mardi 4 juillet 2017

Sérieux. Concret. Fidèle. Ouvert



Comme hier avec le président de la République, j'ai suivi aujourd'hui intégralement le discours de politique générale du Premier ministre, en me laissant aller à mes impressions. D'abord, changement de décor : on a beau s'appeler Palais-Bourbon, ce n'est pas Versailles, et le Premier n'est pas le président. Pas de silence respectueux, d'écoute attentive : la déclaration est très souvent saluée par des applaudissements (rarissimes hier) et parasitée par des commentaires à haute voix, des interpellations ou des vannes qui se croient drôles. C'est le folklore parlementaire, celui des grandes gamelles, qui vocifèrent dans l'hémicycle et se réconcilient à la buvette, autour d'un verre de blanc ou de rouge. Franchement, on pourrait se passer de ce cirque inutile et désormais grotesque.

Quatre mots me sont venus à l'esprit en regardant et écoutant Edouard Philippe :

Sérieux. Je ne sais pas si c'est la barbe et les lunettes qui donnent cette impression-là. Il y a aussi cette voix posée. Un timbre joue beaucoup pour asseoir un personnage. Philippe ne cherche pas à séduire : il est là pour faire le job, le mieux qu'il peut. Cela se sent. Derrière le chef du gouvernement est toujours présent le maire du Havre, ville ouvrière, anciennement communiste. Un homme qui a les pieds sur terre, un type qui bosse. Sérieux.

Concret. Durant l'intervention du Premier ministre, il fallait quand même s'accrocher. Hier, avec le président, on se laissait porter. C'est que les deux hommes sont sur des registres différents, et ceux qui avaient dénoncé une "humiliation" du Premier ministre en sont pour leurs frais : on a bien vu, hier et aujourd'hui, que chacun était dans le rôle que lui attribue la Constitution, complémentaire et non pas concurrent. Edouard Philippe a égrené une liste de mesures précises, alors que le président dressait les lignes générales de l'action gouvernementale.

Fidèle. Pour qui connaît bien le programme d'Emmanuel Macron, annoncé publiquement depuis environ six mois, il n'y a aucune surprise, aucune découverte : tous les engagements se retrouvent dans la déclaration de politique générale. Cette continuité est importante : il faut en finir avec le déplorable sentiment des "promesses non tenues". Si certaines réformes, très peu, sont ajournées, c'est que le récent rapport de la Cour des comptes est venu compliquer la situation. Mais qui peut croire qu'on gouverne un pays, une économie dans la certitude absolue de ce qui va arriver ?

Ouvert. Je n'ai senti chez Edouard Philippe, à aucun moment, un esprit autoritaire qui voudrait imposer quoi que ce soit. C'est la grande différence avec Manuel Valls et ses coups de menton (malgré toute l'estime que je porte à l'ancien Premier ministre). Philippe tient à faire appliquer ce que le suffrage universel a validé à travers l'élection de Macron. Mais la mise en œuvre des réformes se fera dans la concertation. C'est aussi cet esprit d'ouverture que j'ai senti cet après-midi. Un exemple : l'emblématique réforme du code du travail, à laquelle le président de la République tient beaucoup, a été évoquée aujourd'hui sans ostentation ni provocation. Il faut espérer qu'elle suive son chemin dans une même sérénité.

Voilà. Macron hier, Philippe aujourd'hui : c'est parti, en marche maintenant pour cinq ans !

21 commentaires:

Anonyme a dit…

Il ne faut pas comparer Walls et Philippe sur.."l'autoritarisme". Le premier était entravé par des frondeurs irresponsables, le second dispose d'une belle majorité à priori solide. Walls a fait beaucoup dans un contexte difficile, Philippe est prometteur, souhaitons lui de faire encore mieux!

Erwan Blesbois a dit…

Il est absolument évident que la loi travail va poursuivre son chemin dans la même sérénité, et qu'il n'y aura ni contestation ni provocation dans le camp adverse c'est-à-dire celui des salariés. Parce que la France est désormais totalement cadenassé par le dogme du politiquement correct et que tous les postes de pouvoir et d'esprit sont occupés par des Hommes qui partagent la même idéologie libérale, des clones en quelque sorte. La révolte, si jamais un jour elle avait lieu, ne pourrait venir que de l'écroulement du système provoquée par une catastrophe boursière ou encore une catastrophe écologique, donc rien n'est perdu. Courage les esclaves, vous qui consentez à votre servitude volontaire, au nom du "plus jamais ça !" (communisme ou fascisme). Mais c'est autre chose qui va vous arriver, une dystopie où le régime politique sera répressif et autoritaire et où l'économie continuera à être toujours plus dérégulée. Le régime actuel est déjà un genre de totalitarisme "doux" idéologique, où toute pensée déviante est assimilée à une forme de fascisme populiste, qu'il soit de droite (Marine Le Pen), ou de gauche (Jean-Luc Mélenchon).

