mercredi 13 septembre 2017

Camarades farceurs



Karl Marx disait que lorsqu'un événement se produit deux fois, la première est sous forme de tragédie, la seconde comme farce. Je pense que c'est ce à quoi nous avons assisté hier en France, dans les manifestations contre la réforme du code du travail : une farce qui voudrait faire croire à une tragédie. Certes, Marx songeait à des événements autrement historiques, puisqu'il visait le tragédien de haute volée, Napoléon Bonaparte, et son pitoyable neveu, Napoléon III, "le Petit", comme s'en amusait Victor Hugo. Toute proportion gardée, nous étions hier aussi dans la farce.

Pourtant, la contestation de cette réforme est parfaitement légitime et respectable. J'irais même jusqu'à dire que sa critique intelligente serait profitable à tous. Hélas, ce n'est pas le cas : une farce reste une farce. Pourtant, il y a eu du monde dans les rues, tout ce que le syndicalisme de lutte de classes et la gauche radicale peuvent mobiliser, mais pas plus, pas au-delà. Où est donc alors la farce ? Dans les images qu'on retiendra : ces manifestants portant autour du cou des pancartes dérisoires sur lesquelles ils se qualifient de "fainéants". Quand on se croit obligés de mentir en déformant les propos du président de la République (voir billet de lundi dernier), c'est qu'on est mal parti, c'est qu'on n'a guère d'arguments à lui opposer. Jouer les farceurs, ce n'est pas très sérieux, ni pour des syndicalistes, ni pour des militants politiques.

Mais le plus grotesque, le sommet de la farce, aura été le ralliement des forains aux manifestations, eux aussi contre les ordonnances. Marcel Campion, leur leader, a rédigé un texte qui est à pisser de rire. Rien que le titre sent la bouffonnerie : "Fête foraine et lutte finale". Je vous invite vivement à en lire l'intégralité sur internet : vous serez pliés. Campion, qui ne cache pas être "riche", appelle à "défier les bien pensants aux côtés des travailleurs", en criant : "No Pasaran !" (c'est tordant, mais je n'invente rien, le texte fait foi). Campion veut être "en première ligne de toutes les manifestations de la colère sociale : avec les syndicats et les insoumis, les bonnets rouges et les blacks blocs (sic), les agriculteurs faillis et les anarchistes ..." Là, je tombe littéralement sur le cul. Le manifeste révolutionnaire se termine par cette déclaration : "Dans toutes les prochaines batailles de la guerre sociale, les forains seront en première ligne".

Mais qu'est-ce qui pousse les forains à jouer les anars et Marcel Campion à se prendre pour Che Guevara ? Tout simplement parce que Macron leur demande de passer par un appel d'offres avant
d'installer leurs manèges et autres attractions. Rien que pour cette raison-là ! Une farce, je vous dis. Karl Marx avait raison.

3 commentaires:

Philippe a dit…

Parlons de ce que E Mousset évite de signaler
je suis un forain ayant un stand classique de tir.
Je passe dans 20 à 25 foires par an.
Pour gagner très peu il faut que je fasse 20 à 25 dossiers d’appel d’offre, que je les suive, que je me fasse parvenir les courriers les concernant sur les champs de foire.
E Macron veut tuer les petits et moyens forains.
Pour faire place nette disponible pour LVMH qui à moyen terme veut remplacer les forains traditionnels ?
http://www.bfmtv.com/societe/paris-le-jardin-d-acclimatation-mise-sur-un-nouvel-univers-entre-jules-verne-et-harry-potter-1059635.html

Anonyme a dit…

Un forain possède une tournée, des memes dates et des memes villes qu ils font depuis des générations. les emplacements les forains les définissent entre eux, car de la position des métiers dépend le bon équilibre de la fête foraine qui permettra à chacun de vivre.
Un métier forain est un investissement qui peut atteindre 500 000 €.
L'appel d'offre va clairement précariser ces professionnels, souvent proche de l'artisan, les déposséder de la tournée qui garantie leur possibilité de rembourser les emprunts bancaires.
C'est clairement la disparition à court terme des familles foraines pour laisser places à des entreprises spécialisées dans l'événementiel, qui auront les reins solides pour financer des attractions mobiles. Les sociétés propriétaires des grands parcs d'attractions n'attendent que ca pour mettre la main sur les fetes foraines des grandes villes.
L'appel d'offre est peut être logique et naturelle de nos jours mais va détruire le monde forain, dont beaucoup des familles appartiennent à ce qu on nomme les gens du voyage.
On va froidement faire disparaître tout une culture, tout une tradition devenu apparemment incompatible avec le monde moderne capitaliste.

J B a dit…

Vous voilà donc devenu marxiste alors ?
Encore un petit effort, camarade !
Relisez "das kapital - kritik der politischen oekonomie" et ça vous guérira de votre propension à trouver farce ce qui ne l'est pas spécialement et même des farces de Molière il n'y a pas qu'en rire.