mardi 29 avril 2014

Mon adversaire, c'est ...



Cet après-midi aura lieu à l'Assemblée nationale un vote fondamental pour l'avenir de la France, du gouvernement et du parti socialiste : confiance ou défiance envers le pacte de stabilité proposé par Manuel Valls, c'est-à-dire la confirmation et l'accentuation de la ligne économique social-démocrate, à laquelle toute une partie de la gauche n'est pas habituée. Aide massive aux entreprises, baisse massive des dépenses, politique de l'offre : c'est complètement nouveau pour des socialistes, mais c'est la politique choisie, il faut donc aller jusqu'au bout. Rien ne serait pire que des atermoiements, des demi-mesures, des aménagements qui altéreraient la cohérence générale de cette ligne économique, éloignée du socialisme traditionnel mais conforme aux choix de la social-démocratie européenne. Depuis dix ans, dans le parti, je défends une telle ligne ; mais tous mes camarades ne sont pas d'accord.

Le vote de cet après-midi est quasiment acquis mathématiquement. Mais politiquement ? 10 ou 20 socialistes qui s'abstiennent, pas de problème : ce sont les habituels électrons libres, les exceptions qui confirment la règle, la frange protestataire. En revanche, 40 ou 50 récalcitrants, ce serait embêtant pour le gouvernement, un signe de défiance à l'intérieur même de sa majorité. Jean-Christophe Cambadélis, le nouveau secrétaire du parti, a eu l'intelligence politique de faire se prononcer la direction nationale sur le pacte de stabilité hier soir : majorité absolue, le PS est donc en ordre de marche derrière le gouvernement, c'est clair.

Le vote d'aujourd'hui doit en finir avec le syndrome du Bourget, ce grand discours de campagne présidentielle où le candidat Hollande avait déclaré : "Mon adversaire, c'est la finance", une formule pour s'assurer les applaudissements, mais que les benêts et les malhonnêtes ont reprise à leur compte, pour dénoncer la soi-disant trahison du nouveau président. On sait ce qu'il en est des phrases sorties de leur contexte ! Au Bourget, le programme de François Hollande était celui d'aujourd'hui, identiquement social-démocrate.

Mais les malhonnêtes se focalisent sur une phrase et oublient tout le reste ; quant aux benêts, ils applaudissements à n'importe quoi. Car dire "Mon adversaire, c'est la finance" n'a strictement aucun sens, sauf à s'appeler Lénine, Mao ou Che Guevara. Je ne connais personne au parti socialiste qui porte ces noms-là. La finance fait partie de la vie et de l'économie : on ne peut pas s'en faire un adversaire, il est même plutôt recommandé de s'en faire une alliée, si on a l'intention de réussir quoi que ce soit au gouvernement. Ou alors, il faut s'exprimer en poète, car on peut aussi, dans sa tête, avoir pour adversaire l'eau de pluie, la gelée du matin et le vent d'hiver.

Ce qu'Hollande aurait pu dire, dû dire, ce qu'il a forcément pensé, puisque son projet l'attestait : mon adversaire, c'est la dette ! mon adversaire, c'est la désindustrialisation ! mon adversaire, c'est le manque de compétitivité ! mon adversaire, c'est le coût du travail ! mon adversaire, c'est le chômage de masse ! Mais "mon adversaire, c'est la finance", non. C'est pourtant une tournure rhétorique acceptable, mais rhétorique seulement, pas politique. Parce qu'à sa suite, il y a les benêts et les malhonnêtes qui n'en finissent plus de nous emmerder, et qui sont à leur façon, eux aussi, nos adversaires.

