mercredi 18 mai 2016
Tous victimes, même les flics
La manifestation des policiers pour dénoncer la "haine anti-flic" (sic) exprime un hallucinant retournement de situation : ceux qui sont chargés de défendre les victimes estiment être à leur tour des victimes ! A qui alors se fier ? Mais cette revendication est dans l'air du temps : chaque catégorie, chaque citoyen ressentent le besoin de se présenter en victimes de quelque chose ou de quelqu'un. La lutte syndicale traditionnelle a été remplacée par une psychologisation de la protestation. Dans le cas de la police, c'est inquiétant : les forces de l'ordre trahissent ainsi une grande faiblesse, qui n'incite guère à leur faire confiance. Les flics de la vieille école n'auraient pas cédé au sentimentalisme actuel.
Telle est notre société : les enseignants veulent être aimés par leurs élèves, les politiques veulent être aimés par les électeurs, les flics veulent être à leur tour aimés par ceux qu'ils sont chargés de réprimer. Dans les trois situations, c'est rigoureusement impossible, et ce n'est pas souhaitable. Car se faire aimer n'est pas un objectif professionnel, ni pour les profs, ni pour les élus, ni pour les flics.
Y a-t-il au moins des éléments objectifs qui justifient cette dénonciation de la "haine anti-flic" ? Aucun, absolument aucun ! Les casseurs ? J'ai beaucoup fréquenté les manifs parisiennes dans les années 70 et 80, je peux vous certifier que les casseurs étaient déjà là, aussi nombreux (sinon plus), autant violents (sinon plus). Le feu mis à une voiture de police ? J'ai vu pire, venant des autonomes en furie ! Je condamne évidemment ces actes débiles, mais je m'étonne que cette violence nous étonne : elle a toujours existé, c'est le métier de la police que d'y remédier. Un flic qui se plaint de la "haine" de l'ultragauche, c'est comme un prof qui se plaint de la résistance des cancres : les risques du métier sont faits pour être assumés et solutionnés, pas pour qu'on s'en indigne.
Nous vivons une drôle d'époque : nos concitoyens font des bises aux flics, même le chanteur anarchiste Renaud, alors que les policiers ne font que leur métier, et n'ont pas à être spécialement remerciés pour cela. La CGT produit une affiche anti-flic particulièrement scandaleuse, outrancière, tapageuse, "gauchiste", non conforme à sa longue tradition. Et aujourd'hui, ce sont ces mêmes flics qui demandent le respect, alors que le rejet du gendarme est une tradition ancienne, chez Brassens et bien d'autres. Nous allons d'un excès à un autre, dans une société qui fonctionne à l'émotion et qui se fragilise considérablement. Il y a de quoi s'en inquiéter un peu et d'en sourire beaucoup.
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4 commentaires:
Je ne suis pas d'accord avec vous: le travail des flics dans une manifestation, ce n'est pas de servir de cibles vivantes à quelques dizaines de sales cons d'extrême-gauche, mais de protéger à la fois les manifestants et le reste de la cité en cas de débordement. Je comprends tout à fait leur colère: actuellement, l'absence d'ordres clairs venant du gouvernement les met en danger inutilement (alors qu'une manifestation illégale n'est pas difficile à disperser), et les casseurs sont plus nombreux qu'à votre époque si je puis me permettre. En effet de nos jours chaque manif dégénère, autrefois c'était relativement rare. Les policiers mettent leur vie en péril, en partie pour protéger les honnêtes citoyens. Nous leur devons le respect, c'est un minimum, comme à tout fonctionnaire qui travaille pour la collectivité.
Quant aux casseurs, il faudrait s' en occuper radicalement pour régler le problème... mais évidemment, notre "regime" est incompatible avec une telle sévérité.
Il y a quelque chose d'assez difficile à comprendre.
En état d'urgence, certaines libertés sont suspendues.
Pourquoi celle de manifester reste t-elle autorisée ?
Sinon que ces désordres seraient utiles à quelqu'un ou quelques uns ?
Hors état d'urgence, les manifestations étant autorisées, qui doit assurer l'ordre ?
Les forces de l'ordre.
Qui doit en assumer les frais ?
Les organisateurs des manifestations.
Les manifestations sportives qui nécessitent des forces de maintien de l'ordre ou de prévention du désordre doivent payer les frais.
Pourquoi serait-ce différent pour les manifestations d'ordre politique ?
Les organisateurs qui manifestent doivent faire coordonner les dispositions de maintien de l'ordre avec les responsables policiers et militaires de service.
Ma réalité matérielle Erwan, c'est celle d'un fils de profs qui se prépare à entrer dans une grande école d'ingenieurs. Désolé, je ne suis pas un salaud de riche, mais il est clair que je suis un adepte du liberalisme.
Quant à vous, je vous soupçonne d'être un frustré jaloux de ceux qui ont réussi mieux que vous (et qui donc gagnent plus). Vous avez un rapport vicié avec l'argent mon vieux. Et avec la Science aussi. Cela commence à faire beaucoup.
Une dernière chose Erwan: j'apprécie peu vos attaques personnelles, même si elle est la marque de votre entêtement irrationnel dans une idéologie dépassée. Bah oui, "si on n'est pas d'accord avec vous, c'est qu'on est un sale bourgeois"... c'est navrant comme argumentation.
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