mercredi 1 février 2017

La République dans le dos



Notre démocratie est en crise. Ce n'est pas une formule convenue. Des faits récents attestent de la gravité de la situation. Qu'y a-t-il de plus précieux en démocratie ? L'élection. C'est la prunelle de ses yeux. Le principe électif est simple ; aujourd'hui, il est altéré. Quelques derniers exemples :

1- Le vote insincère. La démocratie ne fonctionne normalement que si le vote de chaque citoyen s'exerce en toute sincérité, conformément aux convictions personnelles. Or, lors des deux dernières primaires de la droite et de la gauche, des électeurs ont ouvertement assumé et justifié des votes tactiques, altérant les résultats du scrutin (je n'avais jamais vu ça de ma vie politique). On ne vote pas Juppé parce qu'on est d'accord avec Juppé, mais pour écarter Sarkozy. On ne vote pas Hamon parce qu'on est d'accord avec Hamon, mais parce que sa désignation arrange Macron. Des gens de droite participent à la désignation du candidat de gauche, des gens de gauche participent à la désignation du candidat de droite. Nous sommes en pleine Absurdie.

2- Hamon, Mélenchon et Jadot se partagent un même créneau électoral, la gauche de gauche, entre la gauche de gouvernement et l'extrême gauche. Tous les trois risquent d'être éliminés dès le premier tour. Qu'à cela ne tienne : une pétition circule depuis hier, à l'initiative notamment de Susan George, pour demander que deux d'entre eux se retirent, et à défaut d'accord, en procédant à un tirage au sort. Oui, vous avez bien lu : le possible président de la République va se décider au "pouf pouf ce sera toi qui sera le candidat" !

3- François Fillon est en difficulté, à cause d'une affaire privée. Seule la justice peut disposer des informations et porter un jugement. Mais non, tout le monde s'en mêle, s'agite, au mépris du droit : la présomption d'innocence est bafouée, tout comme la séparation des pouvoirs entre politique et justice. Le principe républicain du vote majoritaire est ignoré : au mépris du choix des électeurs, un possible remplacement du candidat est envisagé, sans que cela ne heurte personne.

4- Les sociaux-démocrates du PS sont très embarrassés après la victoire de Hamon. On les comprend. Mais pourquoi avancent-ils un absurde "droit de retrait" ? Cette procédure n'appartient pas à la politique, mais au droit du travail : c'est la possibilité pour un salarié de quitter momentanément son poste quand il y a un danger imminent. Rien à voir avec la situation des élus qui sont en désaccord avec la ligne politique de Benoît Hamon. Ils savent bien que celle-ci sera complétée, enrichie mais que ses grandes orientations ne seront pas modifiées. Le "droit de retrait" pour un élu, ça n'a aucun sens. Pourtant, le choix est simple : quand on n'est pas d'accord avec le candidat d'un parti légitimement désigné, on quitte le parti. Je ne vois pas d'autre alternative.

Toutes ces situations extrêmement différentes sont très préoccupantes par leur point commun : ignorer les règles de base de la démocratie, privilégier les choix individuels, préférer les procédures aux convictions. Je ne sais pas où on va comme ça, mais on tourne le dos à la République.

15 commentaires:

citoyen a dit…

concernant Fillon vous écrivez " ..la présomption d'innocence est bafouée,.." on n'en est pas là: le Canard fait état de FAITS REELS à savoir les salaires perçus par Mme Fillon et qui ne sont pas contestés;je ne dis pas F.Fillon est "coupable" de quoi que ce soit, je constate tout simplement l'énormité de ces sommes..et vous voudriez qu'on ne réagisse pas?
Indignez-vous écrivait il n'y a pas si longtemps un homme respectable ( et respecté) eh bien oui il faut continuer à s'indigner pour pousser les politiques ,qui nous représentent il ne faut pas l'oublier, à voter des lois mettant fin à ces dérives qui salissent la République( fermez le bvan..)

Emmanuel Mousset a dit…

L'indignation est un sentiment. Je ne fais pas de politique avec des sentiments.

