jeudi 12 novembre 2015

Les envies de Benoît



Une petite devinette en prélude au billet d'aujourd'hui : qui a dit, hier matin à la télé, "je n'ai pas envie de revoir Hollande et Sarkozy face-à-face en 2017" ? En toute logique, ce n'est pas un partisan de l'actuel ou de l'ancien chef de l'Etat. Mais alors qui ? On n'en voit qu'une qui pourrait émettre un tel point de vue : c'est Marine Le Pen, puisqu'elle veut être présente au second tour et affronter l'un des deux. Eh non, ce n'est pas elle, c'est ... Benoît Hamon, député socialiste, chef de courant et ancien ministre, qui n'en est pas à son premier coup d'éclat.

Un socialiste qui n'a pas envie que le président socialiste se présente à la prochaine élection présidentielle, c'est bizarre, non ? Et il a envie de voir quoi, le Benoît ? Il ne le dit pas, il ne sait peut-être pas. Ou bien, il pense à lui pour devenir prochain candidat et prochain président. Je crains que son costume soit trop petit pour la fonction. Mais pourquoi pas, chacun est libre de ses ambitions, même démesurées : alors, qu'il le dise, au lieu de tergiverser.

Benoît Hamon appuie sa déclaration sur un argument : la nouveauté. Il veut voir des têtes nouvelles, c'est ça son envie. Mais sa tête à lui, est-elle si nouvelle que ça ? Tant qu'à faire, s'il veut de la nouveauté, qu'il propose que le Parti socialiste présente un inconnu à l'élection présidentielle. Mais je ne garantis pas du résultat (on l'a vérifié dans des scrutins locaux).

Et puis, la nouveauté, c'est l'argument de ceux qui n'ont pas d'arguments. Vous vous souvenez de la formule du directeur de théâtre dans le film de Marcel Carné, "Les Enfants du paradis" : "La nouveauté, la nouveauté, c'est vieux comme le monde !" En 1981, les deux principaux candidats à la présidentielle étaient les mêmes qu'à la précédente, en 1974 : Mitterrand et Giscard. Personne alors ne songeait à s'en plaindre : ce n'était pas les hommes qui comptaient, mais les projets. Benoît s'en souvient-il ?

L'ancien ministre veut une primaire à gauche, comme la dernière fois. Comparaison n'est pas raison : quand la gauche n'est pas au pouvoir, il est légitime de départager ses différents candidats à travers la procédure de la primaire. Mais quand la gauche est au gouvernement, c'est le chef de l'exécutif qui naturellement la représente lors de l'échéance présidentielle. On n'imagine pas des socialistes s'affronter entre eux et s'opposer à la politique qu'ils pratiquent au sommet de l'Etat.

Le problème, le drame et la limite de Benoît Hamon, c'est qu'il n'est pas favorable à la politique actuellement menée et qu'il ne sait plus très bien où il habite et ce qu'il doit faire. D'où la déclaration absurde d'hier matin. Un socialiste normal et vraiment socialiste, comme moi, n'a qu'une seule envie : que le président socialiste soit le candidat socialiste. Quant au candidat de la droite, ce n'est pas à un socialiste de dire qui il a envie de voir, Sarkozy, Juppé, Fillon ou Bertrand.

En fin de compte, je me dis que la politique n'est pas une question d'envie, mais de cohérence avec soi-même et de fidélité envers les siens. Au fond, le problème d'Hamon, c'est sans doute ça.

5 commentaires:

T a dit…

"Le problème, le drame et la limite de"...
De quoi ?
De la possibilité de se représenter...
Le Benoît dont vous vous gaussez (il est de votre parti, non ?) est peut-être devenu aficionado du mandat unique non reconductible.
Un mandat reconductible, c'est un vrai problème car l'homme étant humain (la femme tout autant), rares seront ceux et celles qui ne songeront pas dès le début de leur mandat, bien plus à assurer leur réélection qu'à faire ce pour quoi on les a élus.

Anonyme a dit…

Euh....il est comment votre costume à vous?....pour asséner des jugements aussi définitifs.

Emmanuel Mousset a dit…

Je ne porte jamais de costume et je déteste les jugements incertains.

H a dit…

==> Je crains que son costume soit trop petit pour la fonction...
D'usage, il me semble, on reproche plutôt à quelqu'un qui vise une fonction trop élevée au jugé des capacités de l'homme en question, de vouloir s'habiller d'un costume trop grand pour lui.
Ici, le costume serait trop petit...
Ce serait donc que l'homme considéré aurait une stature plus grande que la fonction visée...

Emmanuel Mousset a dit…

Je parle de son costume à lui, trop petit, pas du costume présidentiel à endosser, a fortiori trop grand.