dimanche 5 octobre 2014

Manif pour rien



Il arrive qu'on défile pour rien. J'en ai déjà fait l'expérience. Mais ce n'est pas une raison. Aujourd'hui, la "manif pour tous" va manifester pour rien : le mariage homo est dans la loi, même la droite n'y touchera pas ; la GPA, inutile de la refuser puisque le Premier ministre la refuse déjà. Alors, il reste quoi ? Des pauvres gens en désarroi parce que le monde change. Des manipulateurs aussi, qui n'hésitent pas à mettre en avant leurs propres enfants, à les exhiber, otages d'un conflit d'adultes, poussettes en tête de cortège.

De même, il y a manipulation des symboles et des slogans. Regardez ce tract, en vignette, trouvé dans Saint-Quentin : le drapeau flottant brandi par des poings rappelle l'esthétique soixante-huitarde, les affiches du PSU ou des maoïstes. Et les slogans, "l'humain n'est pas une marchandise", "l'enfant n'est pas un objet", "la femme ne peut être exploitée", auraient leur place dans une manifestation altermondialiste. Même la formule "abolition universelle de la gestation pour autrui" est inspirée d'un vieux slogan anarchiste du XIXe siècle : "abolition universelle du salariat". Récupération, confusion, manipulation.

Le paradoxe, c'est que les anti et les pro GPA ne sont pas des adversaires, encore moins des ennemis, mais des rivaux, des concurrents : tous sont des défenseurs de la famille, famille hétéro ou famille homo, laissée à la nature ou aidée par la science. C'est comme le "mariage pour tous" : l'institution contestée en Mai 68 au nom de l'amour libre est aujourd'hui revendiquée. La révolution par la tradition ! Drôle d'époque ...

Le fondement de la famille, ce n'est pas l'amour, c'est le désir d'enfant. Jésus a demandé de s'aimer les uns les autres, pas de faire des gosses ; Roméo et Juliette avec des gamins, c'est la fin de la grande passion. Ce désir d'enfant est éminemment problématique. Autrefois, il n'en était pas question : on avait un enfant par hasard ou par devoir, pas par désir. Pour les pauvres, c'était un malheur, une bouche de plus à nourrir, régulé par l'infanticide. Pour les puissants, c'était la garantie du maintien de l'héritage, politique (les aristocrates) ou économique (les bourgeois).

Le désir d'enfant, purement moderne, devait forcément déboucher sur cette folie qu'est la GPA. Logique : un désir qui veut absolument être satisfait bascule dans la folie. On veut un gosse mais on ne peut pas ? Alors, on va chercher un autre ventre, ou on se fait implanter un utérus, ou on va chercher du sperme ailleurs : c'est la génération des bébés Frankenstein. Et le délire monstrueux n'en est qu'à ses débuts ! Tout ça parce qu'on veut assouvir son désir d'enfant, qui n'a rien à voir ni avec l'amour, ni avec l'enfant, mais avec soi-même et son désir chéri.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Vous écrivez il y a quelques jours qu'il faut désacraliser la famille et maintenant vous dénoncez la gpa, en écrivant qu il est scandaleux qu'un enfant ne soit pas porté par sa mère ?
que la marchandisation du bébé soit scandaleux ok, mais qu'un couple homosexuelle est recours à la gpa ca ne me choque pas sur le principe.
Les biologistes sont d accord pour dire que le désir d'enfant ( égoïste)est naturel, les psy disent qu'il comblent le vide de notre existence et nous permet une meilleur insertion dans la société.
Je suis convaincu qu'un enfant issu d'une gpa, peu parfaitement être équilibré dans sa vie à partir du moment ou comme chacun d entre nous il est inséré dans un groupe, pas besoin d'une "vrai famille "pour etre heureux et s epanouir.

Emmanuel Mousset a dit…

1- Je n'ai pas à désacraliser la famille, puisque celle-ci n'est pas sacrée, mais simplement un fait naturel.

2- La GPA n'est pas scandaleuse, elle est folle : le désir fou de vouloir un enfant à tout prix (ce qui vaut autant pour les hétéros que pour les homos, je ne fais pas de distinction).

3- Faire des enfants pour combler un prétendu "vide de l'existence" et "permettre une meilleure insertion dans la société", c'est atroce. Je plains les enfants issus d'une telle frustration et d'un pareil désir !

4- Il n'y a pas de "vraie" ou de fausse famille : il n'y a que la famille, sous différentes formes selon les époques.

Anonyme a dit…

Ce débat est relancé sans que le gouvernement s'entoure de garanties .. Les politiques imprudents se substituent aux garants de la société , scientifiques , philosophes et chercheurs , et ce pour leur grande perte à un moment où les populations ne croient plus en eux ; faire de ce débat un argument électoral est complétement fou .. Et ils vont y perdre leurs dernières parcelles de crédibilité ..

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Anonyme a dit…

Je me demande pourquoi trouver un problème dans chaque désir d'enfant.
Ferait-on un pas en avant, en reconnaissant les couples homos et le mariage,et ensuite en arrière.pour concrétiser l'amour par un enfant,ce qui est aussi simplement "un fait naturel"mais qui peut être interpellant,pourquoi?