lundi 12 décembre 2016

Le candidat du pouvoir d'achat



Dans les multiples propositions avancées samedi par Emmanuel Macron, il y en a une qui touche à un tabou : la question du pouvoir d'achat. Avec les déficits publics et le manque de compétitivité de notre économie, l'augmentation du pouvoir d'achat n'est plus à l'ordre du jour. Les fameux "coups de pouce" du SMIC n'avancent pas beaucoup, les salaires des fonctionnaires ont été bloqués pendant des années. Qu'est-ce qu'on peut donc faire pour le pouvoir d'achat ?

En 2007, Ségolène Royal, qui a bien des points communs avec Emmanuel Macron, a été la première à briser ce tabou, à relancer le débat sur le pouvoir d'achat. Nicolas Sarkozy a donné l'impression, lui aussi, de s'y engager. Mais son "travailler plus pour gagner plus" était dirigé contre les 35 heures, et pas pour le pouvoir d'achat. Car c'est une banalité, une évidence, une tautologie qu'il faut gagner plus quand on travaille plus !

Emmanuel Macron propose de relancer le pouvoir d'achat à travers une mesure originale : supprimer les cotisations sur la maladie et l'assurance-chômage que paient les salariés. Le bénéfice net sera de 252 euros par an pour un smicard, de 504 euros pour un salaire au double du SMIC. Pour les travailleurs indépendants et les fonctionnaires, le gain sera équivalent, en intervenant sur d'autres cotisations.

Macron ne se contente pas de proposer : il explique comment il va financer, par une hausse de la CSG de 1,75 points et son élargissement aux revenus du capital et aux retraites. Les indemnités chômage et les petites retraites en seront exemptées. Ainsi, les déficits ne seront pas aggravés et la compétitivité des entreprises pas affectée.

Mais une mesure reste technique, donc peu convaincante, tant qu'elle n'est pas replacée dans la philosophie du projet. L'idée maîtresse de Macron, c'est que les risques majeurs de la vie ne peuvent plus être couvert par la cotisation, mais pas la solidarité, abondée par l'impôt. C'est aussi la remise en question du paritarisme, cette cogestion très discutable des caisses sociales entre patrons et syndicats. Les grands ancêtres du syndicalisme auraient été très surpris que les luttes ouvrières débouchent sur ce partenariat. Emmanuel Macron interroge donc l'un des fondamentaux de la gauche, après d'autres. Mais le camp du progrès ne peut plus faire l'économie d'une telle réflexion, s'il ne veut pas reproduire des schémas anciens devenus inopérants.

On ne pourra pas non plus accuser Macron d'ultralibéralisme, puisque la mesure qu'il propose lui tourne le dos, fait appel à l'impôt. Mais gageons que certains continueront à lui coller cette étiquette qui se veut infamante et qui est simplement facile, erronée, démagogique. Au contraire, à travers cette proposition, Emmanuel Macron cherche à rééquilibrer la contribution au financement de la protection sociale, au profit des revenus du travail, qui sont jusqu'à présent beaucoup plus sollicités que les revenus du capital. Il se pourrait bien que dans la campagne qui s'annonce, Macron soit le candidat du pouvoir d'achat et de la justice sociale.

16 commentaires:

