mardi 4 novembre 2014

Scène de marché



Saint-Amand-Montrond, 10 646 habitants, sous-préfecture du Cher, ancienne province du Berry, région Centre, ma ville natale, politiquement de droite, depuis ma naissance (mais je n'y suis pour rien). Son maire actuel, Thierry Vinçon (UMP), m'avait envoyé un petit mot gentil en début d'année, à la suite d'un billet consacré à la politique locale (il y a même des gens de droite qui sont gentils avec moi). Je n'avais pas répondu, par négligence coupable. Samedi dernier, je suis allé sur le marché, où était annoncé un spectacle de magiciens. Je n'ai pas vu de magiciens, mais vous savez qui ? Lui, bien sûr, monsieur le maire, qui d'ailleurs m'avait repéré avant que je ne le vois (il a l'oeil politique).

C'est un monsieur : il est grand, a été sous-préfet, chargé de mission à la Défense Nationale, conseiller d'un ministre des Anciens Combattants, et il parle chinois ! Mais au milieu du marché, c'est monsieur tout-le-monde, sympa, abordable. Un bon en politique, c'est sûr : pendant notre courte conversation, il a été sans cesse interpellé. Un mauvais, personne ne viendrait le voir. Une dame lui annonce qu'elle va se faire opérer, il la rassure en disant que c'est bénin. Une autre dame se plaint parce qu'il y a des herbes qui poussent sur le trottoir de la rue Jean-Valette ; il répond qu'il va s'en occuper (je suis allé voir juste après, c'est rien du tout, mais les gens sont vite mécontents pour n'importe quoi). Bref, Thierry a de la répartie (je l'appelle Thierry pas parce que c'est mon copain, mais parce que beaucoup de Saint-Amandois l'appellent comme ça ; de même, à Saint-Quentin, Xavier, pour Xavier Bertrand, ou bien XB ; mais à Saint-Amand, Thierry Vinçon n'a pas encore droit, il me semble, à TV).

Thierry Vinçon a aussi son franc-parler. Il n'est pas toujours là où on s'attend à le trouver, un peu comme chez nous Pierre André. En 2012, il a quitté l'UMP ; cette année, il a repris sa carte. Depuis quelques jours, il est en bisbille avec le patron départemental de l'UMP, Louis Cosyns, maire de Dun-sur-Auron, 30 km plus loin. Vinçon lui reproche son immobilisme, le chef dénonce en retour son opportunisme. Bref, une bagarre interne comme il y en a plein dans les partis. En revanche, il se dit en ville que le maire est très copain avec le député, Yann Galut, socialiste, qu'on voit souvent à la télévision, sur les chaînes d'information continue. En politique, les amis de mes amis ne sont pas forcément mes amis, et les adversaires de mes amis ne sont pas non plus forcément mes adversaires (non, ce n'est pas du chinois, c'est du vécu).

Samedi matin, sur le marché de Saint-Amand, il y avait aussi trois militants communistes qui distribuaient, à l'entrée de la grande halle : leur tract invitait à une réunion publique, qui a lieu ce soir. Les cocos sont increvables : la municipalité est de droite depuis les débuts de la Ve République, peut-être même avant, la gauche se ramasse râteau sur râteau, mais ils sont toujours là, ils ont le moral. Chez mes camarades socialistes, ce n'est pas trop la joie (je ne peux pas compter sur Saint-Amand pour me consoler de Saint-Quentin) : un élu PS, Clément Bernard, a rejoint la liste du MoDem avant les municipales, s'est fait élire puis a démissionné il y a quelques semaines. Belle conception de la démocratie ! Comme si, chez nous, Michel Garand, tête de liste socialiste, décidait de ne plus siéger, de ne pas respecter le mandat que lui ont confié les électeurs : c'est impensable, inimaginable.

J'ai terminé ma visite du marché par le bar "La Belle Epoque", qui affiche des photos en noir et blanc de gangsters américains, genre Al Capone (rien à voir avec la politique). Le premier adjoint au maire était assis, en grande discussion : le marché, le café, c'est du tout terrain pour les élus. Des communistes sont entrés, l'adjoint a salué l'un d'entre eux d'un familier "vieille canaille" : militants sans doute, mais Berrichons d'abord ! En quittant le marché, je n'avais toujours pas rencontré mes magiciens.

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