jeudi 6 novembre 2014

Toi, président



Ce soir, comme beaucoup de Français, je serai devant mon poste de télévision, pour regarder et écouter François Hollande. Qu'est-ce que j'attends du président de la République ? Personnellement, rien du tout. La politique est chez moi un objet de passion, pas une question d'intérêt. Je ne comprends d'ailleurs pas ceux qui attendent quelque chose de n'importe quel pouvoir (je dis bien : personnellement). Dans la vie, en général, il ne faut rien attendre des autres, mais beaucoup de soi-même (ce qui n'est pas facile, j'en conviens). Attendre quoi que ce soit d'un gouvernement, c'est fou, c'est impossible : la politique change la société, défend l'intérêt général, oeuvre pour la France, mais ne modifie pas notre vie individuelle. Tant mieux, sinon l'Etat serait totalitaire.

Est-ce que je regarderai ce soir François Hollande pour qu'il m'explique sa politique ? Non, je n'ai pas besoin, et aucun citoyen normalement intelligent et honnête n'a besoin d'explication supplémentaire. La politique que mène le pouvoir est claire ; un enfant la comprendrait. C'est une ligne social-démocrate, qui s'efforce de réduire les déficits publics et de faire reculer le chômage, tout en préservant notre système social. Voilà, c'est dit, en une phrase : pas besoin de deux heures d'émission pour ça. Bien sûr, on peut être contre cette politique, nous sommes en démocratie.

On peut penser, par exemple, qu'une politique de la demande serait meilleure que l'actuelle politique de l'offre (c'est ce que pense une partie de la gauche, et une petite partie du PS). On peut aussi penser qu'une politique d'austérité, plus draconienne, plus libérale, serait plus efficace (une bonne partie de la droite le souhaite). On peut même penser qu'il faut foutre les immigrés à la porte, fermer les frontières et quitter l'Europe (ça, c'est le programme de l'extrême droite). Mais Hollande a sa politique bien à lui, et elle me convient, parce que je suis social-démocrate, comme lui. Tout ça est su, connu, exposé, rabâché et n'a donc pas besoin de l'être plus.

Est-ce que, ce soir, je serai devant mon téléviseur dans l'attente d'annonces nouvelles ? Toujours pas ! Les mesures nouvelles, les effets d'annonce, c'était du temps de Sarkozy, sans cesse sur la brèche. Avec Hollande, c'est plus raisonnable, constant, solide : la ligne est tracée, le cap est tenu, les réformes sont bonnes, il faut simplement veiller à leur application, pas besoin d'en rajouter. "Rien de nouveau sous le soleil", disaient les sages de l'Antiquité : en effet, pas besoin de nouveauté, le soleil nous suffit (c'est le chef de l'Etat, bien sûr).

Mais alors, pourquoi serai-je tout à l'heure assis devant ma télé, si je n'attends rien de François Hollande, si je n'ai pas besoin qu'il m'explique sa politique et si je ne souhaite pas apprendre des mesures nouvelles ? Eh bien, ce sera d'abord pour me reposer de la journée sur mon canapé, me changer les idées et grignoter des cacahuètes. Ensuite et surtout, je serai là, présent, attentif et fidèle, tout simplement parce que j'aime François Hollande, sa politique, son gouvernement, et que je leur dois bien ça : être présent. Tout ça parce que je suis socialiste, ce qui n'est pas fréquent par les temps qui courent. A l'intérieur même du parti, il y a une frange de renégats et d'opportunistes, et la grande marée des tièdes, qui attendent de voir comment l'avenir va se présenter pour savoir de quel côté tomber (du bon, si possible).

A Saint-Amand, ce week-end, sur le marché, un ami m'a présenté à d'autres en disant de moi : "c'est un socialiste, un vrai". Je ne suis pas un sensible, mais j'ai été touché par ce qualificatif : oui, c'est bien ça, "un socialiste, un vrai", alors que tant d'autres sont des moitiés de socialiste ou des socialistes d'opérette. "Un socialiste, un vrai", c'est celui qui est à 100% derrière le gouvernement, qui lui donne raison même quand il a tort (en politique, on ne fait pas dans le détail ou dans la dentelle). "Un socialiste, un vrai", c'est celui qui sera ce soir devant TF1 à 20h30, sans rien attendre, sans rien vouloir, sans rien espérer. C'est moi.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Très clair et enthousiaste , mais alors pourquoi HOLLANDE n'a pas de résultats , dans la vie c'est bien le résultat qui compte et qui montre l' efficacité de la gouvernance ... Expliquez vous , nous restons quoi devant votre catéchisme d'intégriste bétonné !!

Anonyme a dit…

Seriez vous devenu ce que on appelle communément un illuminé !!

Anonyme a dit…

LE PARI de MOUSSET :

La foi du charbonnier, nous dit le Petit Robert, c’est la croyance naïve de l’homme simple. Mais il ne faut pas confondre totale confiance avec naïveté, pas plus qu’il ne faut identifier la foi idéale avec un savoir intellectuel. La foi du charbonnier est celle qui ne prête pas attention aux questions posées à la foi, celle qui réduit son intelligence au silence. En fait, que nous soyons « hommes simples », ou « intellectuels », nous sommes tous invités à une foi vraie et non pas naïve, c’est-à-dire une foi qui est une véritable démarche de liberté et pas une solution simpliste.

Dans son encyclique Foi et raison, le Pape Jean-Paul II, parle de fidéisme, que nous pouvons traduire par foi du charbonnier. Le fidéisme serait alors cette démarche qui exclut la raison dans le travail de la foi. Au concile Vatican I (1861-1870), l’Eglise catholique a affirmé que Dieu pouvait être atteint par la raison. Autrement dit, la foi n’est pas irrationnelle, même si elle va plus loin que la raison. Pour le dire autrement, être croyant ne nous oblige pas à « penser idiot ». La foi ne peut déshonorer l’intelligence. Entre la naïveté religieuse et l’idolâtrie de la raison humaine, il y a place pour une démarche raisonnable qui respecte et l’homme et Dieu. Il faut élargir la raison et non pas la supprimer. La foi n’est pas seulement une intuition, un acte dans le vide. Il y a des repères pour l’intelligence.
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Emmanuel Mousset a dit…

1- Intégriste, non. Mais vous avez raison de parler des résultats : je les attends, je les espère, j'y crois.

2- Illuminé, non. Enthousiaste, fidèle, passionné, cohérent, militant, oui.

3- Non, je ne suis pas un socialiste de foi, mais de tradition et de raison. Et je ne considère pas Hollande comme un dieu.

Anonyme a dit…

Résumons nous ; un militant qui attend des résultats ; mais traditionaliste avec tout ce que cela implique ... Et si les résultats ne viennent pas ...