vendredi 29 septembre 2017

Un rocardo-juppéiste



Edouard Philippe s'exprimait hier soir, pour la première fois, dans une émission politique de longue durée. Celui à qui l'on reproche de ne pas exister, de n'être que l'ombre de Macron a été parfait, tant pour expliquer la ligne du gouvernement que par sa personnalité singulière. Il détonne par son calme, sa douceur, son flegme. Notre Premier ministre est très british : un humour retenu, tout en finesse. Oui, c'est un agréable portrait que nous avons pu apprécier hier soir. Moralement, c'est un homme ouvert, respectueux, mais ferme et déterminé.

Quant au contenu, on est macronien ou on ne l'est pas, ce qui n'empêche nullement d'être honnête et de reconnaître qu'Edouard Philippe est doué non d'une force de persuasion, toujours un peu vulgaire, mais d'une douceur de persuasion. C'est une rivière qui entraîne : "J'ai mon rythme", a-t-il plusieurs fois dit. La barbe joue en sa faveur, renforce la tranquillité du personnage : le poil est caressant et rassurant. Et puis, quelle maîtrise des dossiers ! C'est un techno, mais au sens excellent du terme : pas un baratineur. La technique est chez lui intelligente, comme dans ses échanges avec Testart.

Le moment très attendu était bien sûr le débat avec Mélenchon : la grande gueule de la gauche radicale devait le manger tout cru. Mais comme disait ma grand-mère : "Mange, on ne sait pas qui te mangera". Résultat, Mélenchon, avec sa vilaine figure, a dégusté : il s'est fait toutou venant manger dans la main de son maître, qu'il avait manifestement trouvé en la personne de Philippe. Moi-même en ait été stupéfait, quoique à moitié : toutes les grandes gueules que j'ai connues avaient de petits bras quand il fallait monter au combat. Drôle d'insoumis, Mélenchon ! Les siens n'ont pas dû le reconnaître.

Qui est Edouard Philippe ? Un homme de gauche qui a mal tourné et qui s'est repris, un rocardien membre du PS, le quittant pour la droite, se retrouvant en Alain Juppé et ralliant au final Emmanuel Macron. Nous sommes tous ainsi : nos méandres cachent une stricte cohérence. Philippe a toujours navigué entre le centre droit et le centre gauche. C'est un réformiste, un progressiste, qui rejette autant le conservatisme que la révolution. C'est un Juppé poilu, la raideur en moins ; c'est un Rocard très grand, la clarté du langage en plus. Je l'aime beaucoup.

8 commentaires:

Erwan Blesbois a dit…

C'est formidable, j'ai tout compris, ça me rappelle les westerns américains des années 40, 50 et du début des années 60, avant cette foutue époque de contestation et de liberté que constituèrent les années 70, parenthèse heureusement vite refermée, notamment par l'apparition quasi "miraculeuse" du SIDA, pour faire accepter par les masses la fin de la libération sexuelle. Oui j'ai tout compris, les libéraux-libertaires sont toujours les gentils cowboys, et tous les autres les méchants Indiens. D'ailleurs Mélenchon face au visage pâle Philippe, s'était teint d'une couleur de guerre, pas le visage mais les cheveux, de couleur violette.
Toujours est-il qu'avec le "progressisme" que l'on nous fait entuber avec des graviers et sans vaseline, aujourd'hui est pire qu'hier, mais bien moins que demain. Depuis 1983, l'inégalité et l'injustice ne font que s'accentuer suivant le programme du libéralisme qui est inscrit dans son ADN libéral
Par exemple pourquoi Macron donne-t-il aux riches ? Il donne aux riches afin que ceux-ci soient plus riches encore. C’est son orientation : le retour au XIXe siècle, Guizot et Badinguet à la fois.
Certains diront que c'est parce que les riches sont peu nombreux, les modestes, très nombreux ! Prendre 1 euro à 10 millions de modestes rapporte autant, et sans faire trop mal, que 100 000 euros à 100 riches ou 1 000 000 à 10 très riches. Élémentaire, mon cher Watson ! Eh bien même ce raisonnement est faux d'un strict point de vue mathématique...
Proportionnellement à son patrimoine, 1 000 000 d'euros pour Bernard Arnault, représente 0,02 millièmes de sa richesse, et pour un smicard 1 euro représente environ 0,7 millièmes de son salaire. 1 000 000 d'euros, cela vaut donc moins pour l'homme le plus riche de France, qu'un euro pour un smicard. Ce serait donc moins douloureux, proportionnellement à leurs fortunes, de prendre 1 million aux 10 plus grosses fortunes de France, que de prendre 1 euro à 10 millions de smicards ! Mais il est vrai que nos énarques sont très bien préparés à l'expression orale surtout, et écrite évidemment, mais très peu à des raisonnements mathématiques élémentaires...