J D a dit…

"du Havre, ville ouvrière, anciennement communiste"...
Au Havre, il y a un boulevard dédié à Durand...
Ouvrier...
Salacrou (du Havre itou) a écrit une pièce : "Boulevard Durand".
J'ai vu cette pièce en 1962 ou à peu près.
C'est indélébile.
Mais Le Havre d'aujourd'hui a t-il encore quelque chose à voir avec celui d'alors ?
Et Edouard Philippe avec Armand Salacrou ?

Emmanuel Mousset a dit…

Totalitarisme "doux" ? Voilà un jugement encore trop nuancé, trop indulgent ...

Philippe a dit…

oui ... mais ... ( "MAIS" comme l'aurait dit notre plus ancien EX) : peu de citoyens croient actuellement au baratin politicien !

Des actes positifs pour la majorité des citoyens SVP SVP SVP ...................

http://actu.orange.fr/france/seul-un-francais-sur-4-convaincu-par-les-discours-de-macron-et-philippe-CNT000000KGiN0.html

Qui y croient ... ben ... finalement le nombre des électeurs macronistes "de conviction" (jusqu'à ce qu'ils en changent), ceux du premier tour des Présidentielles !

Anonyme a dit…

Il ne doit pas y avoir beaucoup de boulevards ni même de rues dédiés à des ouvriers, que ce soit en France ou ailleurs...

Emmanuel Mousset a dit…

Vous êtes bien pessimiste. C'est de votre âge ...

Emmanuel Mousset a dit…

Ma dernière remarque s'adresse bien sûr à Philippe.

Erwan Blesbois a dit…

Evidemment que ce n'est que justice que Simone Veil entre au Panthéon, par delà son œuvre, pour le symbole qu'elle représente, femme et juive déportée à Auschwitz. Concernant l'œuvre, j'aurais préféré que ce soit l'autre Simone Weil qui entre au Panthéon, afin que les gens redécouvrent l'œuvre de cette immense philosophe.
Simone Weil fait le constat d'un profond déracinement de la France. Les causes essentielles en sont le matérialisme et le manque d'éducation. Le déracinement est une grave défaillance sociale et une dramatique déchéance morale qui débouche sur l'irresponsabilité et l'idolâtrie. Ce sont les sources du totalitarisme. Simone Weil incite à retenir les leçons de l'histoire.
Elle souligne que : « L’enracinement est peut-être le besoin le plus important et le plus méconnu de l’âme humaine. C’est un des plus difficiles à définir. Un être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l’existence d’une collectivité qui conserve vivants certains trésors du passé et certains pressentiments d’avenir. […] Chaque être humain a besoin d’avoir de multiples racines. Il a besoin de recevoir la presque totalité de sa vie morale, intellectuelle, spirituelle, par l’intermédiaire des milieux dont il fait naturellement partie ».

Philippe a dit…

c'est exact !
Je faisais en effet la même remarque à mon père dcd à 96 ans qui avait commencé sa vie de citoyen dans les tranchées de 14/18.
Je le trouvais pessimiste.




