dimanche 2 décembre 2012

La victoire de Florange



L'issue du conflit à ArcelorMittal est une victoire pour le gouvernement et les salariés, si l'on veut bien reconnaître honnêtement les faits . Que voulait Mittal ? Fermer le site de Florange, licencier tout le personnel et investir ailleurs. Qu'a obtenu le gouvernement ? Que le site reste ouvert, qu'aucun licenciement n'ait lieu, que 180 millions d'euros soient investis. C'est une belle victoire, car les faits sont têtus, comme disait Lénine, et les mots ont un sens.

Pourtant, qu'est-ce qui laisse croire à certains qu'il y a une défaite ? On retient le mot du responsable local de la CFDT, qui qualifie Ayrault de "traître", mais on oublie de dire que FO se déclare "satisfait". La nationalisation n'a pas été retenue ? Montebourg a été franc et honnête dès le début : pour forcer Mittal à un accord, il faut brandir cette possibilité. L'accord s'est fait, il est à l'avantage des salariés, la nationalisation ne se justifie plus !

Mais si Mittal ne tient pas ses engagements ? Non, on ne fait pas de la politique, on ne dirige pas un grand pays avec des "si". Ou alors on doute de tout et on ne fait plus rien. Surtout, l'hypothèse de la nationalisation demeure en cas d'éventuel reniement. Il n'en reste pas moins que la déception et l'inquiétude sont là. Mais dues à quoi ?

Il y a, je crois, ce mot de "nationalisation", prononcé par le ministre, qui a eu un effet magique, comme s'il pouvait immédiatement tout régler : non, et même si nationalisation il y avait eu, elle aurait été temporaire. Jamais le gouvernement n'a eu à l'esprit d'administrer le site de Florange et d'en garantir de cette façon l'emploi et la pérennité ! Montebourg aurait-il dû s'abstenir d'utiliser le mot, pour ne pas susciter de faux espoirs ? Mais non, puisque son évocation était un élément fondamental et boostant dans la négociation !

Autrefois, quand ce type de négo se passait à huit clos, rien ne filtrait, on ne connaissait que le résultat final. Aujourd'hui, tout est médiatisé, sous l'oeil de la caméra, d'heure en heure : un mot et c'est l'emballement médiatique, hors contexte et en dehors de toute raison. Après le tourbillon des mots et des images, il reste l'amertume, sur fond de malentendu.

Il y a aussi un problème de fond : la gauche française, politique et syndicale, est encore mal à l'aise avec la notion social-démocrate de "compromis". Dans une logique de "lutte de classes", elle raisonne en gagnant et perdant, en vainqueur et vaincu, elle conçoit difficilement que les deux parties en conflit puissent trouver un terrain d'entente. C'est la révolution culturelle que François Hollande a lancé et que le parti socialiste doit relayer sur le terrain, avec force pédagogie, en saluant et expliquant aujourd'hui la victoire de Florange.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Amusant de relire ceci - suis tombé sur votre blog par hasard - des mois après : Vous parlez de victoire ... laquelle ? Vous commettez l'erreur systématique de la gauche : Oublier que si une entreprise est riche de ses hommes, elle ne peut pour autant pas fonctionner sans oublier les lois du marché, à moins d'être dans une économie administrée, dont on a vu ce à quoi cela mène. Et donc, il faut des clients. Dans ses interventions, Mélenchon a encore oublié cela en parlant du chantier naval. Clients qui ne viendront pas s'ils trouvent moins cher ailleurs. Et voilà le problème de Florange : Pourquoi s'acharner à faire de l'acier là où il n'y a plus de charbon et de minerai ? Et voilà le problème de la gauche: Ignorer l'économie. Et voilà comment, par aveuglement ou ignorance, la gauche trompe ses électeurs. jmdb@shawt.net