vendredi 25 août 2017

Les Français n'aiment pas les réformes



La phrase du chef de l'Etat a pu surprendre. Mais posez-vous la question : y a-t-il une seule grande réforme, depuis 30 ans, qui ait rencontré l'assentiment général des Français et provoqué chez eux un grand enthousiasme ? J'ai beau chercher, je ne trouve pas. Que ces réformes soient de droite (les retraites) ou de gauche (les 35 heures), elles suscitent souvent défiance et même franche hostilité. Qu'elles soient sociales ou sociétales, elles mobilisent contre elles : prenez le mariage homosexuel ; dans aucun autre pays, y compris beaucoup plus catholique que le nôtre, il n'a soulevé autant de gens contre lui.

On pourrait penser que les réformes institutionnelles, puisqu'elles concernent notre cadre démocratique, échappent à la contestation : eh bien non, la Vème République a rencontré une forte opposition à sa naissance (et encore un peu maintenant). Le plus surprenant, c'est que des réformes mineures, comme les rythmes scolaires, qui consistaient simplement à revenir à ce qui existait avant, ne sont pas mieux admises.

Pour comprendre cette allergie à la réforme, qui est une spécialité française, il faut d'abord écarter les fausses raisons. Psychologique : le Français râleur. Non, pas plus que le Britannique ou l'Italien. Sociologique : la montée de l'individualisme, qui fait primer l'intérêt particulier sur l'intérêt général. Oui, mais pourquoi les autres sociétés, tout autant touchées par ce phénomène, n'éprouvent pas autant d'aversion pour les réformes ? Idéologique : le Français serait conservateur ("On sait ce qu'on perd, on ne sait pas ce qu'on gagne", me disait une voisine, réticente à tout changement). Mais nous sommes tout de même le peuple qui a fait 1789 ! Politique : en démocratie, il est normal que les réformes soient débattues et contestées. Certes, mais à ce point, avec une telle régularité, non, il y a quelque chose qui ne va pas. Alors quoi ?

Je crois que la raison est historique : le Français rêve la révolution et refuse la réforme. Nous pensons le changement, auquel nous aspirons, sous forme de rupture, pas de réforme : c'est 1789, 1871, 1936, 1981. La réforme négociée, qui s'impose par le compromis et débouche sur le consensus, n'est pas dans notre culture. Emmanuel Macron arrivera-t-il à lever cette malédiction ? Je pense que oui. D'abord parce qu'il a fait exploser le clivage droite-gauche, que son opposition est complètement éclatée : plus rien ne peut massivement faire barrage. Surtout, contrairement à François Hollande ou même à Lionel Jospin, il ne fait pas dans la demi-mesure qui cherche à contenter tout le monde et qui ne satisfait personne. Il faut sortir des réformes à moitié bonnes par excès de prudence. Enfin, il faut constater qu'une réforme décriée devient avec le temps une réforme acceptée (je pense aux 35 heures). L'ambition de Macron est que l'acceptation soit immédiate, sans conflit ni drame.

9 commentaires:

Erwan Blesbois a dit…

Ce n'est pas aux Français de s'adapter à la mondialisation, ni aucun autre peuple, c'est à la mondialisation de céder aux peuples, et je crois que le moment sera bientôt venu... La dictature mondiale libérale politico-économique tombera ou alors nous disparaîtrons tous, y compris les nantis et les richissimes, ils en crèveront comme tout le monde, un poil plus tard...

Anonyme a dit…

Ét d abord celles du mammouth

Erwan Blesbois a dit…

On est déjà bien dégraissé anonyme de 20:08, payé à peine comme des enseignants grecs ou slovènes, moitié moins que les Allemands, on souffre et même certains en crèvent, rassurez-vous !!!

Anonyme a dit…

" c'est à la mondialisation de céder aux peuples et je crois que ce sera bientôt le moment venu" Facile comme déclaration mais on fait comment? Qui parle au nom du peuple?
-- leurs représentant démocratiquement élus?
-- le plus fort comme du temps de l'Homme des cavernes?
-- le plus brillant parleur comme en Grece antique?
-- la "finance mondiale" qui bourrerait les urnes à notre insu?!
--des forces "maléfiques"?!
La démocratie reste le moindre mal,tout vote mérite respect. il suffit ensuite d'accepter le résultat donné par le plus grand nombre de suffrages exprimés.

