dimanche 17 avril 2016

Nous sommes tous ...



Le pape qui revient de Lesbos avec trois familles de réfugiés, et qui déclare : "Nous sommes tous des migrants", oui il y a de quoi s'en inspirer, croyants ou pas. Et quand parmi ces familles, il y a des musulmanes qui portent le voile et qui ne dérangent pas plus que ça le chef de l'Eglise catholique, cela faire réfléchir : la République française serait-elle moins tolérante que l'Etat du Vatican ?

"Nous sommes tous des migrants" : la formule, depuis 50 ans, fait florès, déclinée autrement. Je crois bien que le premier à l'avoir employée a été Kennedy, à Berlin, en 1963 : Ich bin ein Berliner, "je suis un Berlinois", pour marquer son attachement à la liberté et à la démocratie, face au sinistre mur et au non moins sinistre totalitarisme derrière.

Et puis, il y a eu mai 68, à Paris, les étudiants s'écriant : "Nous sommes tous des juifs allemands", en soutien à Daniel Cohn-Bendit, que le secrétaire général du PCF de l'époque, Georges Marchais, avait qualifié ainsi, ce qui n'était pas un compliment dans sa bouche.

Dans les années 80, combien de fois ai-je hurlé dans les manifs, plus souvent qu'à mon tour, ce slogan en faveur d'une France ouverte, cosmopolite, fraternelle : "Première, deuxième, troisième générations, nous sommes tous des enfants d'immigrés !" Même si je suis berrichon de souche, dans un centre de la France qui ne voit ni la mer ni le large, la vérité me semblait, et encore aujourd'hui, du côté des grands espaces, des rencontres de civilisations et du métissage.

En septembre 2001, après les attaques contre le Word Trade Center, le quotidien Le Monde titrait : "Nous sommes tous américains". Yes, yes, yes ! Et puis, l'an dernier, il a fallu redescendre dans la rue pour dire "Je suis Charlie", et à la fin de ce tragique 2015, afficher sur fond tricolore "Je suis Paris".

Les causes sont multiples, sans rapport, mais un même ressort les anime, le fameux "Nous sommes tous ...", seulement nuancé aujourd'hui par un "Je suis ...", individualisme oblige. Mais le message demeure identique, plein d'espoir et d'énergie : c'est une reformulation de l'humanisme, qui fait que chacun s'identifie à l'autre et prend par conséquent sa défense, le soutient, puisqu'il s'y reconnaît comme en lui-même. "Nous sommes tous ..." : c'est un déclic, un réflexe républicain contre tous les fascismes et les totalitarismes, qui veulent écarter, soumettre ou broyer autrui qui ne leur ressemble pas, qui n'est pas eux.

En 1980, à la mort de Jean-Paul Sartre, le quotidien Libération citait à sa une la formule du philosophe, tirée de son ouvrage "Les mots" : Un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n'importe qui. Chaque homme porte en lui l'humanité entière, dans ce qu'elle a de meilleure et de pire. Tout homme est égal à un autre. Nous sommes tous sartriens ?

8 commentaires:

Erwan Blesbois a dit…

Le dernier attentat ayant eu lieu en Belgique, pour l'instant nous sommes tous belges, je n'ai pas dit cons !

Maxime a dit…

C'est ridicule cette mode du "Je suis ...". Ce n'est pas ce que j'appelle une réaction logique. C'est uniquement dicté par "l'émotion" (et encore, combien de gens sont "choqués" par convenance)... exit la raison, qui exigerait de réfléchir aux tenants et aboutissants du problème. Il n'y a pas si longtemps, plutôt que de poser des bougies et de pleurer comme des madeleines, notre peuple aurait réagit plus énergiquement (ou alors aurait eu pour lui la noblesse du stoïcisme)... j'imagine que c'est cela la décadence.

Quand au Pape, il fait ce qu'il veut mais ses migrants il se les garde pour lui, l'Europe est déjà envahie, au bord de la surcharge.

Philippe a dit…

Nous avons atteint le point culminant de l'individualisme but ultime du libéralisme … tous des consommateurs aveugles car à l'information faussée.
Nous ne nous préoccupons de moins en moins de nos familles.
Il faut des lois avec sanctions importantes pour que l'on daigne se préoccuper de sa progéniture.
A quand le fond de garantie « braguette » pour aider les femmes avec enfants dont les mâles sont partis sans laisser d'adresse ou qui ont organisé leur insolvabilité. (il existe depuis longtemps un fond de garantie automobile pour aider les victimes des « sans permis »)
Nous ne nous préoccupons de moins en moins de nos voisins, dans certains immeubles il arrive qu'une odeur dérangeante de cadavre indique qu'il s'est passé quelque chose !
Et …. on veut faire croire à ces slogans
Tous « machin » « chose » et autres à venir
Le filon médiatique et politique est bon et ne coûte rien aux détenteurs de pouvoir et richesses !

Maxime a dit…

En même temps Philippe, il est quand même bien normal de s' occuper de soit. On a qu'une vie, il faut en profiter. En plus, les autres ne le méritent pas.

Pour votre fonds de garantie "braguette", je vous ferai remarquer que cela existe déjà, puisque l'avortement est remboursé INTÉGRALEMENT par la Sécurité Sociale.

Philippe a dit…

Au niveau coût remboursement d'un avortement et entretien d'un enfant = rien à voir

J a dit…

Il est instructif que ce sont des "je suis ..." qu'on peut voir fleurir plutôt que des "je soutiens ..." ou des "je suis avec ...".

Maxime a dit…

A Philippe: précisément, et c'est pourquoi il faut privilégier je pense la solution la moins coûteuse.

A J: Remarque intéressante. Mais quels conclusions en tirez-vous? Moi j'en déduis que ce n'est pas une réaction marquée par l'adhésion idéologique à un idéal mais de la morale sentimentaliste à deux balles. Mais bon, c'est normal. A part sa propre gueule, il n'y a pas d'idéaux. Ce qui est bien mieux, les idéalistes sont des gens très dangereux.

J a dit…

Il ne s'agit que de postures...
Mais les postures sont respectables à l'inverse des impostures.