jeudi 26 mai 2016

On ne lâche rien



Nouvelle journée d'actions contre la loi travail. Où est-ce qu'on va comme ça ? La CGT semble prise de folie, le mouvement dégénère. Affiches anti-flics consternantes, blocage des raffineries, menace sur les centrales nucléaires, coupures d'électricité, arrêt des moyens de transport ... En marge, il y a les violences des casseurs, les coups de feu contre des permanences socialistes, les mises à sac. Le pompon, c'est cette censure de la presse d'aujourd'hui : seule L'Humanité est dans les kiosques, parce que les autres journaux ont refusé de faire paraître, sous la force, un communiqué de la CGT.

Si ce n'était grotesque, presque risible, je pourrais m'en inquiéter, en matière de liberté d'expression et de démocratie. Et si j'étais cynique, je ne pourrais que me frotter les mains, laisser faire, trouver que cette dérive a du bon : les adversaires du gouvernement se discréditent eux-mêmes, le temps sera vite venu d'une opinion se retournant contre la contestation, excédée par ses dérapages multiples. D'autant que le ressort du mouvement n'est pas social, mais politique. Le hic, non dissimulé, c'est la priorité aux accords d'entreprise, qui remet en cause le pouvoir de l'appareil central de la CGT.

Quelques députés PS ont médiatisé une tentative de conciliation, de relecture du texte, d'amendement possible. C'est gentil, mais c'est complètement illusoire. On ne peut pas négocier avec des gens qui ne veulent pas négocier. Les syndicats radicalisés (ont-ils jamais cessé de l'être, depuis toujours ?) n'ont qu'un mot à la bouche, dès le début, avant même que le conflit ne commence : RETRAIT. On ne peut rien faire avec ça. A moins que le pouvoir politique abdique, renonce à ce qu'il est, à sa politique : ce serait dramatique. On a le droit d'être contre la loi travail, on n'a pas le droit de remettre en cause les institutions. Négocier, en bon syndicalisme, c'est discuter autour d'un texte que propose le pouvoir politique, légitimement élu : alors, on est pour, on est contre ou on choisit de l'amender. Mais ce n'est pas se retrouver autour d'une table en partant de rien, en parlant de n'importe quoi, chacun apportant ses propres revendications pour aller forcément nulle part.

Quant à ceux qui prétendent que le gouvernement serait bon à faire tomber, parce qu'il ne respecte pas ses engagements, parce que le mandat que lui a accordé l'électorat serait désormais nul et non avenu, ceux-là sont des factieux, des séditieux, doublés de menteurs et de manipulateurs. Leur référence au discours du Bourget se résume à une phrase, le célèbre "mon-ennemi-c-est-la-finance", au détriment de tout le reste, qui attestait d'une ligne sans ambiguïté social-démocrate, mise en application dès le début du quinquennat, à laquelle François Hollande a été fidèle, n'a jamais dérogé, dont la loi travail n'est que le prolongement (d'ailleurs, ses adversaires les plus résolus le savent et le disent). C'est donc un faux et facile procès en promesses non tenues qu'on fait au président de la République, procès typiquement stalinien.

Dans cette crise, car crise il y a, le comportement de Manuel Valls est exemplaire : respecter les engagements et les institutions, ne pas céder à la violence, n'avoir en tête que la défense des chômeurs et des précaires, puisque la loi travail leur est essentiellement destinée. La politique du gouvernement commence à porter ses fruits, les chiffres d'hier du chômage l'attestent, et d'autres indicateurs retournent au vert. Non, il ne faut rien lâcher, surtout pas maintenant.

Cette crise n'est sûrement pas un drame. Je crois même qu'elle a du bon. D'abord, le débat se passe tout entier à gauche. La droite n'a plus rien à dire, sinon suivre ou en rajouter. Et à l'intérieur de la gauche, la grande clarification se fait, le Premier ministre en est l'intransigeant initiateur, avec raison. Remarquez bien, ces derniers jours, à quel point les frondeurs se taisent. Ils savent qu'ils ne peuvent plus aller trop loin. Soit ils sortent du bois et ils sont morts, soit ils rentrent dans le rang pour garder leurs places. En politique, il ne faut jamais rien lâcher, pour que ce soit les autres qui lâchent.

