lundi 1 septembre 2014

Des contestataires sans avenir



Après une semaine et un week-end pleins de contestations, que va devenir le parti socialiste ? Paradoxalement, je n'ai aucune inquiétude quant à son avenir ! Quand j'entends parler d'implosion ou d'explosion, je souris : ça fait 30 ans qu'on en parle, dès que le PS traverse des difficultés, c'est-à-dire régulièrement ! Et il ne se passe jamais rien ... Je ne suis pas du tout préoccupé par ça. Il y a bien sûr des raisons objectives à ma sérénité et à ma confiance.

D'abord, une raison de fond : le PS est un appareil qui fédère une somme d'intérêts, collectifs et individuels, des postes, des fonctions, des mandats, tout un réseau de milliers d'élus et de responsables qui n'existent et ne vivent que par le parti et qui n'ont absolument aucun intérêt à le voir éclater. Même les plus contestataires d'entre eux savent que sans le PS, ou avec un PS atomisé, ils ne sont plus rien. Ils continueront à critiquer la machine, mais ils sauvegarderont la machine. Quant à risquer un départ, une scission, les exemples de Chevènement et de Mélenchon refroidiront les plus ardents.

Ensuite, une contestation n'a d'avenir que si elle réussit à s'unir, autour d'un leader et d'une ligne politique. Actuellement, c'est totalement inenvisageable. Le seul leader potentiel des contestataires au sein du PS, ce serait celui par qui le scandale est arrivé : Arnaud Montebourg. Or, s'il a l'apparence d'un leader, il n'en a pas l'étoffe : des moulinets avec les bras, des discours va-de-la-gueule et des ruptures fracassantes ne font pas un chef.

Quand on voit comment Montebourg s'est fait viré du gouvernement après une connerie plus grosse que lui, la pantalonnade de Frangy, Hamon accroché à ses basques, on comprend que l'ancien ministre n'a pas la dimension. Un bleu aurait été plus prudent, plus habile, plus maître de lui. D'autant qu'en dehors du pouvoir, privé de tout mandat, Arnaud Montebourg se retrouve à poil, plus rien à quoi se raccrocher, plus rien pour exister, sinon la lumière des médias, qui s'éteint sur soi aussi vite qu'elle s'est allumée.

Et puis, le passé d'Arnaud témoigne contre lui. Il y a dix ans, il fondait le NPS, nouveau parti socialiste (déjà), avec Benoît Hamon (déjà). Et il en a fait quoi ? Nada ! En 2005, Montebourg et son NPS, dans le débat sur la Constitution européenne, étaient pour le "non" mais avaient choisi de s'abstenir d'entrer en campagne, pour ne pas s'opposer directement au parti qui avait majoritairement dit "oui" : c'est gentil, mais ce n'est pas une position politique ! On ne milite pas en croisant les bras.

Après l'aventure avortée du NPS, Arnaud Montebourg a choisi de rejoindre les "reconstructeurs", ce qui l'a conduit à soutenir Pierre Moscovici dans le cadre de je ne sais plus quel congrès. Je le revois encore à La Rochelle, en bout de table, en compagnie du staff strauss-kahnien, Cambadélis, Borgel et compagnie. Ensuite, Arnaud s'est enthousiasmé pour Ségolène, devenant quasiment plus royaliste que Royal. C'est dans son tempérament : plein d'excès inconséquents. A la primaire socialiste de 2011, il défend une ligne très à gauche, qui normalement devait le conduire, au second tour, à soutenir Martine Aubry. Que croyez-vous qu'il rallia ? Le social-démocrate Hollande ! Voilà Arnaud : complètement imprévisible et contradictoire !

Sans leader, les contestataires à l'intérieur du PS sont également sans ligne politique, parce que beaucoup trop divisés entre eux. Il y a l'aile gauche pur jus, Lienemann, Maurel, Filoche, des contestataires patentés, labellisés, psychologiques et historiques, qui ne voudront sûrement pas se faire doubler par un contestataire d'occasion, incertain, peu fiable. Il y a Benoît Hamon, qui va réintégrer son courant où l'attendent Henri Emmanuelli et quelques amis, aile gauche eux aussi, mais prudente, accommodante (jusqu'à la bourde de Frangy). Il y a les députés "frondeurs", qui font parler d'eux mais qui ne constituent pas une majorité. Surtout, ils tirent sur la nappe mais ne renversent pas la table, sachant très bien qu'une dissolution de l'Assemblée les mettrait au tapis. Ils iront loin dans la contestation, mais ils n'iront jamais au bout de la contestation. Bref, il n'y aura pas de front commun Montebourg, Guedj, Hamon, Lienemann.

Du coup, les sociaux-démocrates peuvent dormir sur les deux oreilles. Ils sont au pouvoir, ils tiennent le parti, ils ont un chef qui a prouvé son autorité, ils défendent une ligne précise, ils ont trois ans devant eux pour convaincre et gagner. Alors, pourquoi voulez-vous que je m'inquiète ? Si, quand même : le mauvais exemple des contestataires, sans effet sur le PS et le gouvernement, donne du grain à moudre à la droite et surtout à l'extrême droite. Voilà seulement ce qui est déplorable.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

En 2012 vous aviez dit que Montebourg était un de vos deux ministres préférés du nouveau gouvernement et vous ne manquiez pas d'éloge pour Arnaud.

Anonyme a dit…

Vraiment croyez vous que cette affaire des contestataires soit un sujet qui va passionner les français .... Si car ils ont compris que ça faisait encore monter le FN qui n'a plus aucun effort pour récolter de plus en plus de voix ...

Emmanuel Mousset a dit…

Pour Montebourg, oui, avant Frangy, c'était un homme d'avenir. Plus maintenant.