mardi 30 septembre 2014

Des têtes tombent enfin



Au parti socialiste, nous avons une tradition de guillotineurs, Révolution française oblige. Je me souviens de Paul Quilès, c'était en 1983, au congrès de Valence (à vérifier). Il avait lancé une formule qui avait fait trembler : "il ne suffit pas de dire, comme Robespierre, que des têtes vont tomber, il faut dire lesquelles". Quilès avait fait fort, plus fort que Robespierre, ce qui lui avait valu à l'époque le surnom de Robespaul ! En tout socialiste, il y a un robespierriste qui sommeille et qui ne demande qu'à se réveiller. Ne le prenez pas pour de la barbarie : d'abord, le couperet aujourd'hui est pacifique, métaphorique. Et puis, dans n'importe quelle démocratie européenne ou anglo-saxonne, quand un responsable devient irresponsable, sa tête tombe, il est viré.

Pourquoi vous dire tout ça ? Parce que je me réjouis ce soir, j'applaudis à la décision de mon camarade Bruno Le Roux de sanctionner les députés frondeurs (sept seulement, c'est dommage, il y a encore de la place dans la charrette). Les frondeurs, vous connaissez : ce sont ces socialistes qui jouent contre leur propre camp. Pendant la Grande Révolution, les guillotinés venaient principalement du parti républicain : on n'est jamais si bien trahi que par les siens. C'est une guillotine plutôt douce, dont ils n'auront pas trop à se plaindre : les députés renégats sont seulement mutés dans d'autres commissions moins sensibles que celles dans lesquelles ils siégeaient. Logique : on ne pouvait pas les laisser détruire la politique du gouvernement. D'autant que l'Assemblée nationale se prépare à des débats et à des votes importants : le budget, la Sécurité sociale.

Je suis heureux que ces fortes têtes tombent, parce qu'il y a, au sein de mon parti, une tendance ancienne à laisser faire, un coupable laxisme, au nom de la démocratie interne. Sauf que la démocratie a bon dos, quand il s'agit pour des élus de piétiner les choix du parti et de cracher sur les décisions du gouvernement. J'ai été traumatisé (le mot n'est pas trop fort) par ce qui s'est passé en 2005 : la majorité du parti avait démocratiquement adopté la Constitution européenne, la minorité de l'aile gauche s'est assise sur ce vote et a miné de l'intérieur le PS en militant contre sa direction et la décision des adhérents. A l'époque, aucune tête n'était tombée, la gangrène avait gagné tout le parti, en une sorte de chienlit délibérée.

Ce n'est pas tant les méfaits des frondeurs au sein du groupe parlementaire qui m'inquiètent : ils sont peu nombreux et isolés, encore plus depuis les sanctions prises aujourd'hui par Bruno Le Roux. Non, ce qui me préoccupe, ce qui me semble périlleux, c'est le mauvais exemple donné à la base du parti. Tout ce que les sections comportent de pétomanes de la contestation risquait, sur le modèle des frondeurs, de jouer de concert contre le parti et le pouvoir auprès de l'opinion. Ce soir, ils y réfléchiront à deux fois, ils savent que l'air de 2005 n'est plus possible.

Les termes que j'emploie dans ce billet sont forts, mais ils viennent du coeur : je ne supporte pas ceux qui en sont sans en être, qui ont le cul entre deux chaises, qui voudraient bien avoir le beurre et l'argent du beurre, être socialiste tout en critiquant la social-démocratie. Si tel est leur choix, ok, respect, mais il y a un parti pour ça, qui leur tend les bras : le Front de gauche. Le parti socialiste, lui, ne peut pas supporter ni admettre des ennemis de l'intérieur. Des têtes, oui, encore des têtes.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Et la tienne attaquée par un quarteron ( enfin presque ) de citoyens pas bien identifiés comme sauveurs de la patrie ... Et de 'l humanité réunies ???

Emmanuel Mousset a dit…

Pour le moment, ça va, j'ai encore la tête sur les épaules.