11 commentaires:

Philippe a dit…

et pendant ce temps ... la chienlit continue à Calais ... de plus en plus dangereuse ..
aucune arrestation ! sans rire !
ici :
http://www.lavoixdunord.fr/region/migrants-de-calais-une-quarantaine-de-blesses-dans-des-ia33b48581n3531223
notre blogueur préféré veut-il habiter Calais ?

Anonyme a dit…

Et heureusement que Monsieur le Président n'a jamais dit être un héritier de Jaurès ou de Blum... Ah mince, si. S'il est un héritier de Jaurès, alors dans ce cas, je suis un héritier de Pol Pot.
Laurent

L a dit…

"Soit ils sortent du bois et ils sont morts, soit ils rentrent dans le rang pour garder leurs places. En politique, il ne faut jamais rien lâcher, pour que ce soit les autres qui lâchent."

Vous auriez pu dire : ils sont du bois mort.

Mais cela, c'est ce qu'au fond de vous-même, vous souhaitez !
Car on comprend bien que ce qui vous fait le plus peur, c'est l'éclatement du PS.

Eh bien, il va éclater, votre PS.

Les mous resteront avec vous et les durs quitteront ce rafiot qui ballote dans la tempête que les chefs du PS ont eux-mêmes amorcée.

On ne leur demandait rien et voilà qu'ils nous sortent ce projet de loi El Khomri !

Comme ça commence à tanguer, le navigateur en chef tire au canon de 49-3.

Oui, il y a des députés qui ont peur de perdre leur siège.

Il y en a aussi qui ne voudront pas perdre leur âme.

Martinez et Mailly auront eu raison de cette imposture : quand on veut réformer à un tel niveau les lois sur le travail, on fait les annonces circonstanciées lors des campagnes électorales, ce que le président sortant, bientôt le président sorti s'il persiste à se représenter, n'a pas fait en 2011 / 2012.

Emmanuel Mousset a dit…

Oh, vous savez, l'éclatement du PS, on en parle depuis que le PS existe. Je vous laisse donc vous éclater avec ça.

Philippe a dit…

Le PS et les autres dont le FN ne vont pas éclater mais s'affaisser ce qui est totalement différent ! un monde nouveau est en vue ... oui mais lequel ?

Philippe a dit…

Revenons au sujet :

Aux Pays-Bas ils ont passé les mêmes lois sans problème en conservant une subordination entre « branches » et « entreprises », plus anglo-saxons ils ont le sens de la négociation.
Les belges plus proches de nous psychologiquement se bagarrent dans la rue !
Tout cela d'ailleurs prouve que c'est une décision du Conseil des Ministres de l'UE et non du seul gouvernement français !

Emmanuel Mousset a dit…

Je me réjouis que l'Europe éclairée inspire le gouvernement français.

Philippe a dit…

d'accord mais hélas pas suffisamment nos zélites croient pouvoir diriger au coup de menton ...

Philippe a dit…

"Je me réjouis que l'Europe éclairée inspire le gouvernement français."
Mais alors quittons l'hypocrisie et publions les actes des Conseils européens qui sont incessants et donnons l'origine communautaire des propositions de lois
Encore l'une des causes de l'affaissement des partis : l'hypocrisie ... des zélites politiques professionnelles

Emmanuel Mousset a dit…

A toute élite, il faut un menton, comme à tout prof, il faut un bâton. Ou alors il faut prôner l'égalitarisme.

Philippe a dit…

"A toute élite, il faut un menton, comme à tout prof, il faut un bâton. Ou alors il faut prôner l'égalitarisme."
le curseur est en train de se déplacer vers la droite "dure"