier). "Trahir", c'est elle qui prononce le mot, qui l'écrit de son encre, comme certains signent avec leur propre sang un pacte avec le Diable. Freud, plus rationnellement, appellerait ça un lapsus, un acte manqué. Le traître jure toujours, devant Dieu, sur la tête de sa mère et à ses camarades de parti, qu'il ne trahira jamais. C'est pourquoi on ne peut avoir confiance en personne quand on fait de la politique, même pas en ses proches, ses amis, ses fidèles. C'est triste.

On croit souvent que le traître est un méchant. Mais non : il se donne souvent des allures de vertueux. Commentant sa missive à Ives Daudigny, Isabelle Ittelet a déclaré d'emblée (rapporté par L'Union du 04 décembre) : "avec beaucoup de courage, j'ai adressé un courrier au président du Conseil général". Oui, vous avez bien lu : "avec beaucoup de courage". C'est qu'il en faut, du "courage", pour trahir. Ce n'est pas à la portée de n'importe qui. L'explication ? "Pour que je sois en phase avec moi-même". Sans doute veut-elle parler de ses supposés intérêts, qui la conduiraient à rejoindre la droite centriste, après avoir collaboré avec la gauche socialiste ?

La touche finale du traître, c'est sa paradoxale faculté d'indignation : "je suis écoeurée", lâche maintenant la conseillère générale. Et nous donc ! Isabelle Ittelet, de métier, travaille pour le Conseil général, aux cuisines. Il faut croire qu'elle est poursuivie par l'odeur de la gamelle. Mes camarades socialistes ne sont pas complètement innocents dans cette affaire : ils devraient veiller à prendre des personnes fiables, même dans les suppléances. Une leçon à méditer ces jours-ci, où nous choisissons nos candidats aux élections départementales.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Cher Monsieur MOUSSET courroucé, le terme de gamelle en cette année du centenaire rappelle la précarité des tranchées ... Franchement le self de H.M est loin de cette image .... et ceux des collèges sans doute aussi....
Disons que cette conseillère a perdu la tête sous les voutes historiques du conseil général de LAON .. Je sais certain esprit ( sans s ) proclame que le conseil général est quantité négligeable et que même élu , ça ne sert à RIEN de siéger , c'est vrai on n'y discute que de petits budgets comparés aux sommes incommensurables de certaines campagnes électorales et là aussi on y a perdu la tête et sans doute bientôt TOUT le RESTE ...
Seraient ils TOUS devenus FOUS dés les premiers pas en politique ...
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Anonyme a dit…

La blessure est profonde et s'est finalement projetée sur tout le conseil général ... Et ses services ...

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Sains-Richaumont : le maire Jean-Pierre Viéville sort de sa réserve

Publié le 22/12/2014

Par L'Aisne Nouvelle

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2014 aura été une année difficile pour la commune avec comme point central, les élections municipales et la tentative d’annulation par la liste adversaire jusqu’au plus haut sommet del’Etat.

Suite à la décision du Conseil d’Etat de ne pas annuler les élections municipales, le maire Jean-Pierre Viéville vient d’adresser un courrier à chacun des habitants. « Le tribunal ne s’est pas laissé tromper par des accusations sans fondement, par des attestations farfelues. Madame Ittelet n’a pas compris le message des urnes ? La Justice le lui a rappelé, et par deux fois ! J’attends maintenant que Madame Ittelet reconnaisse, comme elle aurait dû le faire depuis longtemps, qu’elle a perdu les élections municipales. Elle doit livrer ce message pour clarifier les choses et lever toute ambiguïté. Elle le doit au Conseil municipal, aux électrices et aux électeurs et l’ensemble de la population municipale et même cantonale. »

Pour le maire , cette tentative d’annulation des élections a blessé tout un village, « En jouant la carte de l’ambition à tout prix et en engageant des procédures à tout va, Madame Ittelet et « ses amis » ont occasionné bien des blessures. Pour moi et ceux qui m’entourent mais pas seulement. C’est à titre personnel et non aux frais de la commune que j’ai dû engager plus de 13 000 € auprès d’un avocat pour assurer la défense de mon équipe et de moi-même. Quel bel exemple pour celles et ceux qui démarrent dans un Conseil municipal ! Sans parler de la perte financière, 2014 aura été une année quasi blanche en réalisation communale. Puisqu’il fallait se défendre d’accusations fantaisistes, de déclarations grandiloquentes sur un QG ou sur Internet (jamais de vive voix devant un public qui aurait pu être interrogatif – courageuse mais pas téméraire, dirait-on) ou d’attestations calomnieuses, les projets ont peu avancé. Il a fallu faire face au plus pressant mais le cœur n’y était pas. Les dégâts sont visibles aujourd’hui au sein même de notre bourg. Le climat semble tendu et l’image de Sains-Richaumont est ternie. «

Jean-Pierre Viéville se dit être un homme profondément meurtri mais se dit près à tourner la page, « , profitant de la nouvelle année qui arrive. Nous formulons le vœu que le climat s’apaise, que l’opposition soit force de proposition, que nous rassemblions nos idées, que nous les portions tous ensemble. L’heure est au rassemblement et à la fin des querelles partisanes et du climat délétère qu’elles engendrent. »
SOURCE : AISNE NOUVELLE >>
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