samedi 12 mars 2016

Je suis pour



Ce Cambadélis, quel malin ! Il m'épatera toujours. C'est quand même autre chose que son prédécesseur à la tête du Parti socialiste, Harlem Désir. Leur différence ? Le premier a été trotskiste tendance Lambert, le second trotskiste tendance Krivine. Pour les spécialistes, ça change tout. Disons, sans entrer dans les détails, que l'un est réaliste, tacticien et que l'autre est simplement idéaliste. Camba s'y connaît pour mettre tout le monde dans sa poche en laissant croire qu'il donne raison à chacun de ses interlocuteurs. Je ne le vois pas ministre ou candidat, mais en manœuvrier à la tête du PS, il excelle, avec son complice de toujours, Christophe Borgel.

Voyez comme il s'y est pris pour enfumer les partisans de la primaire à gauche. Il leur a d'abord dit oui (alors qu'il pense non), et puis il a posé ses conditions de bon sens : une primaire de toute la gauche, de Macron à Mélenchon. C'est que Jean-Christophe Cambadélis a le sens des formules qui claquent comme le drapeau rouge qu'il brandissait durant sa jeunesse lambertiste. Avec lui, l'impossible devient envisageable, mais demeure impossible : c'est le but de l'opération.

Les primaires n'auront pas lieu, Camba n'en veut pas : de Macron à Mélenchon ? N'importe quoi, mais c'est bien dit et ça fonctionne. En politique, il ne faut pas chercher à convaincre (on n'y arrive jamais), mais à coincer le rival ou l'adversaire dans une souricière d'où il ne pourra plus sortir. La primaire pour tous, c'est génial, on ne peut qu'être d'accord. Et quand Cambadélis aura fait la preuve que c'est impossible, il ramassera la mise, en feignant d'avoir fait son possible.

Sa dernière trouvaille est tout aussi géniale. Pour amener les frondeurs et autres contestataires à dévoiler leur jeu, il les somme de répondre à cette question : êtes-vous favorable à une candidature de François Hollande à la présidentielle de l'an prochain ? C'est simple comme bonjour, bête comme chou. Mais prenez un cadre de l'appareil, posez-lui la question, il prendra des précautions de Jésuite pour ne pas vous répondre, une prudence de Sioux pour ne pas faire mentir l'avenir. Camba va les entortiller avec ça.

Ne pas se positionner, c'est devenir suspect, c'est implicitement répondre non à la fameuse question, tout en prétendant qu'on ne sait pas encore, tout en prétextant qu'il faut attendre, que ce n'est pas le moment, qu'il y a autre chose à faire et à penser (chanson connue). Ceux qui répondront oui formeront le périmètre, le pré carré sur lequel le Parti et le président pourront compter, le moment venu. Dans une bataille politique, il est essentiel de connaître ses soutiens et les girouettes en puissance. Avant que le vent se lève, Camba va s'amuser à les pointer.

Et moi, simple socialiste de base, je réponds quoi à la question, qui est légitime, qui n'a rien d'inquisitoriale ? Dans l'idéal, mon candidat préféré, le président de mes souhaits, c'est Emmanuel Macron. Mais, comme Cambadélis et contrairement à Harlem Désir, je suis réaliste, pas idéaliste. Si le président veut briguer un second mandat, je suis pour, au nom de la cohérence politique, de la continuité gouvernementale et du respect de la fonction présidentielle. En revanche, si François Hollande renonce, Macron sera, pour moi, le mieux placé pour incarner la ligne social-démocrate mise en place dès le début de ce quinquennat. Alors, on pourra peut-être penser à des primaires ouvertes. Mais je sens que Hollande va se représenter.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Petite leçon de trotskisme. Historiquement chez les trotskistes il n'y a pas de tendance Lambert et Krivine mais la tendance Lambert et la tendance Ernest Mendel(économiste belge). Par ailleurs la différence n'est pas entre réalisme et idéalisme mais porte sur le périmètre du capitalisme, capitalisme stricto sensu ou capitalisme et l'ensemble des retombées du capitalisme sur un plan mondial. C'est bien au delà des petites tactiques politiciennes.

Philippe a dit…

Pour le parti le plus intelligent ?
Le Premier ministre grec Alexis Tsipras a critiqué vendredi à Paris le projet de réforme du droit du travail du gouvernement français :
"A chaque fois qu'on a instauré ce genre de politique de flexibilité, les résultats ont été catastrophiques", a commenté le chef du gouvernement d'Athènes, issu de la gauche radicale, en réponse à une question sur le projet de loi du gouvernement français."En aucun cas, cela ne renforce la compétitivité de nos économies (...) sinon le Bangladesh aurait la meilleure économie du monde", a-t-il ironisé.
Source :
http://finance.orange.fr/actualite-eco/article/a-paris-alexis-tsipras-critique-le-projet-de-loi-el-khomri-CNT000000ldaeO.html

Emmanuel Mousset a dit…

Pour la leçon de trotskisme, je sais, mais j'ai dit que je n'entrerai pas dans les détails (qui n'en sont sûrement pas pour vous, mais pour le lecteur lambda, qui ne connaît pas forcément Mendel ou qui le confond avec un musicien).