lundi 22 août 2016

Mon candidat, c'est Filoche



Arnaud Montebourg veut donc être président. Nous le savions avant de le savoir (lire le billet d'hier). Cet imprévisible est finalement très prévisible. Arnaud est néanmoins plein de talents : orateur brillant, esprit énergique, intelligence vive. Il ne lui manque qu'une qualité pour gouverner un pays : le sérieux. Montebourg est un hâbleur, un poseur : ça crève les yeux et surtout les tympans. Je ne le juge pas par humeur, il m'est plutôt sympathique ; je le juge sur pièces : de fait, il n'est pas sérieux.

Reprenons. Arnaud Montebourg se fait connaître il y a une vingtaine d'années, en dénonçant la corruption, en voulant quasiment mettre en prison Jacques Chirac, alors président de la République. C'est plaisant, mais c'est bouffon, ce n'est pas sérieux. Il y a dix ans, il créé son courant au sein du Parti socialiste, où quiconque veut réussir doit ouvrir une succursale, que Montebourg appelle, avec toute la modestie qui le caractérise, le NPS, Nouveau Parti Socialiste, vite tombé dans les oubliettes. Pas constant, Montebourg, pas sérieux.

Son dada de l'époque, c'est changer carrément de République, en fonder une VIe, comme on tourne la page du calendrier. Toujours la modestie, mais toujours pas le sérieux : notre histoire de France montre que les changements de régime se font lors des catastrophes nationales. A moins que Montebourg se considère lui-même comme une catastrophe ... Hier, dans sa déclaration de candidature, il a rappelé à notre bon souvenir son désir de bouleversement constitutionnel, en proposant ... le retour au septennat, simplement nuancé par la non reconduction du mandat. La révolution par la restauration, c'est du Montebourg tout craché, pas sérieux.

Que nous aura-t-il inventé ces dernières années, que nous a-t-il refourgué hier ? Le made in France à la marinière ! Tu parles, Charles ... C'est du de Gaulle en costume Petit Bateau, du Bayrou tout juste amélioré. Et Montebourg veut faire rêver la gauche avec ce matériel-là ? Pas sérieux, ce ministre d'Hollande qui finit par rejeter la politique qu'il a lui-même contribué à mettre en place. Pas sérieux, ce type qui se fait virer il y a deux ans du gouvernement, parce qu'il a abusé d'un bon mot et d'un verre en plein soleil d'août finissant, le plus dangereux sans couvre-chef. Pas sérieux, ce candidat à la présidentielle qui ne dit pas s'il sera candidat à la primaire. Pas sérieux, cet anti-libéral qui se donne comme principaux lieutenants deux anciens strauss-kahniens pas sérieux, Baumel et Kalfon (le sérieux consiste au moins à rester fidèle à ce qu'on a été).

Jamais sérieux, Montebourg, quand il se prétend très à gauche et soutient en 2007 Ségolène Royal, une sorte de Macron au féminin. Pas du tout sérieux quand, au lieu de rallier Martine Aubry au second tour de la primaire de 2012, il se range derrière François Hollande, alors que ses idées l'inclinaient à rejoindre la maire de Lille. Ce qui est bien avec l'absence de sérieux, c'est qu'il vient de loin et qu'on le voit donc venir.

A qui la candidature d'Arnaud Montebourg va-t-elle nuire ? A ceux qu'il est censé entraîner, l'aile gauche du Parti ! Il est beaucoup plus influent et séduisant que Benoît Hamon, Marie-Noëlle Lienemann et Gérard Filoche, mais il n'est pas du tout fiable, pas sérieux pour eux (je viens d'énumérer les pièces du dossier). J'ai dit hier que le débat interne à la gauche, dans le cadre de la primaire de décembre, était nécessaire, entre la social-démocratie et le socialisme traditionnel. Mais avec Montebourg représentant celui-ci, le débat sera biaisé, faussé, détourné. Avec Hamon, ce ne sera guère mieux. En politique, il faut pousser un clivage à bout : reste Lienemann et Filoche, pour l'instant.

La première est une catho de gauche un peu rasoir, un peu bonne sœur ronchon, le second est un inspecteur du travail tonitruant, haut en couleur, fort en gueule et en convictions : j'en sais personnellement quelque chose, j'ai débattu avec lui en 2005, à Festieux, pendant la campagne sur le Traité constitutionnel européen. Le bon candidat pour un franc débat, c'est Gérard Filoche. Le meilleur représentant de l'aile gauche, parce que le plus direct et le plus clair, c'est lui. J'ajouterais que c'est un personnage attachant, au parcours personnel peu conventionnel. Un anti-Montebourg qui fera un parfait anti-Hollande. C'est mon candidat pour la gauche du parti, mais je voterai bien sûr Hollande. Pas question de n'être pas sérieux, comme qui vous savez.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

euh à Festieux, j'y étais, vous n'avez rien débattu du tout car vous avez été chahuté par des ( vieux il est vrai )militants PS agacés par votre ton professoral genre "je sais tout du socialisme"; ravivez donc votre mémoire

Emmanuel Mousset a dit…

Des vieux cons, il y en a partout, même chez les socialistes. Leur administrer une leçon n'est pas une mauvaise chose en soi.

Un soutien à filoche a dit…

Du coup vous allez soutenir Filoche pour la primaire ? J'en doute d'après vos convictions donc j'ai sans doute mal compris l'article.

Emmanuel Mousset a dit…

Non, vous n'avez pas MAL compris ; vous n'avez RIEN compris. Pas grave : une relecture s'impose, réfléchie cette fois-ci.