samedi 29 août 2015

Macronscopique



"[La gauche] a pu croire, à un moment, il y a longtemps, que la politique se faisait contre les entreprises ou au moins sans elles, qu'il suffisait de décréter et de légiférer pour que les choses changent, qu'il n'était pas nécessaire de connaître le monde de l'entreprise pour prétendre le régenter, que la France pouvait aller mieux en travaillant moins. C'était une fausse idée". Voilà la phrase banale, évidente, déjà énoncée, qu'Emmanuel Macron a prononcée devant l'université d'été du Medef, et qui a provoqué un tollé, un cataclysme, un scandale, dans la classe politique, chez les commentateurs, faisant la une des journaux du matin. Une telle réaction, disproportionnée, que n'excuse pas le vide de l'actualité estivale, en dit long sur la vacuité de notre débat politique, sa surmédiatisation, son absence de mémoire et son goût devenu immodéré de la polémique inutile (pléonasme).

La réhabilitation de l'entreprise par les socialistes date de l'année 1984, avec la formation du gouvernement Fabius, sous le slogan de "la France qui gagne" : 31 ans, excusez du peu ! Depuis, aucun pouvoir de gauche n'est revenu là-dessus. Avant, avec le socialisme des années 70, la grande entreprise était vouée à un seul destin : la nationalisation, fer de lance du Programme commun. Voilà le rappel, anodin et indiscutable, de Macron, au long d'un discours beaucoup plus vaste. Quant aux 35 heures, il n'en a nullement été question, quand on veut bien relire honnêtement son intervention.

Oui, mais ce bout de phrase sur la France qui croyait pouvoir aller mieux en travaillant moins ? Le ministre de l'Economie et des Finances vient d'une formation intellectuelle que je connais bien, qui ne pratique pas le sous-entendu, l'ambiguïté calculée ou le message subliminal : c'est l'école philosophique du mot juste, du fait précis et du propos cohérent. Si Emmanuel Macron était contre les 35 heures, souhaitait leur abrogation ou leur modification, il aurait dit haut et fort, très clairement, qu'il était contre les 35 heures, favorable à leur abrogation ou à leur modification. Il ne l'a pas dit : alors, arrêtons-là la mousse des commentaires, des décryptages et des interprétations.

Les 35 heures ont-elles été faites pour que la France travaille moins, que notre économie paresse, que nos entreprises freinent leur développement ? Une certain droite de mauvaise foi le prétend, mais c'est tout le contraire qui est vrai : la loi Aubry avait pour objectif de remettre la France au travail, de favoriser les créations d'emplois, de relancer la dynamique économique. On peut être d'accord ou pas, mais qu'on ne fasse pas croire que les 35 heures auraient pour logique le farniente, qui n'a pas besoin de ça. Dans une France qui souffre d'un terrible chômage de masse, où l'emploi précaire est fréquent, où bien des salariés sont mal rémunérés, Emmanuel Macron a eu parfaitement raison de rappeler que c'est par le développement des entreprises et du travail que notre pays pourra s'en sortir, en parfaite adhésion avec la ligne politique du gouvernement.

4 commentaires:

C a dit…

Les 35h d'AUBRY et STAUSS-KAHN ont créé indubitablement 660 000 emplois en quatre ans...
La diminution du temps légal hebdomadaire de présence au travail aurait peut-être pu se faire mieux mais n'est pas la cause du chômage dans notre pays... Faut chercher ailleurs !

MF a dit…

Emmanuel quid de"faisons vivre l'utopie"?si tu en as le temps ( en cette période de rentrée) je serai intéressè de ton opinion;merci

Emmanuel Mousset a dit…

Je ne sais pas trop ce que l'utopie veut dire. Du rêve, peut-être, ou une société idéale. Mais ce que les gens veulent, c'est du boulot, une retraire convenable, des salaires corrects. Et ça, c'est la politique.

citoyen MF a dit…

ben oui..mais sans rêve que devient-on sinon des(con)sommateurs et rien d'autre? tu es, c'est patent un libéral qui accepte que "ce que les gens veulent, c'est du boulot, une retraite convenable, des salaires corrects" alors va plus loin et précise qu'est que du boulot( n'importe lequel, à n'importe quelles conditions?),qu'est-ce qu'une retraite convenable? qu'est-ce qu'un salaire correct? tu te défausses sous les mots ( ça fait démago non? qui pourrait être contre tes propositions? assurément personne de l'extrême gauche à l'extrême droite) et en fait tu ne réponds à rien