Erwan Blesbois a dit…

...N'oublions pas que depuis 1983, les riches se sont enrichis dans des proportions indécentes et que tous les autres se sont appauvris dans les mêmes proportions. C'est cette potion amère que tous les jours Emmanuel Mousset tente de nous faire avaler. Au nom de quoi je ne sais pas ? De la fidélité à soi-même peut-être, et à une époque où la matrice du libéral-libertarisme s'est jouée au sein de la gauche de la gauche et des milieux dits maoïstes, période d'intense ébullition intellectuelle. Tout ça pour accoucher d'un système ayant vocation à accroître les inégalités et l'injustice ! Depuis cette époque des années 70 plus rien ne se crée, en France en tout cas. Où sont les Deleuze, les Foucault, les Derrida... aujourd'hui ? Et ne parlons même-pas de la création artistique ? Car corrélativement le monde s'enlaidit et s'appauvrit considérablement culturellement. Mousset lui-même le reconnait en parlant de "fainéantise" en matière de création intellectuelle ou artistique, alors qu'il ne s'agit que de la perte d'un monde commun et spirituel, qui avait au fond pour base un socle catholique universel. Ce qui s'est joué en mai 68, c'est en réalité la réactivation par la jeunesse bourgeoise de l'esprit de la Révolution française, athée, déicide, et régicide. Et le père qu'il s'agissait de tuer, c'était de Gaulle, lui et son esprit universel, c'est-à-dire catholique suranné.
Comme pour la Révolution de 1789, on utilisa le nom du "peuple", pour cautionner en réalité une réactivation des valeurs bourgeoises, réactivation qui dure désormais depuis environ 40 ans, sous le nom de libéral-libertarisme et qui chaque jour appauvrit un peu plus le "peuple" de toute façon embourgeoisé par les "Trente glorieuses", et enrichit beaucoup les riches.
Macron est l'homme providentiel élu par la bourgeoisie pour donner un "coup de boost" à cette logique inégalitaire et injuste, afin d'en finir une fois pour toute avec les idéaux de justice ou d'égalité, qui n'ont jamais été ceux de la bourgeoisie. La bourgeoisie se targue du beau mot de liberté, mais elle sait que ses enfants ont à parcourir un 100m en partant des 50m, alors que tous les autres doivent partir de la ligne de départ. En gros les dés sont depuis longtemps pipés par la bourgeoisie, et tout le monde sait qu'il n'y a plus d'ascenseur social.
Il n'y a aucune caution légitime au libéral-libertarisme, à part peut-être que par l'abrutissement des masses on neutralise aussi ses pulsions guerrières, et encore ! Voire... On a surtout neutralisé sa capacité à se révolter contre l'injustice et l'inégalité. L'abêtissement n'est jamais un enrichissement, et depuis 1983, les Français ne cesse de s'abrutir un peu plus chaque jour, par le biais de leurs enfants qu'ils ne savent plus éduquer selon des valeurs communes, et à qui ils ont de moins en moins de valeurs à transmettre, hormis la culture de l'image et celle du chiffre et des statistiques.
Pour conclure, les Indiens avaient des valeurs de fierté, d'honneur, de parole donnée, tout comme l'aristocratie française du XVIIème siècle, alors que les cowboys sont du côté de la traîtrise, de la perfidie, de la cupidité, tout comme nos bourgeois de 1789, réactivés depuis 1983 et le triomphe mondial du libéral-libertarisme.

