lundi 30 mai 2011

Les impôts à la bourre.

Comme tout le monde, je m'y suis pris au dernier moment pour remplir ce soir ma déclaration fiscale 2010 et la déposer, en main propre, au centre des impôts. "Déclaration préremplie simplifiée", disent-ils, ce qui tranche avec l'idée que je me faisais, enfant, du remplissage de la fameuse feuille. J'entendais se plaindre de la complexité de l'opération : le casse-tête n'était pas tant de payer ses impôts que de rédiger sa déclaration de revenus.

Je n'ai jamais très bien compris cette légende, qui vaut certainement pour les gens fortunés obligés d'informer chaque rubrique et de se justifier. Mais depuis que je suis en âge de travailler et de payer des impôts, le rituel ne me prend que quelques minutes, et même quelques secondes depuis que les sommes sont d'avance indiquées. Je ne connais pas de tâche administrative qui soit aussi rapide.

En revanche, je ne lis jamais la "notice pour vous aider à remplir votre déclaration de revenus", qui fait vingt pages et qui vient embrouiller les quatre pages très limpides de la déclaration. Ce livret explicatif, dense, fouillis, complique tout. Ne le lisez pas, sinon vous n'y comprendrez plus rien.

A part ça, je n'ai jamais vu je crois de ma vie mes impôts baisser, confirmant ainsi l'adage de bon sens : tout augmente. Je ne m'en plains pas, je suis bon républicain, certain que mon argent est bien utilisé au profit de l'intérêt général. Et puis, payer des impôts, c'est la preuve qu'on gagne quand même un peu, ce dont personne ne devrait se désoler.

Ceci dit, ce soir, j'ai eu tort de m'y prendre tard. Certes, se rendre à pied, vers 22h00, jusqu'au 51 boulevard Roosevelt, en longeant le parc des Champs Elysées, c'est une promenade à la fois agréable, digestive, sportive et civique. On rencontre d'aussi bons citoyens que soi, leur enveloppe kraft au précieux document à la main, avec parfois en laisse le chien. On se croise d'un oeil complice.

Sauf que cette fois-ci, mauvaise surprise devant les grosses boîtes censées recueillir par trois fentes le courrier : elles étaient complètement bourrées, les entrées quasiment obstruées. J'ai dû plier et forcer pour introduire ma feuille, j'ai poussé les autres, j'y suis arrivé. Mais un monsieur avec une enveloppe beaucoup plus épaisse (un riche sans doute) a dû renoncer et repartir.

Une mini-émeute s'est constituée devant le centre des impôts. Les commentaires allaient bon train : que faire ? Comment est-ce possible ? Ils n'ont donc rien prévu ? Attendre ? Revenir demain ? Mais quid de la date limite de minuit ? Un agent va peut-être venir vider ? Les français sont républicains légalistes mais la moindre colère peut les transformer en insurgés.

Le pire n'était pas tant de faire chou blanc que de prendre le risque de voir sa déclaration fiscale endommagée. Si un anarchiste mal intentionné (mais bien intentionné de son point de vue d'anarchiste) passait par là, il pouvait aisément subtiliser des enveloppes ou y mettre le feu. Heureusement, il y a quelques lambertistes à Saint-Quentin mais pas d'anarchistes.

Je suis reparti tranquillement, me disant que s'il arrivait quelque incident, je n'y serais pour rien et le dommage serait vite réparé. Pendant ce temps-là, les badauds affluaient, les automobiles aussi et je laissais l'insurrection grandissante à son destin.

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