samedi 1 août 2015

Un moment d'hystérie collective



C'était il y a une bonne semaine, dans un parc, à Reims. Il faisait beau, beaucoup de soleil, les gens bronzaient sur les pelouses, des jeunes filles en maillot de bain. L'une d'entre elles a été interpellée par un petit groupe, de façon agressive : une "embrouille" entre filles, comme disent les jeunes. Un incident désagréable, mais assez banal, mineur, avec cependant suffisamment de violence pour en rendre compte devant la justice. Le fait divers aurait pu, aurait dû rester un fait divers, si notre société n'était pas malade d'elle-même, de sa xénophobie ancienne, actuelle, latente, refoulée, qui ne demande qu'une occasion pour se laisser aller, pour éclater. L'occasion toute trouvée, c'était il y a une semaine, dans un parc de Reims, sous un beau soleil, une altercation dont le motif demeure inconnu, comme c'est souvent le cas dans ce genre d'incident, où un regard, une remarque suffisent à mettre le feu.

L'internet a grossi, déformé et répandu l'affaire, la grenouille se transformant en boeuf, avant de faire plouf, quelques jours après. En attendant, le mal était fait. Mais le racisme est là pour ça : faire du mal, faire mal. Cette "Toile" grouille de petites araignées, via les blogs, les sites, les réseaux de toute sorte. Ce n'est pas beau à voir ni à lire. Réseau social ? Non, réseau asocial, où le narcissisme, les phobies, les petites saloperies individuelles se démultiplient à la puissance 100, à la puissance 1 000, et beaucoup plus. C'est le royaume du mensonge, de la manipulation, des coups bas et des désirs en dessous de la ceinture.

Dans l'agression de Reims, tout était faux, inventé, exagéré. La sale histoire nous racontait que la jeune fille en maillot de bain avait été violentée à cause de sa tenue légère, par d'autres jeunes filles évidemment musulmanes. Les racistes avaient la trique : pensez donc, la charia en plein cœur de Reims, la ville du sacre des rois de France transformée en base arrière de Daesh, avec la complicité de quelques voyoutes de banlieue. Des terroristes femelles allaient bientôt obliger nos femmes à porter le maudit voile, de la tête aux pieds. Pour le xénophobe, c'est l'orgasme ! Il imagine dans sa pauvre tête ses misérables cauchemars, qui vont lui faire peur et le faire jouir.

Si les jeunes musulmanes de France devaient s'en prendre à quiconque montre son cul dans la rue, en vrai ou en photo, ce sont des milliers d'attentats à l'impudeur qui auraient lieu chaque jour dans notre pays ! Mais, que voulez-vous, un raciste, ça ne réfléchit pas, ça ne cherche qu'à satisfaire ses fantasmes, ses obsessions, ses pulsions. Le contraste entre le maillot de bain et la burka est parfait pour sa petite tête. L'extrême droite en a fait ses choux gras, bien gras, comme un étron au fil de l'eau. Une manif a même été organisée sur place, dans le parc ... où presque personne ne s'est déplacé. Le raciste veut bien cracher son venin sur la Toile, mais pour apparaître à visage découvert, c'est autre chose ...

Le plus stupéfiant dans cette séquence d'hystérie collective, c'est que l'une des premières structures à s'en mêler et à l'alimenter a été ... SOS racisme. Oui, vous n'en revenez pas, comme moi : l'association chargée de dénoncer le racisme a contribué à sa diffusion ! Comment expliquer cette folie ? Je crois qu'une partie de la gauche est littéralement traumatisée et tétanisée par le discours faussement laïquard du Front national. Elle ne veut pas se laisser déborder sur ce terrain-là, elle en rajoute lorsqu'il lui semble qu'une pression sur les personnes a pour motif une croyance religieuse. Dans l'affaire de Reims, les antiracistes ont voulu se montrer d'intransigeants laïques, pour que ce rôle ne soit pas abandonné à l'extrême droite. Sauf qu'ils se sont trompés, complètement trompés, et que leur erreur est grave, très grave (le responsable de SOS racisme a d'ailleurs démissionné).

De la fiction rémoise, la gauche doit tirer des leçons. Le véritable problème en France, ce n'est pas la présence de musulmans, mais la présence de xénophobes, qui mettent à mal le vivre ensemble, qui portent atteinte au pacte républicain. Ce sont eux nos adversaires, ce sont eux qu'il faut combattre. Ce n'est pas la laïcité qui est menacée, ce sont les valeurs républicaine de liberté, d'égalité et de fraternité, par les tenants de l'intolérance, de la discrimination . Il y a l'hystérie calculée, électoraliste du Front national ; mais il y a aussi l'hystérie spontanée, angoissée qui vient d'en bas, de très bas, de la base, qui doit être tout autant dénoncée et combattue. La sinistre affaire de Reims, désormais close, en a été l'illustration.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Vous semblez très informé , mais c'est pas jugé !! Alors ??

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Emmanuel Mousset a dit…

L'information est à la portée de n'importe qui, réfléchissant un peu. L'hystérie collective est jugée et condamnée, sans appel.

Anonyme a dit…

Les religions du Livre sont le mal absolu.
La France est un des seuls pays à avoir pris nettement ses distances avec sa religion ex d'Etat.
Ceux que vous appelez xénophobes sont peut être des personnes ayant peur de retropédaler à l'époque de leurs ancêtres même si cela n'est pas clairement formulé par eux.
Une tête accrochée récemment à un grillage ... me semble assez symbolique du sort futur réservé aux mécréants.
M'en fout je ne serais plus de ce monde !

Emmanuel Mousset a dit…

Le mal absolu, c'est le crime, pas la religion.

Anonyme a dit…

Religions (j'y englobe les cultes athées des chefs) = dogmatisme = in fine haine de ceux qui ne pensent pas comme moi et leur mort.

Anonyme a dit…

Il s'agit, au début de cette "affaire", de l’inexpérience d'un "journaleux" de l'Union,tout fier en cette période de vacances,de tomber sur un sujet vendeur comme on dit en publicité.Ah la folie de l'information à tout prix ,Il y a eu un démenti du quotidien mais comme disait Lazareff- pour les plus jeunes un grand patron de presse des années 50/60( je cite de mémoire): une information + un démenti ça fait deux informations...

Emmanuel Mousset a dit…


Air bien connu : c'est la faute à la presse. Ce qui permet à tout le monde d'échapper à ses responsabilités.

Anonyme a dit…

en partie quand même non? car le départ vient bien de là ce qui n'excuse en rien "l'hystérie" qui a suivi