mercredi 24 février 2016

Le fiel et la fidélité



Martine Aubry et quelques autres ont signé une tribune dans Le Monde paru aujourd'hui. C'est une déclaration de guerre au gouvernement, un acte d'opposition clair et net. Ce qui est reproché à François Hollande et à son équipe est sans nuance : "un affaiblissement durable de la France". Un responsable de droite n'aurait pas dit mieux (ou pire, c'est selon). Ce brûlot est rempli de points d'exclamation. C'est de la mauvaise littérature de congrès, d'une pauvreté politique consternante. Son seul mérite, c'est l'absence d'ambiguïté : Martine Aubry et ses amis ont quitté la majorité présidentielle.

Que propose Martine Aubry ? Rien. Se pose-t-elle en possible alternative ? Non. Où débouche cette démarche ? Nulle part. Trop, c'est trop, en effet : en 2012, Martine Aubry refuse d'entrer au gouvernement, renonçant à participer à l'effort collectif. En 2015, elle refuse de prendre la tête de la liste régionale, laissant aller au casse-pipe son second. Au dernier congrès socialiste, elle soutient la motion majoritaire, et pas l'aile gauche ou les frondeurs. Aubry, c'est n'importe quoi. C'est surtout celle qui, au lieu de mettre les mains dans le cambouis, préfère remuer la merde.

Les signataires de ce pamphlet antigouvernemental n'ont rien en commun : Aubry, Hamon, Cohn-Bendit, quelle cohérence politique ? Aucune. Aubry est une social-démocrate contrariée, qui ne s'assume pas. Hamon est un gagne-petit de la politique, qui gère une arrière-boutique, un sous-courant, un fond de commerce. Cohn-Bendit, qui a ma sympathie, est surtout Cohn-Bendit, c'est-à-dire quelqu'un qui n'a jamais été socialiste. Où voulez-vous qu'on aille avec un tel attelage ?

Cette mise en accusation porte sur quatre chapitres. Contre le pacte de responsabilité, la première grande mesure du gouvernement, au début de ce quinquennat : et c'est maintenant qu'Aubry vient nous dire que c'est pas bien ? Contre la réforme du Code du travail : celle-ci n'a même pas été présentée en Conseil des ministres, ni discutée au Parlement, que déjà Aubry tire à boulets rouges dessus. Contre la déchéance de nationalité : moi aussi je suis contre, mais il fallait bien que quelqu'un tranche ce débat, qui ne pouvait être que le président de la République, et pas le maire de Lille. Contre l'accueil trop restreint des migrants : moi aussi, je le déplore, mais contrairement à Aubry, je ne cherche pas à régler des comptes avec le chef de l'Etat, le gouvernement et la direction du Parti socialiste. La différence entre Aubry et moi, tous deux socialistes pourtant, c'est la différence entre le fiel et la fidélité.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Les 35 heures, c'est martine. Que faisait alors Hollande ?
Il songeait déjà à détricoter ?

GD a dit…

"La différence entre Aubry et moi, tous deux socialistes pourtant, c'est"...
Qu'elle est un(e) éléphante(e)...
Et vous, non, un simple et quelconque godillot, toujours d'accord avec ce que dit et fait le chef...
Un jour, il faut savoir ouvrir les yeux et constater...
Elle en a mis du temps, l'Aubry, pour publiquement observer que le gouvernement actuel, tout socialiste qu'il se veut, gouverne à droite.
Cela peut nous rappeler Gladstone et Disraeli en Grande Bretagne à l'avant-dernier siècle...
Celui de droite gouvernait plus à gauche que celui de gauche qui, une fois au pouvoir, gouvernait à droite...
Pour se maintenir sans doute...

Anonyme a dit…

Vous tirez sur Martine mais le fond du problème c'est la politique actuelle de ce gouvernement. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle va contre courant de ce qu'on peut attendre d'un gouvernement de gauche.

Emmanuel Mousset a dit…

1- Mais qu'avez-vous contre les godillots ? Ce sont de bonnes et solides chaussures de marche, qui permettent d'aller loin. Quant à la politique du gouvernement, je suis d'accord avec. Je ne vais quand même pas dire le contraire, rien que pour vous faire plaisir !

2- Quand je tire sur Aubry, notez bien que c'est de la légitime défense !

Philippe a dit…

" les godillots"
utilisé par de Gaulle pour évoquer symboliquement ses fidèles est un terme militaire.
Si mes souvenirs sont bons il s'agissait de ceux qui étaient passés de l'Algérie française à l'Algérie algérienne sans problèmes particuliers.
Les vrais godillots il fallait les choisir d'occasion c'est à dire déjà utilisés par un autre trouffion libéré des ses obligation comme on disait.
A la première marche de nuit avec des godillots neufs le lendemain c'est l'infirmerie !
Donc en effet notre ami blogueur me semble avoir l'âge et les dispositions psychologiques illustrant symboliquement LE GODILLOT ...
Il vient de rétropédaler de DSK/Aubry (les 35 heures) à Hollande (le néant)