Erwan Blesbois a dit…

Philippe, les gens n'avaient qu'à voter. Mais comme Mélenchon et Le Pen leur répugnent bien plus que Macron, face au péril rouge-brun ils ont laissé un boulevard à Macron qui a été élu triomphalement malgré le record d'abstention. L'abstention a déjà été oubliée par la plupart, et le triomphe de Macron est le seul fait qui compte désormais.
On en a pour cinq ans, où ce que vous appelez "la majorité des citoyens" ne comptera pas, et que Macron considèrent avec mépris comme du néant, comme des "riens" (c'est-à-dire les gens ordinaires) sur le quai d'un gare qu'il compare à la situation actuelle de la France, ce qu'ils sont effectivement par manque de courage politique et parce qu'ils vivent sous influence. A défaut de religion et de spiritualité, seule compte la morale commune que diffusent ceux qui ont eu la force de se hisser à une certaine hauteur socio-professionnelle, pour imposer aux gens ordinaire une forme de culpabilité liée au "plus jamais ça !" Soit que ces élites le fassent par réelle conviction, comme je le pense c'est le cas d'Emmanuel Mousset, soit qu'il le fassent par cynisme, pour en retirer des privilèges liés à leur situation de pouvoir.
Cette majorité de citoyens ordinaires n'aura qu'à s'en prendre à elle-même. Seuls comptent les 18% environ d'électeurs parmi les électeurs inscrits qui ont accordé avec conviction leur confiance à Macron, notamment au premier tour des présidentielles, 18% parmi lesquels certains l'ont fait par réel opportunisme, comme une occasion à saisir pour monter les échelons. Vous n'avez pas compris que Macron est un très pur "Prince", tel que décrit par Machiavel, qui accomplira son programme avec le plus grand cynisme, c'est-à-dire en considérant que dans tout acte politique la fin justifie les moyens. Les moyens pour l'instant c'est essentiellement attiser la culpabilité quant à toute action contre le pouvoir, en assimilant ces actions à des formes de provocations populistes, c'est-à-dire d'inspiration rouges-brunes.

Anonyme a dit…

On ne peut que se réjouir que vous nagiez ainsi dans le bonheur après les deux derniers billets complètement hagiographiques que vous venez de produire.
Ca ne vous est jamais arrivé il me semble.

Emmanuel Mousset a dit…

Il vous semble mal. Je cite régulièrement sur ce blog le mot de Voltaire : "J'ai décidé d'être heureux parce que c'est bon pour la santé".

Anonyme a dit…

Vos billets ne donnent vraiment pas le sentiment que vous soyez heureux très souvent.
Mais alors vraiment pas du tout....

Emmanuel Mousset a dit…

Méfiez-vous de vos propres sentiments avant de juger ceux des autres.

Anonyme a dit…

Pourquoi vous n'exprimez pas de sentiments vous ?

Philippe a dit…

On confond souvent pessimisme et réalisme.
En fait je ne suis pas pessimiste tout comme mon père ne l'était pas.
Le réalisme n'interdit pas la joie de vivre ... car il permet souvent d'éviter de s'investir pour des causes qui ne nous concernent pas ou de partir comme on dit dans des « galères ».
Mitterrand disait qu’il était le dernier des Présidents d’un pays qui s’appelait la France.
Il évoquait les divers renoncements aux divers aspects de la souveraineté au fil du temps.
Depuis sa Présidence nous n’avons sans doute que des gouverneurs/pachas d’une contrée bizarre qui fait un peu chimère en ce sens qu’elle est à la fois militairement un protectorat direct de l’Empire militaro-industriel US et économiquement de même mais indirectement par le biais de la Commission Européenne.
Ceci est valable pour l’ensemble des « pays » de l’Occident Européen.
Mais … ce n’est pas triste … car les USA sont la créature engendrée par nos migrants, en général des très pauvres !
Faites des généalogies sérieuses de vos familles et vous verrez pour nombre d'entre vous que l’on se sent très vite en « famille » ! Mes arrières grands parents ont plus de descendants aux USA qu’en France et je ne suis pas le seul dans ce cas !!!!
et puis les guerres imbéciles et cruelles (en crescendo 1870, 1914, 1940) ce n’est pas notre créature américaine qui les a déclenché !
Redescendez sur la Terre, nous avons rétrogradé depuis longtemps !
Tout cela pour replacer le gouverneur/pacha Macron dans sa réelle dimension.
Exercice qui m’amuse beaucoup !

Anonyme a dit…

"Panthéon,Panthéon,est-ce que j'ai une geule à résider post-mortem au Panthéon ?"
Est-il absolument nécessaire que certaines "gloires" nationales soient désignées pour finir là ?
Le mode de désignation étant en lui-même un "problème" préalable.

Emmanuel Mousset a dit…

Albert Camus, via sa famille, n'a pas voulu. Il faut dire que le sous-sol est lugubre.

Anonyme a dit…

Comme chaque été je pense à tous ceux qui vont travailler dur pendant deux mois.Avec des salaires dérisoires et la menace des petits chefs.ca vaut aussi pour la fonction publique territoriale ou les congés sont limites à quinze jours,(Utas dipas)

Emmanuel Mousset a dit…

Puisque vous êtes dans les pensées, je me permets d'ajouter les miennes aux vôtres : elles iront aux 3 millions de chômeurs, qui n'ont même pas la chance d'avoir des salaires, des chefs et des congés payés.