22 commentaires:

Anonyme a dit…

"Mon adversaire, c'est la finance", une formule pour s'assurer les applaudissements

Faux les applaudissement étaient acquis dans ce meeting , c est une formule choisie volontairement pour séduire les absents de cette rencontre, c est à dire les électeurs de gauche partis chez Melanchon ou au fn.

il a menti consciemment pour gagner des voix et ratisser large à gauche.

il n y a pas non plus que le temps de la campagne, on peu se sentir trahi pour ces années d'opposition ou le ps nous a affirmé que la politique d'aide aux entreprises était une erreur de la droite, on n'a pas oublié les critiques sur le cadeau fiscal de Sarkosy. on n'a pas oublié non plus le ps critiquant l'accueil de sarkosy réservé aux chinois et autres emirs, hors les pratiques sont restées les mêmes. l intérêt économique prime sur tout
Au niveau économique ou est le changement de politique promis par le ps ? je ne le perçois pas

je peut comprendre la politique gouvernementale actuelle mais on m en avait fait espérer une autre, le modem ou l udi seraient au pouvoir on aurait la même politique économique.
ce fameux changement de politique sur l Europe, la mondialisation, les fonds de pensions, la bourse, les délocalisations, les licenciements, n ont pas eu lieu , il a juste une continuité , le capitaine a changé, le bateau a été repeint mais le cap est le même.
la grande déception des Français il vous faut la comprendre, le candidat Hollande n'a jamais utilisé le mot de social démocratie dans ses discours de campagne, pourquoi ?

Anonyme a dit…

Mon adversaire c’est…
Ce matin, sur Europe 1, j’entendais le témoignage d’une retraitée qui expliquait sa vie avec 800 €. Un récit tout simple, sans animosité, sans rancœurs, exprimant un incroyable optimisme, valorisant tout ce qu’il peut y avoir de positif dans un quotidien difficile. Un récit poignant à entendre.
Alors je me disais : « Il faudrait un gouvernement de gauche !».

J’ai aussi repensé à des conversations récentes avec des proches expliquant leur mal être au travail. Pas leur salaire insuffisant, non, leur mal être dans des entreprises où l’adversaire est la masse salariale. Une masse salariale qu’il faut faire baisser. Où l’on « explique » aux plus anciens, qu’ils seraient bien inspirés de partir, leurs salaires étant plus élevés que ceux des plus jeunes. Et où, pour les « inspirer au départ » on alourdit les charges de travail, on joue avec la flexibilité, l’interchangeabilité des postes, où l’on annule des congés pourtant accordés, histoire de bien faire comprendre que l’individu ne compte pas…
Alors je me disais : « Il faudrait un gouvernement de gauche !».

Emmanuel Mousset a dit…

1- Si les Français étaient déçus et hostiles à la social-démocratie, ils ne soutiendraient pas majoritairement Valls.

2- "Il faudrait" : on ne fait pas de politique avec des "Il faudrait".

Anonyme a dit…

Ben voila on a le résultat, c'est 41 récalcitrants. C'est embêtant?

Emmanuel Mousset a dit…

Ca dépend pour qui : pour la droite, c'est réjouissant ; pour le PS, c'est embêtant.

Erwan Blesbois a dit…

Politique de l'offre pour qui ? Pour des Chinois et des émirs qui auront les moyens d'acheter nos "jouets", car pour les biens manufacturés il ne s'agit jamais que de jouets. Oh mais on sait bien que tu n'aimes pas la classe moyenne et que tu es l'ennemi d'une politique de la demande et de redistribution des richesses. Et on sait bien pourquoi, parce que tu es un enfant issu des classes populaires, et qui trouve enfin sa vengeance contre les classes moyennes qui t'ont oppressé enfant (et ta mère), à l'état adulte. Soit heureux mon ami, tu auras ta vengeance contre de Gaulle, les trente glorieuses. Mais tu n'as pas idée combien ta victoire sera amère.

Erwan Blesbois a dit…

Tu remarqueras que les gens hésitent encore à teconfier des responsabilités, ton côté fanatique intransigeant "inhumain" leur fait peur. Mais si la crise s'aggrave encore, ce qui ne saurait manquer d'arriver, alors je pense que tu finiras par les avoir. Mais n'oublie pas que c'est la crise et les inégalités qui produisent le fascisme. Et que c'est pour qu'une expérience aussi funeste que le fascisme ne se renouvelle pas, que le conseil national de la résistance et de Gaulle ont choisi de mener une politique égalitaire de la demande, qui ne devait éviter d'aboutir à la constitution d'une classe moyenne forte, moteur de l'économie, dont malheureusement tu es l'ennemi. L'histoire te donnera tort. On ne fait peut-être pas de bonne politique avec de bons sentiments, mais ni avec d'aussi mauvais sentiments. Cache mieux ton jeu, ton inconscient malheureusement a une odeur de cimetière.