Erwan Blesbois a dit…

L'affaire Fillon me fait bien rire, que lui reproche-t-on à ce pauvre homme ? D'avoir fraudé au profit de sa famille et le sien si les faits sont avérés, environ un million d'euros brut, pfff p'tit joueur...
Le salaire de nos politiques n'est pas indexé sur celui des grands patrons. En France depuis le tournant libéral de 1983 le salaire des grands patrons a explosé. L'argument pour le justifier est que notre économie repose sur l'innovation et l'imagination (encore un slogan de 68, "l'Imagination au Pouvoir", détourné par la plus pure prédation capitaliste), et que pour innover nous dit-on, il faut beaucoup d'argent, énormément d'argent, toujours plus...
Des années 60 à maintenant, l'écart médian de rémunération entre un dirigeant d'entreprise et un simple salarié, est passé de 20 à environ 270 aux Etats Unis, c'est donc à peu près la même chose dans tout le monde occidental, indexé sur le modèle nord-américain. Ce sont les grands patrons et leurs revenus pharaoniques qui font monter l'écart médian, quand les patrons de PME restent à des revenus décents.
Mais revenons au pauvre Fillon et à nos pauvres politicards franchouillards. Ils voient leurs amis du grand patronat s'envoler en termes de rémunérations, quand eux continuent à plafonner bas, avec un écart de rémunération avec un smicard compris entre 3 et 15 environ, ce qui n'a au fond guère évolué en leur faveur depuis les années 60.
Comment ne pas compatir à la frustration générée par une telle injustice ? Dans les dîners en ville, quand Fillon doit fréquenter des Arnault, des Pinault, des Bolloré, des Dassault ou encore des Bettencourt, qui eux-mêmes sont des p'tits joueurs face aux géants américains que sont par exemple les patrons de Facebook ou de Microsoft, combien notre pauvre Fillon doit se sentir petit et mesquin, même pas de quoi leur payer l'addition !
Mais nos patrons sont au même niveau environ que le patron d'Uber, dont la boîte génère des profits qui bénéficient plus au fisc américain et donc au peuple américain qu'au fisc français et aux salariés français, qui eux vivent dans des conditions de quasi esclavage, dans cette boîte que l'on dit à la pointe de l'innovation à l'instar d'Amazon. Cette dernière est encore une boîte créatrice de misère sociale, et destructrice du tissu social et culturel d'une économie basée sur la proximité avec le client.
Mais revenons au pauvre Fillon, quand on voit comment il doit ramer pour assurer un revenu décent à sa famille, on se dit que quelque chose cloche dans le système. Devrait-on indexer le revenu de nos politicards sur celui des grands patrons du CAC 40 ? Ou alors devrait-on faire redescendre sur terre les grands patrons dont le capital, pour le plus riche d'entre eux est le même que celui de cent millions de smicards choisis au hasard parmi les classes populaires des pays occidentaux, ou que celui d'environ un million de personnes choisis parmi les couches les plus aisées de la classe moyenne occidentale, dont on émettrait l'hypothèse que le capital net soit d'environ cent mille euros ? Oui car c'est bien cent milliards d'euros net que possède à lui tout seul l'homme le plus riche du monde.

Erwan Blesbois a dit…

On nous dira que les énormes capitaux favorise l'innovation et donc la croissance, qui favoriserait l'enrichissement de la partie la plus pauvre de la population mondiale. Tout cela est entièrement faux ! Notre modèle fonctionne désormais comme un programme dont la finalité est l'enrichissement toujours plus outrancier et indécent des très riches, l'appauvrissement des classes moyennes, et la totale aliénation des classes dites populaires, et tout particulièrement des 3,5 milliards de personnes les moins riches de notre planète qui possèdent désormais moins que les 62 personnes les plus riches de la planète.
L'autre conséquence d'un tel programme de fuite en avant reposant sur un modèle de croissance aveugle, auquel souscrivent les sociaux-démocrates, libéraux-conservateurs ou libéraux-libertaires (comment les appeler et les identifier réellement ?) de "droite" ou de "gauche", tels Macron ou Fillon (dont la différence idéologique est très minime et n'est que de surface, l'un étant libertaire dans la plus pure tradition post soixante-huitarde, et l'autre s'en démarquant en postulant des prises de position plus conservatrices sur le plan sociétal, alors que sur le plan économique ils sont en gros d'accord), c'est évidemment la destruction de la biodiversité dont les scientifiques mesurent l'amplification exponentielle tous les jours, et à terme la destruction ni plus ni moins que de la planète.
Car plus le temps passe, plus nous consommons au delà des ressources qu'une seule planète peut nous offrir. Les Nord-Américains sont les plus gros pollueurs par tête de pipe, mais vu le nombre de Chinois et leur modèle de croissance, ils ne sont pas loin derrière, et nous autres Européens, indexés sur le modèle nord-américain depuis 1945, non plus.
Un Hamon a le mérite de se démarquer de ce modèle de croissance, et le courage d'affirmer la primauté de la richesse que constitue la biodiversité et la préservation de la planète, sur le simple règne de l'argent, qui en termes freudiens s'apparente au règne d'un modèle excrémentiel à l'échelle d'une planète entière. Ce n'est pas le nombre d'habitants qui fait courir un risque à la planète, mais l'état d'esprit de ses habitants, qui sont désormais quasiment tous soumis à l'appât du gain et au règne du veau d'or.

