vendredi 17 juillet 2015

Un avenir en rose et vert



Eh oui, encore la Grèce dans le billet d'aujourd'hui ! Vous en avez marre ? Très bien, il faut vous habituer. L'actualité change en permanence : Tsipras, les déchirements de la gauche libérale, l'accord financier, le comportement des institutions européennes, tout ça nous a tenus en haleine pendant une bonne semaine. C'est beaucoup, dans un monde qui zappe constamment. C'est trop, pensent sûrement certains. Pourtant, nous n'en avons pas fini avec la Grèce : ce qui s'y passe n'est pas un terme, mais un commencement. La réflexion sur ce pays, son devenir, l'appartenance à l'Europe ne font que débuter. Il le faut : le temps de la politique ne peut pas être le temps médiatique. Celui-ci change sans arrêt, celui-là a besoin de continuité.

La Grèce, nous en parlons et nous en reparlerons, parce que sa situation est la nôtre, en beaucoup moins grave, mais en potentialité : un développement qui repose sur la finance, un usage très généreux du crédit, des banques qui prêtent les yeux fermés au grand bonheur de tous, des investissements aléatoires, une économie d'une grande fragilité, des déficits astronomiques, un endettement qu'on n'arrive même plus à mesurer. Voilà où nous a conduits, presque fatalement, un demi-siècle de société de consommation, de recherche effrénée de biens matériels, d'achats à tout-va, qui nécessitaient de l'argent, encore de l'argent, toujours plus d'argent. Ce monde-là, c'était notre rêve, et c'est maintenant notre cauchemar.

Nous avons vu, sur nos écrans, stupéfaits, des files d'attente devant les banques, des retraits d'argent limités à 60 euros par jour, des retraites qui ne sont plus assurés, des biens de première consommation qui viennent à manquer ... Cette angoisse collective, qui s'est emparée de tout un pays, beaucoup de Français la vivent individuellement, pendant un temps : le surendettement, le chômage, la retraite insuffisante, le pouvoir d'achat qui ne permet plus d'acheter ... La Grèce, c'est notre cauchemar, parce que nous sentons que ça pourrait être notre possible avenir, qu'il ne faudrait pas grand chose pour que l'économie française, elle aussi, se rapproche de la faillite, vive l'horreur de la cessation de paiement, la nécessité un peu humiliante d'avoir à faire appel aux institutions financières européennes et mondiales.

Une approche sommaire mais pas fausse nous fait dire que les problèmes de la Grèce, au fond, proviennent d'un manque d'industrialisation, d'une économie essentiellement tournée vers le tourisme. Mais n'est-ce pas, à un moindre degré, la situation actuelle de l'économie française ? Nous sommes de plus en plus un pays à touristes et de moins en moins un pays à usines. Regardez les collectivités locales : dans quoi investissent-elles ? Dans l'économie du loisir, du divertissement. C'est rarement en faisant venir une grosse industrie sur leur territoire. De ce point de vue, il faut lire Michel Houellebecq : un écrivain est parfois plus clairvoyant que les économistes. Le tourisme, national et international, ce sera l'activité économique du XXIe siècle, facteur d'emploi et de développement. L'Acropole ou la Côte d'Azur, on ne pourra jamais les délocaliser. Au contraire, c'est le monde entier qui va venir en Europe, qui a déjà commencé.

Cette réflexion oblige le socialisme à s'allier à l'écologie, pas seulement électoralement, mais intellectuellement. Là aussi, ce n'est pas une idée nouvelle, mais il faut du temps pour qu'elle s'installe : le socialisme productiviste, consumériste est dépassé par les événements, par les évolutions de la société. La social-démocratie ne peut plus reposer sur la redistribution, quand il n'y a plus grand chose à redistribuer, ni sur la croissance, quand celle-ci est à la peine. L'écologie nous ouvre à de nouveaux modèles de développement et d'existence. L'avenir ne sera pas forcément notre cauchemar, si les forces politiques le préparent, l'organisent : un avenir en rose et vert.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

UTOPIE rose et verte mais qui produit les biens de consommation , là est la question !! La contourner c'est un suicide lent et indolore .........
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Erwan Blesbois a dit…

Tu m'as convaincu bravo, je voterai socialiste aux prochaines élections. J'ai vu le mal en la personne du "Français moyen", je n'ai jamais ressenti une telle bêtise et méchanceté au contact des populations musulmanes qui souffrent, et dont la souffrance peut se transformer en ressentiment, mais une telle haine et méchanceté, jamais, seulement au contact d'un "Français moyen", propriétaire. C'est donc cela la "France", que je suis profondément déçu !