Emmanuel Mousset a dit…

Mon cher Erwan, tu n'as pas besoin de t'inventer tout un roman de psychologue pour défendre tes chères classes moyennes. Tes excès vont devenir suspects à nos lecteurs. Tes vacances d'enseignant tournent mal. Il faut les occuper plus utilement.

Erwan Blesbois a dit…

Tu n'es pas obligé de publier tout ce que j'envoie.Si il y a des plaintes concernant mes excès, publie les. La vie est un songe, un rêve fait d'émotions. Il n'y a ni vérité ni justice ici bas. Vérité, justice sont du côté de la mort, des arrières mondes. Le plus gros défaut de la majorité des gens : ils ne laissent parler qu'une seule de leurs émotions : la haine. Plus on va en bas de la hiérarchie sociale plus en général il y a de la haine mal refoulée.

Emmanuel Mousset a dit…

Je publie tout ce qui est cohérent, même quand c'est discutable, surtout quand c'est discutable.

Erwan Blesbois a dit…

Nous payons aujourd'hui les conséquences de mai 68. Toute notre politique économique de sacrifice est un héritage de mai 68.
Bien sûr que j'aurais aimé faire mai 68, cette fête nietzschéenne,dionysiaque ; mais pour qu'une telle fête soit possible, il faut de la préparation.
Critique de mai 68 : c'est une fête qui a abîmé les enfants et qui continue de les abîmer. Mais critique de la critique, la critique se fait au nom de la morale.
Apologie de mai 68 : c'est une fête des sens, des émotions, qui rejette toute morale. Donc l'apologie de mai 68 est plus forte que sa critique, car la vie est plus forte que la morale. Oui mais la morale prépare la vie, oui et la vie prépare la mort. Et cette apologie se fait au prix de notre vie : car nous sommes un enfant de 68, abîmé par cette fête.

Erwan Blesbois a dit…

Poursuivez, quelles conséquences en tirez-vous ? Si j'étais conséquent avec moi-même, je devrais me suicider, car je n'ai pas su "tuer" mes parents, comme ils ont eu eux-même aucun scrupule à me tuer, au niveau des émotions j'entends. L'enfant est une entrave à la fête des sens et des émotions, l'enfant est anti-nietzschéen, car il exige la morale. Mais mai 68 est une fête bourgeoise ! Oui car les pauvres n'ont aucune imagination, il ne rêvent que d'un travail et d'un salaire. Mai 68 est une fête anti -enfants, anti-pauvres, anti-faibles. Une fête pour les forts qui prépare à la mort, une fête nietzschéenne quoi ! Nietzsche ne peut se laisser à une telle caricature. Nietzsche non, mais l'interprétation que mai 68 a fait de ses écrits. Nietzsche lui-même n'a-t-il pas dit qu'il n'y a pas de faits mais que des interprétations.

Emmanuel Mousset a dit…

Bref, ton adversaire, ce n'est pas la finance, c'est Mai 68 ! Demande-toi plutôt, au lieu d'accabler un événement, si ton adversaire, depuis toujours, ce n'est pas toi-même ... Et là, nous serions dans une saine réflexion morale, qui rappelle les responsabilités de chacun.

Erwan Blesbois a dit…

Tu ne m'accordes donc aucune circonstance atténuante? C'est assez valorisant, mais comment dois-je l'interpréter?

Erwan Blesbois a dit…

Le corps est plus fort que la raison.

Emmanuel Mousset a dit…

"Que peut un corps ?" se demande bizarrement Spinoza. Ma réponse : "pas grand chose".