Anonyme a dit…

Il a eu le courage et la clarté d'expliquer que l'on ne peut continuer de " dégoutter et ainsi chasser" les chefs d'entreprises de France.Les garder c'est bon pour l'emploi et les recettes fiscales. A terme tous les citoyens en bénéficierons. Mélenchon aura t-il compris, sans doute, il n'est ni sot, ni naif mais pour son fonds de commerce il ne le reconnaîtra pas! Cette pauvre Martine Aubry qui n'a connu que l’échec de ses options continue de s'accrocher a ses vielles théories à base de lutte des classes!

Tchernobog a dit…

Tant qu'il y'aura des classes il y'aura des luttes c'est simple comme bonjour. La jambe droite a commencé à marcher seule, la jambe gauche à l'air d'une jambe de bois. Cadeaux fiscaux aux riches à profusion et serrage de ceinture généralisé pour les pauvres, si la jambe gauche ne se met pas en marche rapidement, le marcheur va prendre un gros coup de pied au cul.

M E a dit…

Cette pauvre Martine Aubry qui n'a connu que l’échec de ses options continue de s'accrocher à ses vieilles théories à base de lutte des classes !
Ces théories par vous qualifiées de vieilles n'en sont pour autant pas hors d'actualité du tout : elles ont été énoncées pour la majeure partie par un penseur de tout premier plan, Karl Marx.
Non, Monsieur, le marxisme n'est pas mort : il a même encore de nombreux beaux jours devant lui, ne vous en déplaise !

Philippe a dit…

Faux duel inutile !!!
mais révélant ce que pensent les organisateurs des enjeux politiques à venir
Il me semble que Edouard Philippe et Jean Luc Mélenchon se déplacent, agissent et s’expriment dans et surtout pour des Mondes parallèles.
Les faire se rencontrer n’a pas ou très peu d’impact sur l’un ou l’autre de ces Mondes.
Le premier Monde dans le sillage de Macron et de ses « donateurs » œuvre pour sanctuariser les sources françaises de revenus des très riches.
Il faut donner du pain et des jeux … et donc un minimum de fric à la population de plus en plus nombreuse soit désœuvrée soit très précarisée.
Pour sanctuariser ces sources de revenus des très riches il finance une paix sociale en écrasant d’impôts les citoyens captifs du paiement de leurs impôts en France.
Il ne fait pas payer la paix sociale par ceux qui bénéficient (les très riches).
Tel est le Monde rêvé par E Macron et sous fifres.
Le Monde de J L Mélenchon est constitué par les « mécontents » que Talleyrand a défini avec talent par sa répartie célèbre : un mécontent c’est un pauvre qui réfléchi, voire même en 2017 qui peut être à la marge ... islamo-gauchiste.
J L Mélenchon les appelait dans ses meetings « mes gens ».
Entre ces deux Mondes le célèbre « marais » un Monde informe constitué par les indécis, les pusillanimes, les pauvres décérébrés … qui regardent plutôt TPAMP que les « émissions politiques »… et aussi les zombis des anciennes droites extrêmes ou pas.
JL Mélenchon fait le pari de l’échec de Macron à moyen terme dans les 5 ans.
Macron fait le pari de l’échec de JLM.
Si les deux Mondes ne restent pas parallèles ils se percuteront dans la violence …

J J a dit…

Si les deux Mondes ne restent pas parallèles ils se percuteront dans la violence …
Analyse qui ne vaut que par son auteur.
La France ne se réduit pas à ces deux seules personnes même s'il vous semble que ce soit des personnalités.

Philippe a dit…

Je disais : « Entre ces deux Mondes le célèbre « marais » un Monde informe constitué par les indécis, les pusillanimes, les pauvres décérébrés … qui regardent plutôt TPAMP que les « émissions politiques »… et aussi les zombis des anciennes droites extrêmes ou pas. »
Exact
Il y a en effet un 3ème Monde, beaucoup plus peuplé, celui de ceux qui rament au quotidien et qui au final créent plus de richesses diverses et variées que les deux autres (les deux autres « en amour » pour leurs gourous baratineurs et hélas gourous finalement porteurs de haines chacun à sa manière).