D C a dit…

Il faudrait distinguer ce qui est du domaine du progrès social, de la réforme sociale et de la régression sociale.
Moi, je viens d'une famille pratiquant l'agriculture d'élevage et quand on "réforme" un bovin, c'est vers l'abattoir qu'il s'en va...
Il me souvient bien aussi qu'au temps des conseils de révision, les réformés ne rentraient pas si fiers que les autres dans les villages après avoir été convoqués au chef lieu de canton...
Et pourtant il y avait beaucoup à craindre avec les "événements d'Algérie"...
Alors vive la réforme quand même ?

Anonyme a dit…

Pourtant vous ne souhaitez pas appliquer le modèle allemand et êtes payés sur la base fonctionnaire ,un peu mieux que les autres d'ailleurs y compris l été
Les enseignants persécutés.
La plupart n ont jamais travaillé ailleurs qu au mammouth,on y crève peut être plus .

Erwan Blesbois a dit…

@ Anonyme 22:15
Ce que vous appelez "démocratie" est du conditionnement, mais comme vous avez été élevé là-dedans, que vous n'avez jamais eu accès au véritable bien et à la réelle beauté, vous pensez effectivement que c'est un moindre mal. En réalité depuis Waterloo en France, ce sont les bourgeois matérialistes et vénaux qui nous imposent leur vision du monde, qui est d'une laideur absolue, et cela de plus en plus, avec destruction des espèces animales, destruction des éco systèmes, tout cela au nom du profit. Bon je ne vais pas insister sur la laideur intrinsèque du système libéral, il suffit d'ouvrir les yeux, mais globalement les petits bourgeois qui veulent tellement imiter leur maîtres bourgeois, ont de la merde dans les yeux, et ne veulent rien voir sinon le fric qu'ils gagnent à la fin du mois. A part ça, je trouve le peuple anglo-saxon bien plus courageux que le français, veule depuis Waterloo, qui n'a jamais le courage de dire non, comme ont su le faire les Anglais avec le brexit et les Américains en votant Trump... Que Trump soit effectivement nullissime est un autre problème !

Anonyme a dit…

Le jeune Macron ne fait que ressasser un vieux poncif de tout vieux dirigeant français depuis 30 ans sur une prétendue hostilité à des "réformes" toutes néolibérales donc rétrogrades qui ont eu lieu. Toutefois il faut concéder que là où Margaret Thatcher mettait 2 ans à les faire il a fallu 10 ans pour que notre classe dirigeante acquise au néolibéralisme d'origine anglo-saxonne. Nos "socialistes les faisaient avec plus de "care" cher à Madame Aubry, notamment.

Philippe a dit…

Les sociétés actuelles extrêmement complexes et techniques ne peuvent plus être gérées de façon pyramidale autour d’un seul homme se considérant très rapidement comme omniscient, et rapidement enivré par les louanges des courtisans tireurs de manche.
La seule formation littéraire ne permet plus d’appréhender notre monde.
Il nous faudrait une direction politique collégiale et surtout réellement multidisciplinaire.
Macron serait bien inspiré de lire The Hubris Syndrome par Lord Owen.
D’autres chercheurs sont allé plus loin que Owen en mettant en évidence les circuits neuronaux endommagés, comme Dacher Keltner ou Sukhvinder Obhi
Le pouvoir endommagerait particulièrement un processus neuronal spécifique qui permet de ressentir de l’empathie, de se mettre à la place des autres. C’est ce que Keltner nomme « le paradoxe du pouvoir » : une fois qu’on l’a, on perd certaines qualités qui ont été nécessaires pour l’obtenir.
NB l’empathie n’est pas un laxisme/laxatif affectif mais une qualité sociale permettant de comprendre son environnement humain pour y circuler. En société mieux vaut un bon odorat social qu’une « anosmie » d’autiste.
Bref notre « roi » va être mûr pour le sport national … le dégagisme.