Erwan Blesbois a dit…

On ne sait pas ce que peut un corps : ce qui laisse de l'espoir. Voilà mon interprétation. Il n'y a rien au delà, ou peut-être après la vie. D'ailleurs ne dit on pas de tout métier qu'il est un corpsde métier.Solidarité mon ami, solidarité et égalité, c'est le secret. Compétitivité et rentabilité sont à bannir. Il serait souhaitable que le monde soit un grand club med.

Erwan Blesbois a dit…

Ton ton général est beaucoup trop inflexible et intolérant. Nous avons les moyens d'avoir un monde plus cool et tolérant. Toi qui admire tant l'efficacité : les boîtes jeunes qui marchent et qui font des milliards de dollars de profit, ce qui manque tant à la France, pauvre petite province rigide et inflexible toujours en retard d'une guerre depuis Napoléon, qui sacrifie toujours son peuplede façon absurde, notamment en14-18 et maintenant sur le marché du travail au nom de la rentabilité et de la compétitivité. Les boîtes jeunes qui marchent, toutes situées hors de l'hexagone, notamment aux states, ont adopté une ambiance cool, club med. Mais cela peux-tu le comprendre? Je ne suis pas en guerre contre moi-même, je suis en guerre contre ceux qui condamnent à mort leur prochain au nom d'une idée. Aucune idée ne vaut la peine qu'on tue ne serait-ce qu'un chien. Le monde devrait simplement être plus gentil, les gens devraient s'aimer. Si certains veulent être méchants, qu'on les envoie sur la lune pour se faire la guerre. Ici-bas nous voulons des Jésus, des Gandhis, des artistes pour modèle. Napoléon sur la lune, et ne me parle pas de principe de réalité. La bonté et la compassion pour tout ce qui est vivant doit être le seul principe de réalité. A force d'être méchant par frustration, la France est un pays de losers.

Emmanuel Mousset a dit…

Bon bin je vais essayer d'être cool. Peut-être pas Jésus quand même ...

Erwan Blesbois a dit…

Kant et sa notion de responsabilité morale individuelle est l'abomination suprême. Il n' y a pas de responsabilitémorale individuelle, il n'y a que des responsabilités collective. Chacun est otage et responsable de l'autre avant d'être responsable de soi : la société est un corps. Le corps se construit par des émotions qui ne nous appartiennent pas, qui sont collectives. La seule responsabilité individuelle qui nous incombe n'est pas de faire notre devoir, mais d'essayer d'être humain c'est à dire bon. Si le principe de réalité est autre : c'est à dire le prof qui casse, ennemi de ses élèves. Et tout le reste qui suit comme modèle de société : cela est un modèle propre à la France, pauvre petite province qui méritait mieux, incapable de fournir des créateurs notamment dans le domaine informatique, qui rapporte pourtant des milliards. Même les Allemands ont abandonné Kant, et sont choqués maintenant par la rigidité éducative du système français. Système français éducatif cassant, basé sur la morale de Kant. République française qui se réclame depuis 150 ans de la notion du devoir kantien, alors que nous avons des génies comme Rousseau qui prônent l'épanouissement de l'enfant, alors que nous savons quel genre d'imbéciles comme Eichman, avait produit le système allemand, des imbéciles faisant leur devoir sans réfléchir, ce qui peut-être au fond un contresens de Kant, mais rigidité kantienne qui fut une spécificité du système éducatif allemand, et qui a conduit les Allemands devant la monstruosité du résultat à réformer leur école vers plus de tolérance dès 1945, de toute urgence. Alors ne me dit pas que je suis l'ennemi de moi-même, je réfléchis à contre courant, c'est tout.

Erwan Blesbois a dit…

Ceci dit tu as raison, malgré tout ce que je peux dire, je suis l'ennemi de moi-même. Mais comment cela se fait. C' est à se taper la tête contre les murs. Je suis emmuré dans cette haine de moi. Crois moi c'est absolument atroce.

Emmanuel Mousset a dit…

Comme la haine n'est que l'envers de l'amour, il te sera facile de t'aimer, un peu comme un gant de toilette qu'on retourne.