citoyen a dit…

quelle phrase curieuse écrite surement dans la précipitation;sur une copie d'élève vous auriez certainement demandé: développez svp..sinon ça ne fait qu'une déclaration lapidaire sans arguments;merci pour la suite..mais je ne l'attends pas car vous allez à votre habitude,quand une remarque vous dérange, soit ne pas répondre soit, mais la ficelle est un peu grosse, répondre par une autre question et on entrera dans le mouvement universel

Erwan Blesbois a dit…

L'affaire Fillon me fait bien rire, que lui reproche-t-on à ce pauvre homme ? D'avoir fraudé au profit de sa famille et le sien si les faits sont avérés, environ un million d'euros brut, pfff p'tit joueur...
Le salaire de nos politiques n'est pas indexé sur celui des grands patrons. En France depuis le tournant libéral de 1983 le salaire des grands patrons a explosé. L'argument pour le justifier est que notre économie repose sur l'innovation et l'imagination (encore un slogan de 68, "l'Imagination au Pouvoir", détourné par la plus pure prédation capitaliste), et que pour innover nous dit-on, il faut beaucoup d'argent, énormément d'argent, toujours plus...
L'autre conséquence d'un tel programme de fuite en avant reposant sur un modèle de croissance aveugle, auquel souscrivent les sociaux-démocrates, libéraux-conservateurs ou libéraux-libertaires (comment les appeler et les identifier réellement ?) de "droite" ou de "gauche", tels Macron ou Fillon (dont la différence idéologique est très minime et n'est que de surface, l'un étant libertaire dans la plus pure tradition post soixante-huitarde, et l'autre s'en démarquant en postulant des prises de position plus conservatrices sur le plan sociétal, alors que sur le plan économique ils sont en gros d'accord), c'est évidemment la destruction de la biodiversité dont les scientifiques mesurent l'amplification exponentielle tous les jours, et à terme la destruction ni plus ni moins que de la planète.
Hamon a le mérite de se démarquer de ce modèle de croissance, et le courage d'affirmer la primauté de la richesse que constitue la biodiversité et la préservation de la planète, sur le simple règne de l'argent, qui en termes freudiens s'apparente au règne d'un modèle excrémentiel à l'échelle d'une planète entière. Ce n'est pas le nombre d'habitants qui fait courir un risque à la planète, mais l'état d'esprit de ses habitants, qui sont désormais quasiment tous soumis à l'appât du gain et au règne du veau d'or.

Anonyme a dit…

Même Macron demande à Bayrou de s'écarter, et alors dans ce cas c'est pour qui le droit de retrait, pour Fillon ?

Anonyme a dit…

La chute de l'empire romain ou simplement des pratiques claniques de personnes qui sont des chefs cuisiniers mais sans talent et qui confectionnent des tambouilles que nos concitoyens ne peuvent plus digérer ..Mais diable ; ou sont nos grosses têtes de jadis ???

Anonyme a dit…

Oui notre démocratie est en crise sinon il n'y aurait pas un candidat comme Macron osant se proclamer contre toute évidence comme un anti-système alors qu'il n'en est que l'expression la plus aboutie, la plus remarquable.

Anonyme a dit…

Notre démocratie est en crise parce que la classe politique ne sait ou ne veut choisir ses propres candidats et procède à des scrutins censitaires appelés primaires pour faire sélectionner par une petite minorité de citoyens les candidats à la présidentielle qui auront le droit de concourir à l'élection présidentielle. A cet égard Macron et Mélenchon et les autres ont eu bien raison de refuser cette limitation de la démocratie.

