jeudi 9 juillet 2015

La droite et l'Eglise



Avec la droite, j'ai des divergences, des désaccords, des oppositions en matière économique et sociale, sur les questions de société. C'est le débat normal en démocratie. Il y a confrontation, mais ça n'implique aucune irritation : chacun ses idées. Il n'y a qu'un seul sujet sur lequel la droite m'énerve : ce sont ses relations avec l'Eglise catholique. J'en veux pour preuve l'appel intitulé "Touche pas à mon église", qui s'élève contre la transformation des églises de France en mosquées. Il a été lancé par un écrivain de droite, Denis Tillinac, dans un magazine de droite, Valeurs Actuelles, signé par des intellectuels de droite ... et Nicolas Sarkozy !

Pourquoi mon irritation ? Parce que la droite n'a rien à voir avec le christianisme ! Sarkozy en catho, il y a de quoi sourire
! La droite, dans son inspiration libérale, dans sa défense de la compétition, du profit, des biens matériels, tourne complètement le dos aux valeurs de l'Evangile. Et ce n'est pas en prenant la défense des églises qu'elle peut nous laisser croire le contraire ! En France, il n'y a qu'une seule classe sociale qui se soit identifiée à la religion catholique : c'est l'aristocratie, aujourd'hui quasiment disparue, en tout cas sans plus aucune influence politique. La droite contemporaine, c'est essentiellement la bourgeoisie, grande, petite et moyenne. Celle-ci, qui a fait la Révolution française, est voltairienne, n'a plus d'accroches avec l'Eglise catholique.

La relation de la droite à l'Eglise relève donc, non pas d'une sympathie, d'une complicité ou d'une adhésion, mais d'une manipulation et d'une instrumentalisation. C'est ancien : déjà, Charles Maurras, idéologue de la droite réactionnaire dans l'entre-deux-guerres, prétendait que "l'Evangile sans l'Eglise était un poison". La droite appuie l'Eglise non pour des raisons spirituelles, mais parce que sa structure pyramidale et universelle représente un principe d'ordre dont elle besoin.

Pour en revenir aux mosquée : cette reconversion des églises ne pourrait être que volontaire, minoritaire. Au lieu de voir un bâtiment du culte partir en ruines, autant le faire entretenir par un autre culte. Et puis, à qui la faute si les églises se vident de plus en plus ? Sûrement pas aux musulmans ! Le vrai scandale, je l'ai déjà écrit, ce serait de voir une église transformée en centre culturel, en salle de sport ou en discothèque. Là serait vraiment le sacrilège. Mais remettre un temple aux autres fils d'Abraham que sont les musulmans, adorateurs du même Dieu que celui des chrétiens, il n'y a rien d'offensant.

Quand on observe les touristes, en pantacourt, appareil-photo en main et casquette sur la tête, visitant les lieux de culte comme un musée, on se dit que c'est beaucoup plus scandaleux que le rachat des églises par des hommes de foi, d'une autre foi. Mais personne ne dit rien , parce que chacun d'entre nous est plus ou moins ce touriste-là.

11 commentaires:

Anonyme a dit…

Une église est consacrée et contient souvent des reliques ou des tombes de religieux où Seigneurs des lieux .. Globaliser le problème est mettre un doigt dans un engrenage culturel incommensurable dont aucun gouvernement ne se relèvera !!

Anonyme a dit…

Sabre et goupillon , séparation de l'église et de l'état , et on est dans un retour en arrière ... Le problème n' est pas dans la fréquentation des églises mais dans les budgets communaux qui ne peuvent suffire à entretenir ces immenses bâtiments qui sont souvent le plus grand de la commune ..... On est devant un problème financier et juridique qu'il faudra résoudre un jour .... Prochain ...
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Emmanuel Mousset a dit…

Parce qu'une église est consacrée, mieux vaut la dédier à un autre culte (quand on ne peut pas faire autrement) que la livrer à une activité profane. Et puis, l'Eglise n'a jamais hésité, par le passé, à détruire un lieu de culte pour le rebâtir. Saint Paul nous dit que le vrai temple de Dieu est dans nos cœurs, pas dans des pierres. Quant aux reliques, le Moyen Age n'a pas cessé de les déplacer, et même de les démembrer ! Ce problème des églises et de leur sauvegarde doit être traité uniquement par l'Eglise catholique, en lien avec les autres confessions, avec bien sûr les pouvoirs publics. Mais sans en faire un sujet polémique, politique, identitaire.

