lundi 9 mars 2015

PS contre FN



Depuis quelques jours, Manuel Valls se comporte, plus que jamais, en chef de la majorité et en chef de guerre. A deux semaines du scrutin départemental, cette montée en puissance est heureuse. Le Premier ministre prouve une fois de plus qu'il est un grand politique : il est maître du langage, ses expressions font mouche, l'adversaire ne peut pas s'empêcher de réagir. "Apartheid" et "islamo-fascisme" avaient déjà atteint leur cible ; "angoisse" et "peur" traduisent à la perfection les sentiments qui nous envahissent à la lecture des sondages, faisant à nouveau de l'extrême droite le premier parti de France, à la stupéfaction des autres démocraties dans le monde.

Tactique ? Dramatisation ? Oui, et c'est très bien ainsi, car le combat politique l'exige. Manuel Valls a désigné l'ennemi à abattre (électoralement) : le Front national. Il fallait en finir avec l'indulgence, la respectabilité dont bénéficie depuis quelques années ce parti xénophobe, nationaliste, autoritaire et antirépublicain. Le danger que représente le FN a été sous-estimé, relativisé, dédiabolisé : voilà la raison de son succès. Au lieu de fascisme, on a parlé de populisme, un terme beaucoup plus soft, acceptable. Avec Manuel Valls, les mots justes sont de retour, le déni de réalité prend fin. Le Premier ministre a dénoncé avec raison "une étrange accoutumance", "l'endormissement généralisé" qui ont assuré à l'extrême droite une forme de protection. C'est maintenant fini : feu sur la bête !

Avant, l'élection cantonale était un scrutin pépère, où des notables ou des aspirants à la notabilité faisaient la tournée des bleds pour discutailler sur un trou à boucher d'une route, un préau de collège à installer ou une rallonge de subvention à octroyer. A l'heure où l'extrême droite cherche à s'implanter, il faut politiser la campagne, "arracher" les électeurs à ses mâchoires, pour reprendre le terme fort pertinent et percutant du président de la République. Et puis, ne nous leurrons pas : dans 10 ans, le Conseil général aura disparu ou ne sera plus qu'une coquille vide. Il est révélateur que bien des politiques s'engagent plus aujourd'hui dans la bataille des régionales que des départementales : l'avenir est dans cet échelon supérieur, auquel on va transférer progressivement les pouvoirs.

J'entends dire que c'est le PS qui ferait monter le FN : mensonge et malhonnêteté ! Ce qui fait monter n'importe quel parti, ce sont uniquement les électeurs. Il faut beaucoup de vice pour prétendre que les premiers adversaires de l'extrême droite seraient ses meilleurs soutiens ! Se renvoyer la patate chaude est la pire des attitudes : je ne me permettrais jamais d'accuser par exemple l'UMP de faire le jeu du FN. Ce parti n'a pas besoin d'un autre parti pour prospérer et gangréner la République. Dans les 15 jours qui nous séparent du premier tour du scrutin, il serait bon que se multiplient les coups d'éclat contre le Front national, pour dissuader l'électorat de voter pour lui. A Saint-Quentin, une opération mieux anticipée et mieux organisée que le petit rassemblement contre la venue de Le Pen serait hautement souhaitable. PS contre FN, sans relâche. Sinon, ce sera le FN devant le PS.

6 commentaires:

Erwan Blesbois a dit…

Mon cher Emmanuel cette société ne peut plus sombrer que dans le chaos. Le FN est le symptôme mais le mal est beaucoup plus profond. Il n'y a plus de lien social, sans doute à cause d'un déficit de religion, la république est caduque, elle est trop élitiste par essence et donc exclusive, elle va mourir de sa belle mort. Y-a-t-il des solutions ? Il y a bien l'hypothèse houellebecquienne d'une société fondée sur la religion. Les gens n'en peuvent plus, ils sont à bout de nerf. Soit heureux Emmanuel d'avoir la foi en la cause de la république, tu te battras jusqu'au bout je le sais, et en plus ce beau combat te servira d'épitaphe, mais il y aura des victimes, beaucoup de victimes, comme à chaque fois qu'une civilisation s'effondre, car cet effondrement est absolument inéluctable.

Emmanuel Mousset a dit…

La journée commence bien !

Erwan Blesbois a dit…

La journée commence par un arrêt maladie, qui va durer je ne sais combien de temps d'où mon ton apocalyptique. J'en ai assez du visage, des paroles de mes congénères. J'en ai assez de devoir prendre des neuroleptiques et des tranquillisants pour pouvoir tenir dans mon travail, j'en ai assez d'être une victime, un fantôme. J'en ai assez de la haine que se vouaient mes parents et qu'ils me vouaient par ricochet, j'en ai assez de la haine.
L'amour Emmanuel, c'est l'amour la denrée la plus rare, c'est elle qui fait les plus grands succès et qui signe les plus grands échec, comme cette denrée rare est très mal partagée, le monde est rempli d'injustice. Kaufman disait que les chrétiens mettaient la vérité, la tête à l'envers. Je pense qu'elle se trompait, je pense que les chrétiens essayaient de partager l'amour, qu'ils essayaient de transmettre des valeurs au plus grand nombre, ce qu'est impuissante à faire la république, qui creuse toujours plus profondément le fossé entre les heureux, les élus et les autres, la grande majorité, les égarés, les errants, les fantômes. En plus la république ne fait qu'idolâtrer ses vaches sacrées, c'est-à-dire ses élus, elle sacralise la réussite : ah! heureux les heureux et malheureux les malheureux. La république n'aime pas tous ses enfants, les gens le sentent, ils n'en veulent plus. Comme la république est sur la défensive, comme le fut l'église naguère, elle se recroqueville, elle devient intransigeante, pas à la façon de ses débuts révolutionnaires ; mais à la façon d'une organisation en voie de décomposition, qui exacerbe encore plus les antagonismes, au lieu de chercher à dénouer les situations. Evidemment le libéralisme économique porte une responsabilité écrasante dans ce naufrage, qui redistribue si mal le fruit du labeur des hommes, qui est une composante de l'amour que l'homme se porte à lui-même et aux siens. Si l'amour que l'homme se porte à lui-même et aux siens est bafoué par le mode d'organisation économique de redistribution, alors on va fatalement vers la chaos. Et si la composante de gauche de la république choisit ce mode injuste de redistribution des richesses toujours vers les élus minoritaires, comme si c'était plus une fatalité qu'une nécessité ; alors il n'y aura plus d'alternative, et la gauche portera une lourde responsabilité dans la décomposition du lien social, donc dans l'effondrement final du mode d'organisation social et politique que nous connaissons : la république.

Emmanuel Mousset a dit…

Bon, je vois que ça ne s'arrange pas ...

Anonyme a dit…

la faute a qui!!!
cher Emmanuel mousset ouvre les yeux! tu devrais savoir que si le fn arrive en tète de tout les sondages depuis quelques mois c est bien évidemment grâce a tout les politiques véreux de droite et de gauche qui sont toujours mis en examen mais jamais inquiété.

Emmanuel Mousset a dit…

Evidemment, si vous reprenez la rhétorique de l'extrême droite ...