Anonyme a dit…

Notre démocratie est durablement en crise pour des motifs bien plus profonds
Les problèmes de fond ne sont pas traités par nos politiques tous des Iznogoud dont le seul but dans leur vie déjà luxueuse est d’être calife à la place du calife.
J’ai regardé Mardi 31 sur FR3 « l’épopée de gueules noires » et la partie concernant « une vie après la mine » de l’émission qui suivait « Infrarouge » les désastres écologiques et financiers laissés à la charges des communes donc des habitants … double peine en qq sorte.
On pourrait faire cette émission sur d’autres ex territoires industrialisés concernant d’autres ex industries « lourdes » en France (et même aux USA!!! si l’on veut élargir le débat)
On s’aperçoit que les dominants économiques de la France et les dirigeants politiques sortis de leurs rang qui se sont succèdes depuis le 19ème siècle (et avant) n’ont pas exploité cyniquement que les humains africains (via la colonisation) mais également des populations nombreuses françaises et européennes … en France.
On pourrait parler de système colonial hexagonal complétant l’africain.
Au lieu d’aller les voir comme on va au zoo pour les moquer de voter MLP et pour leur dire de ne pas boire autant … Macron … si on parlait ré-industrialisation même si on doit « violer » l’UE !

Anonyme a dit…

Vous qui êtes un militant politique de gauche je vous trouve bien indulgent à l'égard de François Fillon et des affaires qui le concernent. Même si tous les reproches qui lui sont adressés ne sont pas juridiquement fondés sauf celui de l'emploi à la Revue des 2 Mondes il devrait être irréprochables dans la mesure où il se propose de faire une politique d'austérité sans précédent pour la grande majorité des français. A travers Filon c'est toute la classe politique qui se trouve contestée minant ainsi la confiance des citoyens envers le système démocratique de représentation nationale. Après cela étonnez-vous que le FN progresse !

Anonyme a dit…

Ce que dit Erwan Blesbois avec son ironie bobo est susceptible de choquer les âmes sensibles. Mme Fillon a bel et bien touché des sommes astronomiques pendant une quinzaine d'années en cumulé, et tout ça pour, dans le meilleur des cas, un boulot de secrétaire à mi temps ... Que l'enquête montre qu'elle a travaillé un peu ou pas du tout, c'est presque secondaire, et comme beaucoup l'écrivent un peu partout, le fait que Fillon ne se rende pas compte que le problème ne vient pas de la légalité de cette pratique mais de son existence, c'est ça le vrai problème! On parle de 5 000 à 10 000 euros bruts mensuels là, des sommes que même des ingénieurs ou des diplômés de grandes écoles ne pourront jamais atteindre ...
Le cas des sommes pharaoniques que touchent les grands patrons est un autre problème, mais à résoudre lui aussi. Et là Erwan Blesbois touche un point sensible et il a raison de l'évoquer.

citoyen a dit…

ça ne serait pas mal que les indemnités parlementaires soient augmentées;ces élus du peuple votent les lois qui fondent notre société française et 6000€/mois ça semble dérisoire en regard d'un gamin de 20 ans qui perçoit 300 000€/mois pour taper dans un ballon..en contre partie de cette indemnité revalorisée plus de cumul de mandats et rémunération directe par l'état des attachés parlementaires ; ainsi plus de clarté et- c'est important -ça permettrait de tordre le cou à cette vieielle antienne ressassée par les partis extrêmes du " tous corrompus" qui mine le débat politique et partant notre démocratie

D a dit…

"ça ne serait pas mal que les indemnités parlementaires soient augmentées;ces élus du peuple votent les lois qui fondent notre société française et 6000€/mois ça semble dérisoire en regard d'un gamin de 20 ans qui perçoit 300 000€/mois pour taper dans un ballon.."
Incredible dirait-on outre Manche...
Ce ne sont pas les indemnités parlementaires qui sont à augmenter, ce sont les émoluments des sportifs dits professionnels qui devraient être radicalement revus à la baisse.
Pour ce que ça sert à l'ensemble du corps social que de savoir taper dans un ballon de football voire de rugby ou de frapper à l'aide d'une raquette une balle de tennis à défaut de propulser avec un club une balle de golf...
6000€ / mois, c'est une très belle somme avec laquelle il est possible de vivre dignement, largement mieux que la moyenne des gens composant le corps social.