Erwan Blesbois a dit…

Il faut avoir une vision à beaucoup plus long terme que ça. Il faut en finir radicalement avec le libéralisme tel que définit par Adam Smith, c'est-à-dire une vision des rapports humains au sein de l'entreprise qui encourage le vice, la prédation, l'immoralité comme garantie d'un fonctionnement sain du marché qui se ferait par l'action d'une main invisible et aboutirait in fine aux bonheurs des peuples dans le cadre de la mondialisation. Eh bien il faut avoir le courage de dire non ! Ce n'est pas le cas et ne sera jamais le cas. Il faut au contraire introduire au sein de l'entreprise des rapports de solidarité entre les travailleurs, renforcer les corporations et les rapports de groupes plutôt que de tout miser sur l'individualisme et l'égoïsme. Ce serait une vraie définition du socialisme, seul capable d'enrayer la fuite en avant vers la destruction de tout, jusqu'à celle de la planète entière, dont nous commençons à observer les premiers effets depuis déjà pas mal de temps.
Le libéralisme est une idéologie perverse à la base qui a contaminé toutes les classes humaines de la société, et la perversion est devenue la norme des rapports humains. Nous avons le choix entre le réel socialisme et le progressisme d'Emmanuel Macron/Mousset qui nous conduira à l'abîme. Le peuple a déjà l'intuition que des "reptiliens" le manipule, il n'a pas tout à fait tort, il faut qu'il saisisse sa chance contre la tyrannie des élites avant qu'il ne soit trop tard et pour sauver la planète. Vive le mouvement des peuples qui se réapproprieraient leur destin, vive la France, et vive la planète !

Philippe a dit…

Une légere précision :
« Macron cherche à rééquilibrer la contribution au financement de la protection sociale, au profit des revenus du travail, qui sont jusqu'à présent beaucoup plus sollicités que les revenus du capital. ». Précisons toutefois que le capital échappe en partie à tout prélèvement et que des pays européens et extra européens se faisant les champions de la non imposition du capital ou de la moindre imposition facilite l’évasion fiscale.
Macron ne pourra pas contrarier les financiers auxquels il a fait appel pour financer sa campagne.
Le poids des prélèvements sociaux devenant impôts va s’abattre sur les petits épargnants français qui n’ont pas les relations et les connaissances en optimisation fiscale.
Bref ces derniers avec Macron comme énarque en chef vont rejoindre la « France périphérique » et donc l’électorat « populiste » … bref il propose de pousser les feux …
Sa réforme ne peut pas se faire sans accompagnement au niveau système financier mondial.
Faire payer les impôts là où les profits se font.
Bon ce n’est pas pour demain, mais les effets pervers politiques de sa réforme seraient eux rapides.

Emmanuel Mousset a dit…

Donc vous êtes contre cette mesure. Très bien, j'en prends acte. Mais je parie que vous êtes contre toute autre mesure, venant de Macron ou de quiconque. Ou bien que vous vous réservez les mesures idéales mais irréalisables. C'est l'histoire du type qui a les mains pures parce qu'il n'a pas de mains.

Anonyme a dit…

La hausse de la CSG pour augmenter certains salaires ce n'est qu'une opération de vases communicants : on vous prend dans une poche mais pour vous en mettre dans une autre. Rien ne prouve que les salariés seront gagnants. La CSG comme la TVA c'est l'un des impôts les plus injustes socialement puisqu'il frappe indistinctement riches et pauvres. La seule solution "révolutionnaire" c'est la recréation d'au moins une tranche d'impôts sur le revenu. Avant que le libéralisme anti-impôt ne s'impose même chez les "socialistes" il y avait 13 tranches d'impôts sur le revenu maintenant il n'y a plus que 5 et bien sûr des réductions les plus favorables aux riches.

Emmanuel Mousset a dit…

1- Non, il n'y a pas vases communicants, puisque CSG et cotisations sociales sont strictement différentes. Les salariés sont gagnants en faisant un simple calcul arithmétique, et pas une manipulation de prestidigitateur.

2- La CSG, inventée par Rocard et pas par un homme de droite, est égalitaire et universelle : c'est son grand mérite.

3- Vous voulez "faire payer les riches", comme Georges Marchais en son temps. Macron préfère faire gagner un peu plus les "pauvres". Et là aussi, pas de vases communicants entre les deux, pas de magie (remarquez bien, je préférerais, mais je ne suis pas superstitieux).

