samedi 19 mars 2016

Eloge de la lecture



C'est demain la fermeture du salon du livre, à Paris. L'occasion pour moi de faire un petit éloge de la lecture. Il y a nécessité : autour de nous, voit-on souvent quelqu'un avec un livre à la main ? Ils ont été remplacés par les portables et les tablettes. Traversez une voiture de train, observez, c'est flagrant.

C'est une banalité de reconnaître que l'image a remplacé l'écrit, qui a pourtant d'éminents détracteurs : Socrate n'a jamais rédigé aucun ouvrage, estimant que la libre parole convenait mieux à la pensée que l'écriture figée. Jean-Jacques Rousseau, dans son Emile, a poussé un cri qui ferait horreur à tous nos pédagogues : "Je hais les livres !" Pour lui, ce n'était pas la meilleure façon d'éduquer un jeune homme. Pour moi aussi, entre lire ou écrire, je préfère écrire, parce que c'est plus créatif, plus libre.

Pourtant, il faut défendre la lecture. Pas le livre en soi : je ne suis pas bibliophile, je n'ai pas le culte des éditions originales, des belles reliures ou des manuscrits anciens. Pas non plus forcément la littérature : je sais que lire représente un effort pas évident, qu'ignorent ceux qui ont pris l'habitude de lire beaucoup et facilement. L'important n'est pas dans le contenu du livre mais dans l'acte de lire. C'est pourquoi je conseille à celui qui n'a jamais lu de lire n'importe quoi, même de piètre qualité. Par exemple, les aventures de Bob Morane, d'Henri Vernes, ce n'est pas de la littérature, mais du récit populaire, et c'est bien.

Je ne défends pas la lecture au nom de la culture ou de l'intelligence, mais en tant que comportement individuel. Lire, c'est faire le choix de la solitude, le retrait de la société, l'oubli des autres. Il faut s'isoler, dans un endroit pas trop bruyant, pas trop fréquenté. Il y a beaucoup de choses qu'on peut faire à deux, sauf lire. C'est un comportement asocial, presque anarchiste.

Lire, c'est non seulement se retrancher de la collectivité, mais aussi sortir du temps. Car la lecture ne fait pas qu'exiger des efforts : elle prend du temps. Un livre de 200 à 300 pages, ce qui est la bonne moyenne, mobilise plusieurs heures de lecture. Aujourd'hui, où le temps nous presse, où des tas d'activités nous sollicitent sans cesse, ce n'est plus guère possible. Il n'y a plus que les hommes politiques qui font semblant de lire, parce qu'ils croient que c'est bon pour leur prestige. Lire, c'est se moquer du temps qui passe et des impératifs de la vie sociale : un acte révolutionnaire.

Je ne crois pas du tout au livre électronique, qui installe la machine entre le texte et nous. On ne peut pas enfermer un livre dans une boîte, même plate. Surtout, il y a la lumière hypnotique de l'écran, qui tranche avec le doux papier. Enfin, si un livre ne me plait pas, je veux avoir la liberté de le jeter rageusement à travers la pièce, ou bien de déchirer certaines pages. Avec la tablette, ce n'est pas possible.

Ce salon du livre, nous n'avons pas pu nécessairement nous y rendre, mais France Inter et France Culture, tout ce samedi, nous ont gratifiés de nombreux directs, lectures et débats. Tout n'est pas perdu pour la lecture.

4 commentaires:

Erwan Blesbois a dit…

Je ne suis pas d'accord avec toi sur la liseuse, c'est un objet que j'ai adopté et qui permet de télécharger des milliers de livres dans un petit objet. De plus les jeunes qui ont l'habitude des écrans ne sont pas trop dépaysés. J'ai offert une liseuse à ma fille de 15 ans, et enfin elle lit un peu plus. Peu importe le support pourvu qu'on ait l'ivresse de la lecture. Quant à savoir si pour me fille il s'agit d'un petit gadget, dont elle se lassera vite ou qu'elle investira, l'avenir nous le dira. Autre avantage, beaucoup de livres sont désormais libres de droit, on peut donc se procurer des milliers de livres gratuitement.

Emmanuel Mousset a dit…

C'est moi qui ne suis plus de ce monde, ignare en "nouvelles technologies".

Anonyme a dit…

Pourtant la vente des liseuses plafonnent en France.

http://www.lemonde.fr/economie/article/2016/02/23/la-resistible-ascension-du-livre-numerique_4870255_3234.html?xtmc=liseuse&xtcr=2

Anonyme a dit…

Les reportages sur le salon "Livres Paris" mettent en avant l'imprimante qui vous imprime et relie votre livre à la demande.

https://www.youtube.com/watch?v=sdcd84Z3qvo

Pour vous mettre d'accord!

Pour ma part j'aime le papier sans cracher sur les nouvelles technologie. Il est vrai que je suis passé du porte-plume au traitement de texte.