Anonyme a dit…

Vous semblez éluder le fait que la majorité des églises appartiennent aux communes , de plus bon nombre sont monuments historiques et doivent garder des critères que seul l'état garantie .... A vous lire ....
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Anonyme a dit…

A saint-Quentin, l'église Sainte Thérèse est en vente depuis des années.
Où est le problème ?
Je suppose que si j'avais les moyens de l'acheter, je le pourrais sans restriction.
Une fois à moi, cette église, j'en ferais ce que bon me plairait ensuite...
Où est le problème ?
Qu'est ce que ces pudeurs quand il s'agit d'église ou de temple comme de mosquée ?

Emmanuel Mousset a dit…

La remarque précédente est judicieuse : la vente d'une église, aussi triste soit-elle pour les croyants, n'a jamais fait scandale, alors qu'il s'agit pourtant d'une opération vénale. C'est donc bien par hostilité envers la communauté musulmane qu'éclate cette querelle des églises, conduite par des gens dont la piété n'est pas la qualité première.

Quant à la question du classement en monuments historiques, non, la majorité des églises n'en font pas partie.

Anonyme a dit…

Pas de polémique et un regard sur des documents sérieux ......

<< Selon l'inventaire effectué par la conférence des évêques de France en 2009, la France compte 45 000 édifices catholiques (17 000 églises, 12 000 chapelles, tous états confondus, dont 10 000 connaîtraient une activité cultuelle) dont la majorité sont propriété des communes (87 cathédrales sont biens de l'État) et plus du quart sont classés parmi les monuments historiques). 35 % des églises ont été édifiées au XIXe siècle sous le régime concordataire qui généra un mouvement de reconstruction des églises en réaction aux événement de la Révolution. Les diocèses sont en possession, par le biais des associations diocésaines, de 2 050 églises (dont 300 en région parisienne) construites après 1905, date de la séparation des Églises et de l'État. >>
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Anonyme a dit…

L'église catholique peut vendre les édifices qu'elle a construit , elle-même, après la loi de 1905. Les autres églises en règle générale appartiennent aux communes et ce sont à elles de les entretenir. Si elles ne sont plus consacrées donc vraiment désaffectées, les vendre n'est pas un scandale comme le souligne bien le premier commentaire.

Quant à la quasi disparition de l'aristocratie, à voir... dans les dirigeants de grandes banques privées comme publiques, dans les meneurs de la Manif pur tous, dans ceux qui vont voir leurs allocations familiales fort rabotées.

Anonyme a dit…

Boubakeur a lancé une balle sans se douter de son et de ses rebonds , en fait la plupart des églises " libres " sont dans les campagnes et donc pas dans des contrées habitées par beaucoup de musulmans .... Mais l'occasion a été trop belle pour les agités de la politique politicienne et les communicants de tous poils ....

<< Dans l’Obs, il affirme tout d’abord qu’il n’a jamais souhaité "transformer les églises en mosquées. C'était une conversation (avec le journaliste d’Europe 1, NDLR) tout à fait impromptue et sans aucune intentionnalité, ni de ma part, ni de la part des musulmans qui, d'ailleurs, ne se placent pas du tout dans une telle perspective !"

Ensuite, Dalil Boubakeur déclare même partager le sens de l’appel de Valeurs actuelles pour "conserver les lieux de culte dans leur destination d’origine." Peu après, le recteur de la Grande mosquée de Paris "ne veu(t) pas voir" la signature de Nicolas Sarkozy "comme une manœuvre politique" de sa part. Toutefois, "il y a une mauvaise foi de la part de ceux qui lancent de telles idées.", reprend-il. >>

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Emmanuel Mousset a dit…

1- Merci au commentaire qui confirme que la majorité des églises de France ne sont pas classées "monuments historiques". Ce que les chiffres attestent, une simple réflexion de bon sens pouvait le comprendre : nos églises de village sont loin d'être toujours des bijoux d'architecture ou d'ancienneté !

2- Sur l'aristocratie : nous n'avons plus idée, dans notre régime démocratique, de ce qu'était la noblesse d'autrefois, qui jamais n'aurait mêlé ses poussettes à celles de la "Manif pour tous". Quant aux allocations familiales, rabotées ou pas, les descendants des chevaliers et des Croisés s'en moquent royalement, c'est le cas de le dire. Ce qu'il nous reste d'aristocrates sont des typologies folkloriques, parfois franchement ridicules, qui ont tout perdu de leur gloire passée et ne disposent plus d'aucun pouvoir politique.

Anonyme a dit…

Ils ne disposent plus d'aucun pouvoir politique ? C'est à voir au niveau communal, dans les campagnes... Quand c'est le "baron" qui brigue la mairie, il l'a presque à tout coup ! Les exemples foisonnent !