Philippe a dit…

« Donc vous êtes contre cette mesure. Très bien, j'en prends acte. Mais je parie que vous êtes contre toute autre mesure, venant de Macron ou de quiconque. Ou bien que vous vous réservez les mesures idéales mais irréalisables. C'est l'histoire du type qui a les mains pures parce qu'il n'a pas de mains. » ....
CSG .... mesurettes dérisoires que tout cela !
Car à la réflexion c’est beaucoup plus terrifiant que nos bavardages politiciens si on observe le Monde.
Nombre de populations humaines se reproduisent à taux voisin de celui des opossums de Nouvelle Zélande ! (pour cette fois laisser les lapins tranquilles!!!)
Nous sommes passés de 1,7 milliards en 1900 à 2,5 milliards en 1950, nous avons atteint les 7 milliards en 2016.
Notre prolifération provoquerait actuellement un solde positif (décès/naissances) de 246 000 habitants par jour.
Nous n’arrivons même pas à fournir du travail à notre population née en France malgré toutes les tentatives depuis 40 ans car nos entreprises se mécanisent en perdant plus d’emplois qu’elles n’en créent.
Le processus de désindustrialisation de l’Occident a fait gagner des emplois à des pays moins développés mais ces derniers sont atteints progressivement du même phénomène de mécanisation.
Le Monde périphérique (les « migrants ») nous pénètre et sans même cet apport notre France périphérique (voir définition de C.Guilluy) grossit mécaniquement.
A moyen et long terme je ne vois pas de solutions pacifiques pouvant endiguer cette évolution à la fois en France et dans le Monde.
Bref le chaos social ne peut que s’accentuer déstabilisant de plus en plus nombre de pays.
Des destructions massives peuvent ou vont finir par être envisagées froidement par certains cerveaux pour régler leurs conflits et se maintenir au pouvoir.

Erwan Blesbois a dit…

Entre Hitler, Thatcher et Reagan il n'y a pas beaucoup de différence, l'Histoire a retenu que l'un fut le plus grand criminel contre l'Humanité de l'Histoire. L'Histoire retiendra des deux autres, mais il n'y aura certainement plus d'Histoire pour le relater, qu'en rétablissant un libéralisme pur et dur conforme à son inspiration originale Adam smithienne, il furent responsables des prémisses de la destruction de la planète. Puisque les hommes soumis à leurs pulsions prédatrices et égoïstes dans l'appât du gain, sont rendus incapables de s'organiser pour enrayer cette destruction, et tout cela dans l'intérêt d'une minuscule oligarchie, qui avait intérêt à propager cette idéologie délétère pour s'enrichir dans des proportions hors de raison et de pudeur vis-à-vis du peuple et même des forces vives des nations concernées. Il est évident que les 1% de la population mondiale, qui possèdent plus que les 99% restant, devraient être immédiatement appelé "ennemis du genre humain". Quant à Emmanuel Mousset il a l'impudence d'appeler un tel régime malveillant "démocratie". Quand les élites sont malveillantes et manipulatrice vis-à-vis du peuple et des classes moyennes, on ne peut qualifier un tel régime de démocratique.
On retiendra pour l'anecdote que dans un petit coin du globe appelé France, un individu, Fillon pour ne pas le nommer, se proposait 37 ans après les ravages reconnus d'une telle idéologie pour ceux qui ne sont pas de mauvaise foi, de l'établir en France, au pied de la lettre, et qu'il serait certainement élu sur un programme aussi dément. Si c'était le cas cela signifierait que l'on avance un peu plus vite vers l'abîme à l'échelle du globe, et que la France apporterait sa contribution, sa modeste mais peut-être décisive pierre, à cette destruction programmée.

Emmanuel Mousset a dit…

1- Comparée à l'apocalypse, la mesure de Macron est peu de chose, c'est vrai. Et votre commentaire aussi.

2- Avec ton Juppé, pour qui tu as voté, il est vrai que tout aurait été beaucoup mieux, à la hauteur de tes désirs.

