mardi 29 mars 2016

Toussaint à Pâques




Pour ce week-end pascal, je ne suis pas allé à la chasse aux œufs ou à la poursuite des cloches, mais entre les tombes du plus grand cimetière d'Europe, le Père-Lachaise à Paris, que j'ai visité et fait visiter je ne sais combien de fois. Quelques amis ont eu droit à mes morceaux d'anthologie. Devant de la sépulture de Proust, lisant un extrait de la Recherche, il ne me manquait plus qu'une Petite Madeleine et une tasse de thé pour parfaire l'hommage. Balzac m'oblige à m'affubler de la barbe du vieil Hugo, à l'endroit même où il fit l'éloge funèbre du grand auteur de la Comédie, dont je déclame un extrait. C'est plus violent quand Eugène Potier me voit juché sur un banc, gueulant L'Internationale qu'il a composée. Les gardiens s'approchent inquiets, craignant un début de révolution ou un fou échappé de l'asile. Je leur explique que ce n'est que moi.

Il y a la déambulation guidée et commentée par mes soins, mais aussi la libre promenade, en dehors des sentiers battus, ouverte aux surprises, aux découvertes. Je peux vous jurer qu'après 35 ans de fréquentation du lieu, je continue à faire des rencontres imprévues, car la mort hélas ne chôme pas. Ainsi, au détour d'une allée, sans prévenir, la tombe de Bernard Verlhac, alias Tignous, s'est livrée à moi, me rappelant que j'étais Charlie (vignette 1). A quelques dizaines de mètres, c'est une inconnue qui est modestement inhumée, du nom de Suzon Garrigues, une victime du Bataclan, 21 ans (vignette 2). Je me dis qu'elle aussi, avant d'être emportée par la même barbarie, s'était peut-être inclinée devant la tombe du dessinateur, pour le rejoindre quelques mois après, dans un carré de terre voisin. Le cimetière provoque en nous ce genre de réflexion mélancolique.

Heureusement, une nécropole est aussi une occasion d'amusement, sinon on n'y tiendrait pas, on n'irait jamais. Le Père-Lachaise a ses perles, et deux nouvelles à ma collection depuis ce week-end. D'abord, un Milou dont on ne comprend pas bien ce qu'il vient faire là (vignette 3). Le nom de l'occupant des lieux est quasiment effacé, aucun rapport n'est possible, à la différence de cette dalle de la famille Hue, qui accueille un facétieux nain de jardin (vignette 4). Il faut avoir la culture politique de votre serviteur pour faire le lien avec l'ancien secrétaire général du PCF, Robert Hue, que les rondeurs et le collier de barbe avaient fait surnommer en son temps "le nain de jardin" (toujours vivant). Sans cette connaissance, le mystère resterait entier. En revanche, je n'ai pas percé le sens de la petite échelle à côté du personnage. Peut-être qu'un lecteur saura décrypter. Il n'empêche : l'humour contre la mort, il fallait y penser !

3 commentaires:

J a dit…

L'échelle de Jacob...

Anonyme a dit…

NON L'échelle mobile chère au PC et à la CGT ???

Emmanuel Mousset a dit…

La courte échelle ? L'échelle des pompiers ? Nous nous perdons en conjectures ...