Erwan Blesbois a dit…

Il faut se rendre à l'évidence, je suis venu trop tard à l'intellect. Les socialistes modernes, le "PSD", ne fait preuve d'aucune imagination pour contrecarrer la crise : réduire les coûts, en premier lieu celui du travail. Moderniser, c'est-à-dire réduire les coûts, investir et augmenter l'offre sans augmenter la demande. Logiquement l'homme est devenu un fardeau pour l'humanité, logiquement la question de l'euthanasie volontaire (pour les gens sains de corps et d'esprit mais qui estiment qu'ils coûtent trop cher à la société), devrait se poser, puisque tout est une question de réduction des coûts, d'intelligence comportementale et de discipline. Or l'homme est un coût pour l'homme. Donc la modernisation de la société devrait passer par une modernisation de l'espèce humaine, en réduisant son coût pour l'espèce humaine : c'est cela la logique malheureusement du libéralisme économique, logique totalement triomphante aujourd'hui, sans autre alternative que de vieilles résistances corporatistes (les pilotes d'avion à 17 000 euros par mois, et les notaires) et sociales. C'est la logique de la "liberté" anglo-saxonne qui l'emporte sur la logique égalitaire française : pour s'en sortir il faut sortir du troupeau, condamné à une sorte d'abattoir de plus en plus légitime et légitimé. C'est bien la question de la régulation de l'espèce humaine pour la préservation de l'environnement qui se pose aussi. Or la question de la régulation de l'espèce humaine n'est jamais posée puisque la question de l'euthanasie est une question tabou, notamment pour des raisons historiques, puisque l'euthanasie renvoie à la question de l’État nazi. Et qui voudrait voir une société où ses enfants peuvent se donner la mort librement ?
Les deux fondements qui régissent la vie humaine sont l'instinct de conservation et le principe d'identité (suis-je bien moi-même?), le regard est tourné sur soi, avant de s'ouvrir à l'extérieur. Par conséquent l'homme se regarde le nombril, quand il fait du mal aux autres (par sa "liberté", dont l'expression sociale est le libéralisme économique), et bien sûr quand il détruit son environnement.

Anonyme a dit…

La France redeviendra sereine uniquement quand il n'y aura plus des Guérini à gauche , des Sarko à droite (la liste est longue ) des gens qui devraient être débarqués de la scène politique , la plus grande révolution ce serait que ce soit les partis qui excluent ces personnages ,tout le monde cite l’Allemagne comme exemple en matière de productivité , de finances etc ... mais elle l'est aussi en politique , des leaders ont eu droit à la porte et surtout de ne pas revenir en politique , alors pourquoi nos supposés leaders oublient de s'en inspirer !!!!!!!!ils devraient y penser car quand le peuple sera dans la rue il sera trop tard c'est quand même incroyable des peuples entiers de par le Monde sont prêts à mourir pour la démocratie et en France les partis politiques bafouent celle ci !!!!
.

Erwan Blesbois a dit…

Je peux paraître contradictoire puisque je prône une forme de régulation, et que le libéralisme économique est une forme de régulation, en éliminant de la société humaine ses "parasites". Or je suis comme Houellebecq, je pense que l'artiste est un "parasite sacré". Sera dite bonne une société qui permet à ses artistes de s'épanouir. Le bien n'est que dans l'art, le mal est partout ailleurs. Or le libéralisme est un des pires régimes pour l'artiste, puisqu'elle le considère comme un parasite. La société du libéralisme ne permet qu'aux prédateurs de bien vivre, or les prédateurs ne sont pas intéressants, ce ne sont pas des créateurs. Je prône une régulation raisonnée, non une régulation sauvage sur le modèle de la nature, qui ne permettrait qu'aux prédateurs de bien vivre. Les prédateurs, c'est-à-dire les riches, sont aussi méchants qu'ils le paraissent, seuls les créateurs sont bons ; et je soutiens aussi que beaucoup de pauvres sont mauvais. Une société qui ne privilégie pas ses créateurs : artistes, mais aussi philosophes et scientifiques, est une société en déclin. C'est cela le véritable déclin de notre société, et que déplore d'ailleurs quelqu'un comme Finkielkraut, qui au passage se trompe de cible en visant exclusivement l'immigration. L'immigration massive est cependant une mauvaise chose en tant qu'elle est une conséquence de la logique libérale et non sa cause. C'est donc la logique libérale qui est la véritable ennemie de la création, à travers tous ses parasitages, dont l'immigration est un des phénomènes, avec la télévision aussi ; mais il y en a beaucoup d'autres.