Philippe a dit…

Simplement il est peut être utile de temps à autre de hiérarchiser les difficultés et les problématiques.
Il peut être utile de se souvenir que la France regroupe un petit nombre d’humains (66 millions sur 7 milliards!).
Il peut être utile de s’intéresser aux difficultés vécues par d’autres pays et aux solutions ou absences de solutions trouvées par eux.
Bref nos préoccupations politiciennes franco-françaises sont proches de celle du Narcisse de la mythologie … nous sommes amoureux de nos pantalonnades, c’est à dire de nos improvisations histrioniques politiciennes.
On a fait le buzz avec celles de Macron, il n’est malheureusement pas le seul.

Anonyme a dit…

C S G = Contribution Sociale Généralisée est donc bien une cotisation sociale plus inégalitaire que l'impôt sur le revenu dont il existait 13 tranches mais que la droite et la gauche ont réduit à 5 pour accroitre les inégalités vis-à-vis de l'impôt. Un homme de gauche, un vrai, reconstruirait la progressivité de l'impôt sur le revenu qui tend à égaliser les conditions financières des citoyens.

Emmanuel Mousset a dit…

1- Vous comparez ce qui n'est pas comparable (c'est une faute intellectuelle fréquente) : une taxe n'est pas un impôt, le principe et le mécanisme ne sont pas les mêmes.

2- 5 tranches, 13 tranches, et pourquoi pas 20 tranches ? Ca n'a pas de sens. La réalité, c'est que la moitié des foyers ne paient pas l'impôt, parce qu'ils n'ont pas les moyens. La réalité, c'est que les classes moyennes se sentent surimposées. Il faut partir de ces réalités-là, pas de votre saucissonnage.

Philippe a dit…

Concernant la CSG il me semble que ce sont les classes moyennes. C’est à dire les citoyens qui n’ont pas les relations et les moyens de mettre leur argent dans les paradis fiscaux qui vont en avoir la charge.
Tondus au maximum ils vont donc rejoindre la France périphérique …
Veut-on augmenter la base électorale des extrémistes ?
Dans un documentaire hier aux Îles Caïman on apprend qu’il y est organisé une formation approfondie en gestion financière. On y embauche !!! La clientèle semble donc y augmenter !
Macron et ses soutiens de la City prennent les français pour des benêts … ils ont raison.

I a dit…

"5 tranches, 13 tranches, et pourquoi pas 20 tranches ? Ca n'a pas de sens. La réalité, c'est que la moitié des foyers ne paient pas l'impôt, parce qu'ils n'ont pas les moyens."
Affirmation péremptoire que vous étayez sur quels faits objectifs ?
Il me semble que tout citoyen devrait participer à l'écot national et payer sa contribution directe.
Les écarts de revenus entre les moins pourvus et les plus riches sont tels que ce ne sont pas 20 tranches d'imposition qui seraient nécessaires mais plus du double qui seraient bienvenues.
Que disent vos "marcheurs" d'En Marche sur ce sujet ? Et vous-même pour une fois, mouillez-vous, que diable !

Emmanuel Mousset a dit…

Contrairement à vous, je suis pour le maintien de l'exonération fiscale aux catégories les plus faibles. Quant à la multiplication des tranches, elles aboutiraient à un système ingérable.

I a dit…

Quant à la multiplication des tranches, elles aboutiraient à un système ingérable.
Quand on ne sait pas faire, on s'abstient.
Si on ne sait pas "faire" un impôt direct juste, on abandonne l'idée de l'impôt direct !
Au temps de l'ordinateur-calculateur tout puissant, ne me faîtes pas rire avec un présumé système ingérable.
Le seul problème est la collecte des données chez tous ceux qui ne sont pas payés par l'état ou les collectivités publiques.

Emmanuel Mousset a dit…

Ne prêtez pas à l'ordinateur la toute puissance que nous vante exagérément l'idéologie technophile de notre époque.