Emmanuel Mousset a dit…

Je ne cherche pas à te convaincre, ni à ce que tu votes socialiste, car ça n'a rien à voir avec la suite de ton commentaire, par ailleurs fort juste. En tout cas, que ton idée de la France s'élève bien au dessus de cette France "moyenne", je ne peux que t'en féliciter, d'autant que tu en viens.

Erwan Blesbois a dit…

Si voter socialiste, car c'est le seul vote efficace pour lutter contre le FN, je n'ose imaginer ce que deviendrait ce genre de "Français moyen" si le FN arrivait au pouvoir : dénonciations, tabassages, règlements de compte sur la voie publique ; il y aurait certainement des morts, un genre de guerre civile. Ce genre d'odieux personnage se sentirait pousser des ailes et il n'y aurait plus de limite à leur volonté de tout écraser sur leur passage pour obtenir quelques misérables euros et une reconnaissance sociale, ils tueraient pour ça !

Erwan Blesbois a dit…

Cela n'enlève rien au fait que je pense que le PS effectue une politique libérale de droite, depuis à peu près 1983 et que Mitterrand "s'est couché" devant la volonté d'hégémonie politique et économique du couple Thatcher-Reagan. Cela n'enlève rien à mes convictions qu'il faudrait effectivement une Europe fédérale englobant la Russie, capable d'avoir son autonomie vis-à-vis de l'empire américain : même cela serait dangereux, car que deviendrait et dans quelle direction irait cette "superpuissance" européenne ? Aujourd'hui les Etats-Unis font figure de "juge de paix" mondial, avec leurs valeurs libérales, mais qui sait, c'est presque peut-être mieux ainsi. On peut toujours avoir la vision d'une puissance plus juste et soucieuse de respect de l'environnement, et de modération économique et démographique. C'est ma vision d'une "superpuissance" européenne, plus tournée vers la paix et la réparation de ses erreurs passées, et soucieuse d'un équilibre mondial, et favorisant la recherche scientifique, pour préparer l'avènement qui sait, d'un genre d'IA (intelligence artificielle), capable de réguler tous nos excès à l'échelle mondiale. Cela constitue un genre de croyance technologique, qui sera sans doute la "foi" du futur.
Il n'y a que des rapports de force assez violents et pas de place pour les bisournous (je suis moi-même un peu un bisounours) en politique ; donc pour l'instant, l'urgence c'est d'être seulement efficace et uni pour lutter contre les résurgences d'un passé nauséeux, en la personne de Pétain et de son mouvement, le pétainisme. C'est dommage que l'on n'est pas été capable de laisser ce passé derrière nous depuis longtemps. Malgré tous les efforts de De Gaulle pour l'unité et la prescription des erreurs passées, force est de constater que les Français sont rattrapés par leurs vieux démons, je croyais que ces "vieux démons" étaient un fantasme d'homme de gauche, mais non ils sont bien là, prêts à resurgir à la moindre occasion, que de temps perdu ! Espérons que nous arriverons à surmonter cette bêtise qui est comme une tâche sur la belle parure que constitue par ailleurs la France, à d'autres égards.

Erwan Blesbois a dit…

Cela n'enlève rien au fait que je ne trouve pas Valls sympathique, surtout quand il se mêle de la vie intellectuelle, pour critiquer Michel Houellebecq, Emmanuel Todd et Michel Onfray notamment, que Valls reste à sa place et ne se mêle pas de ce qu'il ne maîtrise peut-être pas.